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Le Travail En Mode « Projet » Signe-t-Il La Fin Des Fiches De Postes ?

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Des avantages partagés du management par projet

On l’aura compris à travers cette explication rapide, le management par projet entraîne une révolution dans l’idée qu’on se fait d’un poste en invitant à laisser de côté le concept de titularisation.

Autant de changement peut inquiéter, ou paraître difficile à mettre en place, mais les avantages qui en résultent sont particulièrement intéressants. En particulier, on remarque que, dans ce système d’équipe, ce qui profite au salarié profite naturellement à l’entreprise et vice versa. En effet, le management en projet promeut :

· Un outil pour lutter contre la routine ! Au lieu de suivre un plan de carrière établi, un employé se verra confier différentes tâches au cours d’une année, ce qui multipliera les challenges et l’amènera à développer de nouvelles qualités. Cela correspond bien aux attentes des jeunes travailleurs des générations Y et Z, les digital natives, qui voient le monde du travail comme une pépinière où entreprendre en permanence. L’approche est d’autant plus bénéfique lorsqu’il y a peu de perspectives d’évolution au sein de la structure. On peut ajouter qu’un groupe qui fonctionne de manière organique permet d’harmoniser les charges de travail qui pèse sur chacun.

· En découle un apprentissage individuel constant, car l’expertise des participants augmente au cours de la réalisation du projet. Ainsi, les salariés développent leur employabilité, en se formant continuellement à de nouveaux processus. Signalons aussi que cela les amène à utiliser des compétences individuelles rarement sollicitées ou méconnues d’eux-mêmes.

· En découle également une stimulation de l’intelligence collective au travers du partage constant des expériences, des échanges de méthodes et de concepts, des confrontations des points de vue… Chaque employé se retrouve amené à collaborer avec des personnes extérieures à son service – et parfois extérieures à l’entreprise si le projet le nécessite.

 

Valorisation du travailleur

On change alors de paradigme pour définir le bon employé : au lieu de promouvoir celui qui aura les compétences adéquates, on se tournera vers celui qui, par son état d’esprit, ses désirs et ses qualités, se sentira pleinement investi dans les projets qui lui seront confié. Celui qui, en quelque sorte, trouvera sa place dans le groupe.

En effet, la conséquence la plus importante de ce nouvel « état du travailleur », c’est le sens qu’il va trouver à son investissement. C’est cela que signifie « porter le projet et être porté par lui » : en s’impliquant à un niveau plus individuel, en définissant lui-même ses domaines de compétences, le collaborateur sait mieux « pourquoi » il s’investit. Aujourd’hui, un employé n’est plus un simple rouage dans un processus de production, mais une force de proposition et un élément décisionnel… et décisif !

De par la constitution d’équipes, on voit aussi se créer un renforcement de l’identité d’entreprise, du sentiment d’appartenance sociale et une nouvelle reconnaissance mutuelle entre les différents collaborateurs. Ceux qui jusque là ignoraient tout ou presque de la spécialité de l’autre, apprennent à se connaître.

 

Un travail repensé par le mode projet

On peut ajouter que cette approche a aussi des conséquences sur le projet lui-même. Son sens, sa raison d’être, se trouve réaffirmé grâce à la participation d’employés plus investis, plus engagés, que s’ils étaient des simples exécutants de tâches. Moins routinier, plus agile, plus alerte, cet employé du XXIe siècle fait corps avec l’entreprise et avec les projets qu’il suit.

 

En conséquence, le travail sera moins pensé comme une série de process menant à un objectif, selon un calendrier prédéfini, mais plutôt comme un développement constant de tâches qui découlent directement de l’évolution du travail. Dans ce cas, le calendrier offre une visibilité souvent plus courte, car les problèmes qui peuvent être détectés – et les angles d’approche choisis pour les régler – sont moins prévisibles : ils dépendent plus de l’équipe et de ses propositions. Tout comme le collaborateur ne suit plus un chemin de carrière unique, son angle d’approche des résolutions de problème est pluridisciplinaire.

