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La Santé Du Dirigeant De PME, Un Actif De L’Entreprise?

La santé du dirigeant de PME devrait être considérée comme un actif intangible de l’entreprise. Il conviendrait même d’intégrer cette dimension dans le bilan financier au même titre que la prévention des risques psychosociaux dans le bilan social. A ce titre, un article en 2010 montrait déjà que les cadres de proximité étaient significativement soumis à l’épuisement professionnel, compte tenu de leur environnement stressant, avec toutes les conséquences qui peuvent en découler dans la sphère professionnelle comme privée.

Nous sommes alors en droit de nous interroger sur le dirigeant. Malheureusement,  les données relevant du secret médical, leur obtention s’avère plus que difficile et leur traitement, désormais sous le joug des nouvelles règlementation relatives à la protection des données, limite leur utilisation et occulte par conséquent les mesures anticipatrices qui pourraient en découler.

La santé du dirigeant, une question de perception

Mais la question centrale réside dans la perception de sa santé par le dirigeant lui-même. Dans un environnement hyper compétitif qui ne laisse que peu de place à l’erreur, comment prendre conscience que sa santé est nécessaire au fonctionnement et  la pérennité de l’entreprise ? car c’est là que se situe réellement le débat. Conscient ou inconscient, le sentiment d’infaillibilité du dirigeant est un frein essentiel dans la prise en compte de la santé tout comme la connotation taboue de cette interrogation.

Même si une étude réalisée en 2015 par Opinion Way pour le compte de Malakoff Médéric semblait montrer  que 79% des dirigeants de TPE/PME s’estimaient être en bonne ou en très bonne santé (contre 69% des salariés), il apparaît cependant complexe de demander à un dirigeant, sollicité en permanence et qui doit « faire face » de manière discontinue aux aléas de l’entreprise, de prendre le recul nécessaire pour réfléchir aux stratégies préventives à mettre en œuvre pour préserver son capital santé. Ceci va du reste dans le sens  des résultats obtenus par Olivier Torres, professeur à Montpellier Business School et fondateur de l’Observatoire de la santé des dirigeants Amarok, qui a pu faire ressortir qu’ « ils n’ont pas le temps de faire du sport, de déjeuner sainement et d’aller faire un contrôle de santé régulièrement ».

Pour le chercheur, 70% des dirigeants estiment ne pas pouvoir s’arrêter même si leur médecin le leur prescrit, renforçant ainsi l’hypothèse selon laquelle le dirigeant s’estimerait « irremplaçable » et doté d’une forme d’invincibilité. Dans la même étude d’Opinion Way, seuls 7% admettent avoir été arrêtés les douze derniers mois contre 32% chez les salariés. Mais il ne faut pas y voir hâtivement un signe de bonne santé car les raisons de ce faible taux peuvent tout simplement s’expliquer par un refus de se faire arrêter. D’ailleurs, la nuance doit être de mise car parmi les mêmes dirigeants qui avouent avoir une bonne santé, 39% admettent qu’ils sont en surpoids, 23% qu’ils fument régulièrement  et 14% qu’ils consomment de l’alcool quotidiennement.

Le dirigeant, un personnage sacré ? 

La question de la santé du dirigeant est donc un sujet tabou et la hiérarchie, ce « pouvoir sacré » (hieros-pouvoir et archie-pouvoir) en est sans doute la cause première. Le dirigeant est, en quelque sorte, un Héros, ce personnage mythologique qui, s’il ne jouit pas de l’immortalité, garde jusqu’à sa mort des pouvoirs supranaturels. Il est un guerrier valeureux et rusé, à prendre ici dans le sens de la Mètis, la ruse de l’intelligence chez les Grecs, une posture qui caractérise les personnes « tournées vers l’instant et les situations changeantes et imprévisibles qui exigent une action immédiate » comme aime à le rappeler Marilia Amorim. Du reste, il est intéressant de noter que ce type d’intelligence est généralement observé dans les contextes de guerre ou de survie, une coïncidence quand on voit les conditions d’exercice des dirigeants de PME ?

Même s’il est de mise de ne pas généraliser, le dirigeant de PME demeure très souvent seul face à la décision et aux aléas de son entreprise, ce qui tend à créer une distance supplémentaire, un culte du secret qui peut renforcer le processus de « sacralisation ». Néanmoins, cela a des conséquences sur son moral. Selon une étude récente conjointement menée par Amarok et Bpi le Lab, 74% des dirigeants de PME et d’ETI ne se sentent pas véritablement entourés et 45% d’entre eux éprouvent un véritable isolement.

Des impacts sur la santé de l’entreprise ? 

On comprend vite, compte tenu de ce qui est écrit ci-dessus, que le lien entre la santé du dirigeant et la santé « globale » de l’entreprise n’est pas aisé à faire. Cependant, il est très probable que la prise de conscience (ou non) peut avoir des conséquences directes ou indirectes sur l’organisation. Un dirigeant qui apparaît comme ayant une santé précaire peut mettre le doute dans l’esprit des collaborateurs quant à la survie de l’organisation, ce qui peut impacter la motivation des équipes. Autre point important, dans une PME, le dirigeant  est très souvent un leader, et comme tout leader, il rassure en cas de difficulté. Il est une fonction « imitée » en cas de « coup dur », de changement de conjoncture.

Il semblerait qu’un dirigeant conscient de sa santé se montre davantage responsable vis-à-vis de celle de ses collaborateurs. Sensibiliser le dirigeant à sa santé apparaît donc être un levier pertinent à actionner pour prévenir les risques tels que les TMS (traumatismes musculo-squelettiques) ou les RPS (risques psycho-sociaux) de l’entreprise toute entière, des risques pour lesquels les mesures d’impact sur la performance économique de l’entreprise existent d’ores et déjà.

C’est le pari qu’à décidé de relever le Groupe « Pharmacie Principale » à Genève, en abordant cette question en y intégrant une dimension médicale, en mesurant les constantes au travers d’un questionnaire audit santé, car en terre helvétique, cela est encore permis… une initiative à suivre.

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