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Amazon Books A Chicago : La Fin De l’Omnicanal

Et de huit ! Depuis sa première librairie « brick-and-mortar » ouverte à Seattle en 2015, Amazon a ouvert 8 boutiques, dont celle, emblématique, dans le Time Warner Center à Manhattan (là même où Borders possédait une librairie jusqu’en 2011, avant de faire faillite). Entrons dans le Amazon Books de Chicago…

A priori, rien ne change : à droite, un Coffee Shop ; devant soi, des rayonnages de livres, comme chez Barnes & Noble.

Mais en fait, tout change.

Chaque titre ici est un livre vedette, présenté de face. (Graphistes et éditeurs savent l’importance de la couverture dans l’acte d’achat d’un livre).

L’appli Amazon est reine, et sert à beaucoup de choses. Avant l’achat, à vérifier le prix, et cela est intentionnel. Le prix du livre diffère selon le statut du visiteur : les membres Amazon Prime bénéficient du même prix qu’en ligne, tandis que les non-membres règlent un prix magasin légèrement supérieur. Même si Amazon s’en défend, il s’agit là d’une manière habile d’acquérir de nouveaux membres Prime (80 millions de membres aux Etats-Unis).

Et pour les clients que l’appli ennuie, il existe des lecteurs de code-barres qui donnent les prix en temps réel. L’appli sert aussi à accéder à du contenu additionnel (en scannant un code-barres sur l’affichette apposée à coté de chaque livre) et à régler ses achats.

Car il n’y a pas de caisse dans un Amazon Books. (Pour être tout à fait juste, il y en a une dans le magasin de Chicago, mais vraiment pour les irréductibles…). Pour payer, les clients utilisent leur compte Prime intégré dans leur appli, ou ils règlent avec une carte de crédit – le magasin n’accepte pas l’argent liquide.

Un magasin dicté par la data

Le classement des livres ne laisse aucun doute sur le fait qu’Amazon se sert de ses données en ligne géo-ciblées – les achats en ligne des habitants « lookalike » du quartier – pour présenter la meilleure sélection d’ouvrages adaptée à la clientèle locale.

Certains rayonnages s’intitulent « Fiction Bestsellers in Chicago » ou « Books Kindle Readers Finish in 3 Days or Less » (ce qui sous entend qu’Amazon a la possibilité de mesurer le temps de lecture moyen d’un titre lu sur un Kindle). Il existe aussi la transposition dans le monde physique des systèmes de recommandations « Si vous avez aimé ceci… », et « Highly Rated », les livres auréolées de 4,8 étoiles ou plus.

Une librairie ?

Amazon Books n’est en a que le nom. En réalité, au milieu de la libraire réside un spacieux showroom exposant tous les devices conçus et commercialisés par Amazon : les lecteurs Kindle, les tablettes Fire et toute l’écurie des assistants personnels Echo qui invitent à converser avec Alexa.

Selon certains analystes, le seul fait de détenir ces surfaces d’exposition pour permettre aux consommateurs de vivre une expérience tactile, impossible en ligne, est déjà pour Amazon une source de valeur. D’ailleurs, cette tactique est déjà à l’œuvre chez Best Buy, qui héberge avec succès depuis plusieurs mois des corners de Microsoft, Samsung et Sony pour promouvoir leurs produits.

Mais cela pourrait aller beaucoup plus loin. Amazon n’est pas seulement un distributeur, il est aussi un créateur de contenus. Avec le film Manchester by the Sea, qui a remporté un Oscar cette année, Amazon a démontré qu’il est aussi un producteur avec lequel il faut compter. Amazon Books pourrait rapidement devenir le showroom de l’ensemble des contenus Amazon, qu’il s’agisse de livres, de musiques, de vidéos et de films.

Le offline au service du online. (Et vice versa).

L’appli dans le magasin ? Elle sert aussi à suivre les mouvements du client : dans quels rayons se rend-il, pendant combien de temps, à quelle heure, à quelle fréquence ? A cela s’ajoutent ses achats online et magasin, et le tour est joué. L’omnicanal est bien mort. Online et offline s’auto-alimentent, et peu importe que la vente se fasse sur amazon.com ou dans un Amazon Books.

Dans la lignée du Washington Post

En fait, tout se tient. Jeff Bezos, depuis quatre ans à la tête du Washington Post, en a fait un journal à nouveau rentable, en appliquant la Data Science en vigueur chez Amazon.com. Bandito, un outil d’optimisation automatisée des articles web via l’intelligence artificielle, augmente le taux de lecture.
 Loxodo, une plateforme d’analytique prédictive, puise dans les data et utilise l’analytique afin de déterminer quels sont les meilleurs contenus à exposer à un lecteur. Tout le travail réalisé par son équipe au Washington Post, Jeff Bezos semble vouloir le réaliser désormais dans l’espace physique.

Le crème de la crème

Amazon Books n’entre pas en concurrence avec les librairies où l’on se rend pour l’atmosphère et le conseil. Il s’agit d’une autre expérience.

Sur Amazon.com, les clients de la section livres gagnent du temps : ils savent qu’ils vont facilement trouver le livre qu’ils veulent – et ils le régleront encore plus vite s’ils optent pour le one-click order.

Amazon Books s’adresse aux clients qui, ce jour-là, veulent prendre un peu de temps pour découvrir de nouveaux livres. Avec un risque limité – et c’est toute la force d’Amazon – puisqu’ils seront exposés à la « crème de la crème », une sélection d’environ 3 000 livres « data-driven ». Des titres dont Amazon sait que ce sont des best sellers, au vu de leurs performances en ligne, géociblées et en temps réel.

Amazon Books recrute et sur sa Page corporate, il se présente comme «the world’s most customer-centric bookstore ». Une libraire juste différente, comme l’était Amazon.com le 16 Juillet 1995, jour de son lancement.

Personnellement : « I’am in ! ».

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