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Malgré l’accélération prévue des ventes de véhicules électriques en Europe, des doutes persistent

véhicules électriquesVentes de véhicules électriques en Europe. | Source : Getty Images

Les prévisions de ventes de véhicules électriques à batterie (VEB) en Europe sont plus qu’optimistes pour les huit prochaines années, avec une explosion des ventes atteignant les dix millions de nouveaux véhicules. Cependant, cette révolution suscite des doutes, bien que les responsables politiques de l’Union européenne (UE) décrètent qu’elle aura bien lieu.

 

Selon un article de The Economist intitulé « Could The EV Boom Run Out of Juice Before It Really Gets Going » (littéralement, le boom des véhicules électriques pourrait-il s’essouffler avant même de démarrer), les prochaines normes européennes pourraient faire augmenter le prix des batteries provenant du plus grand fournisseur, la Chine. L’UE devrait adopter de nouvelles réglementations sur les fournisseurs d’importations à forte émission de carbone, et la grande proportion d’électricité produite par le charbon en Chine pourrait faire grimper de 500 dollars le coût des batteries.

Les experts automobiles du cabinet de conseil mondial KPMG préviennent qu’en dépit de la croyance selon laquelle les véhicules électriques à faible consommation domineront le marché, le gagnant sera probablement une combinaison de technologies.

De nombreuses questions restent sans réponse quant à l’avenir des VEB. Y aura-t-il vraiment assez de batteries, avec tous leurs ingrédients exotiques, rares et coûteux, pour approvisionner ce marché ? Après tout, en Europe et, dans une moindre mesure, aux États-Unis, le passage du moteur à combustion interne (MCI) à l’énergie électrique est véritablement d’une ampleur monumentale. L’énergie électrique sera-t-elle suffisante ? Y aura-t-il une structure de recharge adéquate ?

Étant donné le prix élevé des nouveaux VEB, qu’adviendra-t-il de la majorité des acheteurs actuels des voitures à moteur à combustion interne les moins chères ? Les cyniques affirment qu’ils prendront le bus pour aller travailler, tandis que d’autres expliquent que c’est là tout l’intérêt de la politique de l’UE, qui consiste à forcer la majorité des automobilistes européens à quitter leur voiture pour se tourner vers les transports publics, pour le bien de la planète.

Stellantis, qui est aujourd’hui le deuxième groupe automobile en Europe derrière Volkswagen, a déclaré que le prix élevé des nouveaux véhicules électriques et l’absence de véhicules à moteur à combustion interne bon marché excluront les salariés moyens du marché, ce qui risque de provoquer un ressentiment politique.

La démarche de l’UE visant à exiler les voitures à MCI a commencé en 2015, avec un durcissement progressif des émissions de CO2 jusqu’en 2030, date à laquelle il sera presque impossible de gagner de l’argent en les vendant. Après le renforcement des règles européennes en 2025, même les véhicules électriques hybrides rechargeables (VEHR) auront du mal à survivre sur le marché.

Pourtant, les prévisions annoncent inlassablement la vente de jusqu’à dix millions de nouvelles voitures électriques dans toute l’Europe d’ici 2030.

Selon Schmidt Automotive Research, les ventes de VEB en Europe occidentale vont bondir cette année à 1 575 000, soit une part de marché de 14 %, contre 11 % l’année dernière. Les ventes atteindront 14,5 % en 2023 et 15 % en 2024 pour atteindre 1 950 000 unités. Les ventes reprennent de l’élan pour atteindre 20 % du marché en 2025, avant d’exploser pour atteindre une part de marché de 65 % en 2030.

L’Europe occidentale comprend tous les grands marchés automobiles comme l’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie et l’Espagne.

Bernstein Research prévoit que l’ensemble des ventes de VEB en Europe représenteront 14 % du marché cette année, 27 % en 2025 et 50,5 % en 2030.

Le cabinet d’investissement Jefferies a déclaré que les ventes de VEB en Europe atteindront 1 618 000 cette année, 3 919 000 en 2025 et un peu moins de dix millions en 2030.

Selon les prévisions de S&P Global Mobility concernant 30 marchés européens, la part de marché des VEB devrait atteindre 14,1 % cette année, 29,8 % en 2025 et 70,6 % en 2030, soit un total de neuf millions de véhicules vendus.

L’accélération actuelle des ventes de véhicules électriques à faible consommation est due aux consommateurs passionnés par l’énergie électrique et par tout ce qu’elle peut apporter à la planète. Ils achèteront probablement une Tesla, une Volkswagen, une Hyundai ou une Kia électrique à l’improviste, malgré les prix élevés. Cela ne durera pas lorsque les acheteurs ordinaires aux revenus moyens voudront acheter une nouvelle voiture.