 

Fin des fiches de poste et nouveaux rapport hiérarchiques

Néanmoins, la révolution la plus profonde est dans le fait que ce processus a un impact direct sur les rapports hiérarchiques. En effet, dans le modèle classique, même lors de l’instauration de process novateurs, on en reste souvent sur la formule du chef qui délègue des tâches et chapeaute le projet de A à Z. Si le management par projet contient quand même un responsable de mission chargé de veiller à la bonne marche de la réalisation, son rôle est purement logistique. Il n’a pas de responsabilité hiérarchique vis à vis des membres de son groupe. Toutefois, il est là pour écouter et recueillir les idées de chacun.

Ainsi, le management par projets permet aux travailleurs de dépasser certains clichés ou stéréotypes négatifs sur leurs supérieurs. On voit aussi disparaître en partie l’impression que certaines tâches sont inatteignables pour eux.

Au final, ces changements de rapports interindividuels entraînent la création d’une meilleure dynamique de travail en équipe, plus efficace, basée sur la polyvalence, non pas seulement de chacun, mais de l’équipe tout entière dans sa façon d’aborder les projets. En conséquence, on se retrouve avec une structure bien plus souple face aux fluctuations d’activités.

Des conséquences concrètes du management par projet

Dans son application, le management par projets déstabilise les modes de travail classiques et signe le début d’un nouveau monde professionnel. Il répond à l’arrivée de nouveaux outils numériques et se développe en symbiose avec cette transformation essentielle des entreprises. Car si un grand nombre d’entreprises perçoit la transition vers le digital comme une révolution, le management « projet » est en parfaite adéquation avec les nouveaux outils qui modèlent l’entreprise de demain. Sans parler des logiciels spécialement créés pour cette application (Asana, Trello, Azendoo, etc.), le simple fait de considérer l’employé comme un individu fait de compétences diverses, de désirs, d’envies et d’idées, comme une personne en constante évolution, entre parfaitement en résonance avec les nouveaux modèles promus par l’ère du 2.0.

Toutefois, la transition doit se faire doucement. Tenter un passage immédiat à l’approche par projets présente un risque potentiel de burn-out pour les collaborateurs. En effet, ceux-ci doivent, d’un seul coup, gérer une mobilité individuelle, une dynamique de groupe et des compétences qui leur étaient jusqu’alors inconnues. De même, les dirigeants peuvent se sentir perturbés par la dé-hiérarchisation soudaine de leur position. C’est pour ça que l’on préconise aux entreprises qui souhaitent faire le pas de mettre en place des groupes d’essais occasionnels, sur certaines étapes d’un projet donné, en pouvant revenir aisément à une gestion plus traditionnelle.

Une autre conséquence pratique du mode de travail par projets est la réduction drastique de la visibilité dans le temps. Les groupes de travail doivent être capables de répondre à des changements de direction inattendus, à l’arrivée de nouveaux outils et à des demandes clients qui suivent de près ces évolutions techniques. On considère généralement qu’en mode projet la visibilité dépasse rarement trois mois. Dans ce cas, c’est tout le groupe qui doit devenir plus agile, plus à même de changer de cap et de se réorganiser, y compris dans le partage des tâches, selon les instants.

 

Au final, si l’on pousse cette méthode à sa conclusion logique on arrive à un point où le but d’un projet ne sera plus d’atteindre un objectif défini à l’avance mais plutôt de rechercher cet objectif. Les équipes seront alors capables d’aborder le travail avec un client par les détails et les projets seront progressivement informés par la collaboration des employés, avec des objectifs non-définis et changeant, qui s’adapteront constamment au moment présent.

On comprend donc pourquoi il sera bientôt nécessaire de penser le recrutement selon une nouvelle logique élargie, où un CV présentant des compétences diverses et une carrière à entrées multiples deviendra un avantage, et non plus un signe d’éparpillement. En considérant la pluridisciplinarité comme la clef de la réussite, le management par projets pourrait renverser définitivement les bases de l’entreprise du siècle dernier et ouvrir une nouvelle ère entrepreneuriale.

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