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Edward Dolman, CEO de PHILLIPS : « 2020 a vu la transformation de l’expérience numérique, 2021 verra celle de l’expérience physique »

PhilipsEdward Dolman et Cheyenne Westphal, à la tête de la maison de vente aux enchères PHILLIPS

Troisième maison de vente aux enchères mondiale, PHILLIPS est un acteur incontournable des ventes d’art contemporain, spécialisées sur le segment des œuvres du 20e et 21e siècles. A l’occasion de l’ouverture de leur nouveau siège à New-York, dévoilé en juin dernier, Edward Dolman, Président de PHILLIPS, et Cheyenne Westphal, Global Chairwoman, ont accordé un entretien à Forbes France pour évoquer les thématiques qui bouleversent le marché de l’art comme la digitalisation du secteur et l’essor des NFTs.

 

Quel bilan tirez-vous de l’année 2020 ?

Edward Dolman : PHILLIPS a relevé avec brio le challenge imposé par le contexte sanitaire et économique de l’année 2020. Nos équipes ont travaillé sans relâche en pensant « Digital First » pour dynamiser nos programmes numériques et offrir une nouvelle expérience des ventes aux enchères en direct. Nos collectionneurs ont rapidement apprivoisé les nouvelles technologies, ce qui a permis au marché d’atteindre un haut niveau de confiance grâce à un flux constant de ventes dynamiques uniquement en ligne, de ventes hybrides et de ventes virtuelles en direct dans toutes les catégories.
Cheyenne Westphal : Nous n’aurions jamais imaginé qu’après des mois d’interruption des ventes aux enchères en direct, nous réaliserions en novembre 2020 la vente la plus lucrative à New York dans l’histoire de la société, emmenée par une œuvre exceptionnelle de David Hockney, vendue pour 41 millions de dollars. Le total de la vente, qui s’élève à 134,6 millions de dollars, représente une augmentation de 25 % par rapport à l’année précédente. Nous avons également enregistré une saison record à Hong Kong, avec un chiffre d’affaires en augmentation de 44 % par rapport à 2019.

 

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David Hockney, Nichols Canyon, image © Phillips

 

Quelles tendances voyez-vous se dessiner pour la suite, tant au niveau des places de marché que vis-à-vis de la demande des collectionneurs ?

E.D. : Le marché de l’art en plein essor en Asie et on assiste à un afflux de collectionneurs privés asiatiques qui enchérissent sur nos ventes à l’international. En 2020, nous avons vu les transactions avec les clients asiatiques augmenter de 30 %, avec cinq des dix meilleurs lots vendus en Asie. Dans cette optique, nous avons établi une collaboration avec Poly Auction, la plus grande maison de vente aux enchères de Chine continentale, pour nos ventes d’art contemporain et du XXe siècle à Hong Kong.
C.W. : Une autre tendance qui continue de croître est l’attention portée par les collectionneurs et les musées sur l’élargissement de leur sélection d’artistes afin d’être plus inclusif. Nous constatons que la place donnée aux artistes féminines et aux artistes issus de la diversité est de plus en plus importante. Je suis particulièrement fière de voir que notre vente d’art du XXe siècle et d’art contemporain, qui s’est tenue à New York le 23 juin dernier, ait intégré des artistes comme Amy Sherald et Carmen Herrera.

 

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Amy Sherald, The Bathers (détail), 2015, huile sur toile, image © Phillips

 

 La crise a-t-elle accéléré la transformation numérique de PHILLIPS ?

E.D. : PHILLIPS a mis le digital au cœur de sa stratégie depuis 2017. Lorsque la crise a débuté, les collectionneurs étaient déjà habitués à suivre les ventes aux enchères sur leurs téléphones mobiles et à enchérir directement dans les salles via l’App PHILLIPS. Nous avons toujours cru au pouvoir de l’engagement des ventes en ligne, et 2020 a renforcé cette tendance.
C.W. : La crise a accru la confiance des acheteurs à l’égard des enchères en ligne, avec des niveaux d’activité records. Le trafic a augmenté de 137% au printemps 2020, avec une hausse de fréquentation de 40% pour le web dont 66% de nouveaux clients. Pour accompagner les collectionneurs qui ne pouvaient pas se rendre dans nos galeries, nous avons mise en place des visites virtuelles, ce qui s’est avéré très utile pour toucher nos communautés d’acheteurs, quel que soit leur localisation. Bien sûr, cela ne remplace pas l’expérience unique de voir physiquement une pièce d’art, mais dans le contexte particulier que nous traversons, le digital est d’une grande aide.

