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Start-up biotech et high tech françaises : même combat ?

Le feuilleton sur l’arrivée (ou non) des vaccins anti-Covid l’a démontré de manière éclatante : la recherche appliquée française en la matière n’a pas été défaillante, elle a juste manqué de moyens financiers – et d’un écosystème public-privé efficace – pour s’exprimer totalement. Résultat, les meilleures technologies et les meilleurs talents biotech sont partis (et vont encore partir) vers d’autres cieux pour pouvoir s’exprimer pleinement.

De ce fait, il est à craindre qu’on ne voie pas encore tout de suite la consécration en France d’une start-up médicale qui aurait trouvé, sur le sol national, suffisamment de capitaux, privés ou boursiers, pour devenir une puissante entreprise valorisée des milliards de dollars. Garantissant ainsi son indépendance, et possiblement celle de France dans des technologies de santé vitales pour l’avenir du pays.

Absence de prise de risque

Et si la situation était exactement la même pour le secteur des technologies de l’information, mis à part l’enjeu de santé publique ? A première vue, cela ne serait pas si étonnant que cela, les biotech – et en particulier la technologie de vaccins ARN – reposant de façon considérable sur la maîtrise des données numériques et des algorithmes qui permettent d’en tirer le meilleur parti.

Et de fait, l’on peut se demander si, plus les start-up biotech ont besoin des technologies de l’information pour réussir, plus elles sont dépendantes du contexte dans lequel les technologies numériques peuvent prospérer (ou non).

Quoi qu’il en soit, une évidence : les start-up high tech de ce pays souffrent des mêmes maux que leurs collègues biotech :  excellente formation académique des porteurs de projets dans les deux cas, financement (surtout public) initial suffisant pour faire éclore des projets et des technologies prometteuses.

Mais c’est après que la situation se complique : de l’idée, voire même du MVP (Minimum Viable Product), il y a loin jusqu’au succès commercial mondial. Dans les deux cas – et beaucoup plus encore dans les biotech – il faut du capital, beaucoup de capital, pour passer du premier stade au second. Pour y parvenir, il faut un capital qui n’hésite pas prendre des risques, c’est-à-dire celui de perdre la mise initiale. Et surtout le faire dans la durée, c’est le principe du capital-risque.

Or en France, celui-ci ne finance que très marginalement – malgré ce que proclament les professions de foi de nombreuses firmes de VC de l’Hexagone – les phases précoces de développement commercial de la solution technologique. Il y a à cela de multiples raisons, déjà largement documentées (absence de fonds de pension pour financer l’économie du risque, contraintes fiscales, etc…).

Même si la situation a tendance à s’améliorer (lentement), reste le plus grave, qui ne dépend cette fois que très peu d’une loi ou d’une volonté politique.

Ce qui permet à une firme technologique d’être vraiment en capacité de s’imposer au niveau mondial : c’est d’avoir accès à un écosystème de compétences de niveau mondial. Ce « soft power » est certes composé de petits génies de l’information (IA, robotique, IoT, data scientists, etc…) mais aussi et surtout d’experts en marketing global, en business développement, en stratégie commerciale. Bref, de tous ces gens qui permettent à un projet né dans un garage californien de devenir un leader mondial. Aujourd’hui encore, plus de la moitié des Licornes au monde sont nées en Silicon Valley, ce petit bout de Californie du Nord qui a inventé son modèle dès 1938 avec le soutien de l’université de Stanford à deux de ses étudiants, Bill Hewlett et David Packard.

Certes, on ne pourra pas – et ce n’est pas souhaitable – délocaliser tous les futurs champions technologiques français du côté de Palo Alto, afin de les exposer directement à ces milliers de talents mondiaux qui y prospèrent.

La recette existe

Mais on peut, en revanche, faire en sorte que ceux-ci s’intéressent de plus près aux pépites françaises, non pour les racheter de façon précoce, mais tout simplement pour les aider à réaliser tout leur potentiel.

Aucun angélisme là-dedans : c’est ce que font, depuis longtemps, chaque année, des milliers de start-up du monde entier qui ont établis des passerelles avec ces experts (pas tous américains mais vivant outre-Atlantique et donc pénétrés du modèle).  

Souvent, ces start-up venues de dizaines de pays différents le font avec l’appui explicite – et financier – de leur propre gouvernement. Des fonds publics d’agences gouvernementales ad hoc (MITI au Japon par exemple) vont ainsi financer des programmes permettant à leurs start-up d’accéder au savoir-faire et à l’expérience des meilleurs du monde.

Qui plus est, des réseaux de tels experts – y compris formellement tournés vers l’accompagnement d’entrepreneurs étrangers – existent dans la Silicon Valley, et sont prêts à contribuer. A condition de savoir comment travailler correctement avec eux, c’est-à-dire de constituer des équipes mixtes américano-françaises pour mettre les entrepreneurs français dans les meilleures conditions « d’apprentissage » possibles.

Le bénéfice serait immédiat : en permettant aux start-up même très « early stage » de faire leur preuve de concept, c’est-à-dire qu’elles auraient une vision précise de leur potentiel de marché réel au niveau mondial, leur valorisation augmenterait immédiatement. Et, comme par miracle, les investisseurs privés de l’Hexagone seraient prêts à prendre davantage de risques pour elles. De tels exemples existent déjà. Ils sont malheureusement encore bien peu nombreux.

 

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