Carlos Tavares, PDG de Stellantis, a déclaré que les règles de l’UE conduiront à une mort prématurée des véhicules à MCI, ce qui est un gaspillage, car les hybrides essence/électrique ont un rôle crucial à jouer dans la réduction des émissions de CO2. Carlos Tavares a critiqué l’UE pour avoir conçu des règles anti-CO2 qui étaient motivées par la politique et non par l’industrie : « Je ne peux pas imaginer une société démocratique où il n’y a pas de liberté de mobilité parce que c’est seulement pour les gens riches et que tous les autres utiliseront les transports publics ».

Les groupes environnementaux n’ont pas tardé à critiquer Carlos Tavares et à dire que les règles de l’UE ne sont pas assez strictes si l’on veut éviter la menace de l’urgence climatique.

Stellantis est née de la fusion du Groupe PSA et de Fiat Chrysler Automobiles en janvier 2021. Stellantis est propriétaire de marques européennes telles que Peugeot, Citroën, Opel, Vauxhall, Fiat, Maserati, Alfa Romeo et Lancia, et américaines telles que Jeep, Dodge et Chrysler. En juin dernier, Stellantis a annoncé qu’elle se retirerait de l’ACEA, l’Association des constructeurs européens d’automobiles, à la fin de cette année. L’entreprise serait en désaccord avec le rôle de l’ACEA dans la décision du Parlement européen d’interdire la vente de nouveaux véhicules à MCI à partir de 2035.

Stellantis continue de faire des déclarations controversées. Le directeur de la production, Arnaud Deboeuf, a déclaré en juin que si les VEB ne devenaient pas moins chers, le marché automobile s’effondrerait. Les experts craignent qu’en l’absence de véhicules électriques d’entrée de gamme bon marché, une grande partie du marché automobile européen disparaisse, paralysant ainsi l’économie des grands constructeurs de masse, ou qu’elle soit reprise par des constructeurs chinois, qui parviendront au même résultat.

Les constructeurs automobiles chinois sont déjà très présents en Europe. Selon le cabinet français de conseil en industrie automobile Inovev, les véhicules chinois vendus dans toute l’Europe ont atteint les 75 000 au premier semestre 2022, ce qui laisse penser que 150 000 ventes sont possibles pour l’ensemble de l’année. En 2021, moins de 80 000 véhicules ont été vendus. Jusqu’à présent, cependant, ces ventes n’ont pas encore ciblé les niveaux les moins chers du marché.

L’article de The Economist cite le cabinet de conseil Benchmark Minerals, qui affirme qu’en théorie, il y aurait suffisamment de nouvelles capacités de batteries d’ici 2031 pour les voitures électriques, mais cela dépend des nouveaux arrivants dans un secteur à forte intensité de capital. L’article cite S&P Global Mobility, selon qui la construction d’une usine de batteries prend généralement trois ans, mais nécessite souvent quelques années supplémentaires pour atteindre sa pleine capacité, et pourrait donc être insuffisante d’ici 2030. Les fabricants ont souvent des spécifications différentes pour les cellules de batterie, qui ne sont pas facilement interchangeables.

Selon The Economist, les perspectives concernant certains éléments importants des batteries sont inquiétantes. Certains nouveaux fournisseurs de nickel, comme l’Indonésie, comblent les lacunes de l’offre, mais leur qualité n’est pas aussi élevée que celle du Canada, de la Nouvelle-Calédonie et de la Russie, et ils doivent être fondus deux fois, ce qui émet davantage de CO2 et nuit à l’intérêt des véhicules électriques à pile. Le cobalt pourrait nécessiter un approvisionnement plus important en provenance de la République démocratique du Congo, mais ses antécédents en matière d’utilisation et d’abus du travail des enfants pourraient ne pas être acceptables en Europe. La plupart des incertitudes concernent le lithium, mais la décision d’augmenter la production est beaucoup plus coûteuse, selon le magazine.

Gary Silberg, responsable du secteur automobile mondial chez KPMG, a déclaré que les véhicules électriques à faible consommation d’énergie pourraient avoir la cote pour l’instant, mais qu’il est trop tôt pour en être sûr. « Un avenir en VEB est clairement la sagesse conventionnelle actuelle, mais je crois que les années à venir seront beaucoup plus compliquées et imprévisibles que ce que cela suggère », a déclaré Gary Silberg dans une récente interview.

« Avec les défis liés à l’infrastructure, je pense que l’avenir de l’industrie sera fragmenté et qu’il n’y aura pas de modèle unique et monolithique pour réussir : l’industrie ressemblera davantage à une mosaïque. Au cours des dix à 20 prochaines années, de multiples combinaisons de carburants et de groupes motopropulseurs, y compris l’essence et le gazole, coexisteront et l’innovation du secteur privé sera dictée par la demande des consommateurs », a affirmé Gary Silberg.

 

Article traduit de Forbes US – Auteur : Neil Winton

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