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Success story | Huda Beauty, papesse de la beauté du nouveau millénaire

© Huda Beauty

Le rêve américain. Huda Kattan a toujours eu pour boussole de faire de sa passion son métier. Cette self-made woman avait aussi une revanche à prendre dans le business de la cosmétique qui ne s’adressait pas à elle. L’Américano-irakienne n’a jamais vu sa beauté valorisée par les marques établies et, à travers elle, tant de femmes invisibilisées de par le monde. Lentement mais sûrement, l’autodidacte a bâti un empire dépassant le milliard de dollars. Figurant désormais en bonne place dans tous les palmarès des femmes les plus influentes, Huda Beauty lance à présent les tendances dans ce secteur qui ne l’a pas vu venir.  Rencontre.

Nous avons tous des rêves mais peu d’entre nous parviennent à transformer une passion en activité rentable. Qu’est-ce qui a fait la différence pour vous ?

Huda Kattan : Nous avons tous des rêves fort heureusement, mais après il faut être en mesure de sortir de l’abstraction pour choisir d’être un « doer » (faiseur) plutôt qu’un « dreamer » (rêveur). Ce cheminement est laborieux, si éprouvant, néanmoins cela vaut toutes les peines du monde. Dans mon parcours, j’ai rencontré beaucoup de personnes avec d’excellentes idées. Cependant ce n’est pas suffisant pour se lancer dans le business. L’exécution reste la clef du succès. J’ai saisi cette nuance dès le début, c’est pourquoi j’ai procédé par étape en commençant par des sujets que je maîtrisais. J’ai fait du blogging pendant quatre ans avant de lancer ma marque Huda Beauty. Pour moi, il était primordial de connaître ma communauté, ses besoins et l’écosystème. J’ai très tôt pris conscience de la puissance des réseaux sociaux et compris la nécessité de façonner certains produits pour Instagram et consorts. Mon approche m’a permis d’anticiper les évolutions dans le secteur de la beauté. De fait, lorsqu’on essaye de vous détourner de votre stratégie, apprenez à suivre votre intuition.

Vouliez-vous dès le départ être une marque globale ? 

Oui, toujours. Sans doute par ce que j’ai grandi et vécu aux Etats-Unis, un pays où nous pensons « big » (rires). Aussi parce que je savais que mes clientes venaient de toutes provenances géographiques : Emirats Arabes unis, Turquie, Algérie, Mexique, Brésil, Thaïlande, Inde… En fait, je voulais m’adresser à ces milliards de femmes invisibilisées par l’industrie cosmétique. Pour comprendre Huda Beauty, il faut comprendre que j’étais moi-même une consommatrice contrariée car aucune marque ne s’adressait à moi, ne s’intéressait à moi. Je n’avais jamais vu de peaux foncées  valorisées, présentées comme un canon de beauté désirable. Peu de produits existaient pour ce marché colossale. J’ai donc pris des risques énormes pour me lancer sur ce créneau ! Tout mon argent de make-up artist et d’influenceur, je l’ai réinvesti pour bâtir ma marque. D’ailleurs, même ma famille et mes amis les plus proches ont essayé de me raisonner pour que je cesse « de rêver éveillée ».

Aux yeux de vos proches, c’était donc une belle utopie…

Pour eux, la cosmétique n’était pas un sujet sérieux, je devais le vivre comme un passe-temps. Oui, c’était dur de résister à ces appels à renoncer puisque finalement cela venait de personnes bienveillantes à mon égard. Alors pour continuer à payer mes premiers salariés, j’ai dû accepter des deals en tant qu’influenceur en attendant de générer des profits. C’était une période très difficile mais j’ai tenu bon. A cette occasion, j’ai découvert la responsabilité, la solitude d’être un entrepreneur, la dureté du métier. 

Dans quels marchés le succès a-t-il été immédiat ? 

Au Moyen-Orient, en Angleterre et en France. Les lancements de mes faux cils puis de mon Liquid Lipstick ont rencontré un succès phénoménal bien loin des prévisions les plus optimistes ! Mon distributeur Sephora s’attendait à écouler ses stocks en 1 an et finalement tout a été sold-out en une semaine.

© Huda Beauty

 

Comment les grandes marques vous ont-elles regardée ? 

J’ai fait face à beaucoup de critiques, on me considérait comme un feu de paille. J’ai emprunté 6000 dollars à ma sœur quand mes finances étaient au plus bas et j’ai réinvesti cette somme dans de l’affichage publicitaire. J’ai ciblé des grandes villes que je considérais stratégiques afin de préparer au mieux mes deux lancements. Pour la concurrence, j’étais née sur les réseaux sociaux et je m’adressais à une audience trop globale, autant de facteurs susceptibles de me freiner. Pour ma part, j’avais un tout autre logiciel de pensée : j’étais en train d’émerger au moment opportun, prête à capter une communauté sans distinction de frontières, de culture, de genre…

Aujourd’hui, vous affolez tous les compteurs en générant 250 millions de dollars annuels de vente alors que votre fortune vous classe dans le Forbes 100 des plus puissantes self-made women. Quand vous regardez le chemin accompli, quelles sont vos leçons de leadership ? 

Etre un vrai leader, c’est aller au-delà de votre personne pour rester focus sur vos équipes, vos clients et partenaires. Il faut savoir mettre ses idées de côté afin d’être dans l’écoute et faire preuve d’empathie, de patience. Chaque jour est un nouveau challenge quand vous avez vraiment à cœur votre communauté. Ce n’est pas une question de rayonnement personnel mais de la pérennité de sa compagnie. Ma leçon est donc de ne jamais perdre de vue ses priorités. J’ajouterai aussi que, quand on est une femme leader, la confiance en soi, l’estime de soi sont primordiales. Apprenez à résister aux discours négatifs des autres, n’abandonnez jamais qui vous êtes pour plaire aux autres. Enfin, il faut être humble, se mettre tous les jours en question. Sans mon équipe, je ne suis rien.

Huda Kattan : « J’étais moi-même une consommatrice contrariée car aucune marque ne s’adressait à moi, ne s’intéressait à moi.« 

 

Quel a été l’impact de la pandémie sur vous et sur votre activité ? 

Avant dans l’industrie, il y avait lancement sur lancement ! La pandémie a mis un coup d’arrêt à cette surenchère. Lorsque le monde s’est figé, j’ai immédiatement pris la décision de couper un grand nombre de dépenses accessoires, j’ai entrepris un gros travail d’inventaire pour préserver les finances du groupe dans un contexte de fortes incertitudes. A titre personnel, j’ai perdu le goût du maquillage et n’avais plus cette passion : je n’aurais jamais cru vivre un tel désamour ! Tous ceux qui me connaissent savent que le make-up, l’univers de la beauté, c’est ma vie ! Pendant quelques temps, je ne pouvais plus. La flamme est revenue de long mois après, fort heureusement.

Un mot sur votre stratégie à moyen terme ? 

Il y a un mix de plusieurs choses. Nous sommes d’abord prêts à prendre plus de risques, à investir davantage dans la recherche et le développement, car j’ai la conviction qu’un bouleversement est à l’œuvre dans ce secteur. Le Web3, les NFTs et tout ce qui a trait aux technologies numériques vont prendre de plus en plus de place. Je suis très attentive à ce qui se passe de ce côté et j’ai d’ailleurs investi dans le metaverse. Il y a une certitude en tout cas, jamais le marché de la beauté ne s’est aussi bien porté et je m’en réjouis !

 

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