 

Que pensez-vous des NFTs ? Épiphénomène ou tendance de fond ?

C.W. : Le marché des NFTs a offert aux maisons de vente aux enchères l’occasion de se présenter à une nouvelle communauté de collectionneurs qui soutient activement les artistes travaillant sur ce nouveau médium. Les NFTs sont à la pointe de la technologie et apportent une valeur durable au marché.
E.D. : Nous avons vendu notre premier NFTs de Mad Dog Jones pour 4,1 millions de dollars en avril dernier. Jusqu’à présent, nous avons proposé des NFTs dans le cadre de ventes indépendantes, mais nous pensons que les NFTs ne sont pas distincts de l’art physique. Ils constituent un nouveau support artistique lié au monde de l’art réel et doivent en conséquence être vendus aux côtés des peintures et des sculptures. C’est la raison pour laquelle ils feront certainement partie intégrante de notre offre à l’avenir.
C.W. : Notre décision de proposer des NFTs nous a également amenés à accepter les crypto-monnaies comme mode de paiement, ce qui a constitué un axe de développement passionnant pour l’entreprise. De plus, nous avons travaillé directement avec les artistes pour proposer leurs œuvres plutôt que de nous concentrer sur le marché secondaire, ce qui est la norme des maisons de vente aux enchères. Il est important que le marché de l’art dans son ensemble ne reste pas immobile et reste ouvert au changement. L’émergence des NFTS est une expérience fantastique et une évolution du marché que nous suivons avec la plus grande attention.

 

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Le nouveau siège de PHILLIPS à New-York, situé au 432 Park Avenue, réalisé en collaboration avec le StudioMDA

 

Qu’est-ce qui fait la spécificité de la maison de ventes PHILLIPS ?

E.D. : En nous concentrant exclusivement sur les 20e et 21e siècles, nous avons développé une marque pertinente et axée sur ce que les collectionneurs veulent aujourd’hui. Cela nous donne un avantage qui nous distingue de nos concurrents, avec nos six catégories comprenant l’art, le design, les bijoux, les montres, les photographies et les éditions. PHILLIPS a bâti sa réputation sur sa capacité à repérer les évolutions du marché et sélectionner les bons artistes au bon moment. C’est une des raisons pour lesquelles notre part de marché augmenté, et ce, même durant la pandémie.
C.W. : Ce résultat reflète la position éminente de PHILLIPS dans le domaine de l’art contemporain, un marché qui a connu une croissance exponentielle ces dernières années. Cela s’applique particulièrement au marché intermédiaire, sur lequel nous sommes très présents, ainsi qu’aux marchés en développement pour les artistes émergents. C’est un segment qui séduit les jeunes collectionneurs, qui ont été les premiers à basculer vers les transactions en ligne. Notre capacité à situer correctement les œuvres d’art sur le marché secondaire est un autre atout. Nous voyons souvent des enchères à des prix bien supérieurs aux niveaux du marché primaire. Citons par exemple The Lemon Bathing Suit d’Amoako Boafo qui s’est vendu 675 000 de livres contre une estimation de 30 000 à 50 000 livres à Londres en février 2020, et The Bathers d’Amy Sherald qui s’est vendu 4,2 millions de dollars contre une estimation de 150 000 à 200 000 de dollars à New York en décembre.

 

Marie-Caroline Selmer : Vous venez d’ouvrir un nouveau siège à New York. Pouvez-vous nous en dire plus ?

ED : Nous sommes incroyablement fiers de pouvoir accueillir les collectionneurs dans notre nouvel espace au 432 Park Avenue. Nous avons travaillé avec StudioMDA pour créer un nouveau type de maison de vente aux enchères, en créant des « zones » flexibles qui peuvent être facilement transformées pour présenter nos expositions en constante évolution et permettre la meilleure approche curatoriale du secteur. Des murs mobiles facilitent la création de galeries personnalisées pour des expositions, des ventes aux enchères ou des événements clients, tandis que la grande visibilité de nos galeries à plusieurs étages depuis la rue suscitera l’intérêt et, nous l’espérons, l’engagement du public. L’intégration de la technologie numérique permettra d’afficher des vidéos et des images contextuelles (s’adressant à la fois au public virtuel et au public en personne) et de répondre aux besoins d’une maison de vente aux enchères du 21e siècle. 2020 a vu la transformation de l’expérience numérique, 2021 verra celle de l’expérience physique.

 

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