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Chantal Baudron Cultive Son Ecosystème Pour Doper Ses Jeunes Pousses

chantal baudron

Chantal Baudron a plusieurs vies et une étonnante passion. La papesse du recrutement de la mode et du luxe est aussi la première business angel de France. Elle soutient près de 30 start-up. Mais sa plus grande fierté, c’est dans son jardin qu’elle la trouve.

À la question : « Quelle est votre plus grande fierté professionnelle ? » Chantal Baudron ne vous répondra pas : « Avoir créé l’un des plus grands cabinets de recrutement indépendants de ressources humaines. » Pourtant, cette diplômée de psychologie (Psychoprat et La Sorbonne), qui avoue être « tombée dans le recrutement » très tôt, a commencé sa vie professionnelle comme consultante chez Bernard Krief, avant de grimper tous les échelons jusqu’au sommet, pour devenir directrice générale de ce qui était, à l’époque, la plus importante structure de conseil en recrutement en France.
Pas suffisant pour l’insatiable Chantal Baudron qui décide en 1980 de voler de ses propres ailes en créant son cabinet. « J’ai vraiment démarré de zéro, je suis partie sans aucun dossier ou client », révèle celle qui pense que l’honnêteté est une valeur cardinale. Elle se spécialise très vite dans le secteur de la mode et du luxe. « J’ai choisi la croissance douce, privilégiant la qualité des collaborateurs, l’homogénéité des méthodes, la fidélisation des clients », explique la cheffe d’entreprise farouchement attachée à son indépendance. Sa plus grande fierté n’est pas non plus d’avoir participé au financement et soutenu près d’une trentaine de start-up depuis dix ans. Pourtant, Chantal Baudron est depuis plusieurs années en tête du classement des femmes business angels réalisé par Angel Square. Elle investit des tickets compris entre 20 000 et 50 000 euros chaque année, pour une mise totale qui frôle déjà le million d’euros. Une activité qu’elle pilote en marge de son métier de recruteur et qui lui permet d’accompagner des entrepreneurs qu’elle rencontre grâce à ses relations.
Non, la plus grande fierté de cette femme très coquette, c’est une rose. Sa rose ! Créée en 2010 par Jean-Pierre Guillot, à l’occasion des trente ans du cabinet Chantal Baudron. Une consécration pour celle qui avoue être dévorée par la passion de l’horticulture.

L’importance du partage

« Avoir une rose à son nom n’est-ce pas gagner un peu d’éternité ? En tout cas, c’est une forme de reconnaissance qui flatte l’ego ! » avoue-t-elle. Pour cette jardinière hors pair, les fleurs ne sont pas juste une passion. Plutôt une deuxième vie, en Dordogne, loin de ses bureaux cossus du boulevard Haussmann à Paris. Une école de la patience pour celle qui, avec son mari Michel, a acquis une ruine, un château du XVIIIe siècle classé à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, incendié par les Allemands en 1944. Et l’a rebâtie patiemment. Des années de reconstruction et d’aménagement pour redonner vie au château et lui façonner un écrin, un parc de cinq hectares.
Les jardins exceptionnels qu’elle a imaginés accueillent aujourd’hui 1 040 espèces de roses, dont la désormais fameuse Chantal Baudron. Pour partager sa passion, celle qui fait la pluie et le beau temps dans l’industrie de la mode et du luxe ouvre ses jardins secrets au public. L’argent sert à financer les travaux de reconstruction de l’église du village. Et c’est la même idée de partage qui l’a amenée à devenir business angel :
« J’investis mes économies. Plutôt que de faire des placements financiers classiques, je préfère aider des jeunes en soutenant leurs projets. » Avec succès ! Elle commence par investir dans la société de la belle-fille d’un de ses clients. Un concept de maison d’accueil pour les enfants en dehors des vacances scolaires, avec un modèle BtoB et BtoC, baptisé Filapi. L’affaire est vite revendue à une entreprise du secteur. « J’ai doublé ma mise », raconte-t-elle fièrement en avouant ressentir la même excitation qu’au casino.

« Une affaire de rencontre »

Une vingtaine d’investissements suivront. Avec toujours la même martingale. « Mon métier consiste à évaluer les gens, c’est donc sur ce critère que je base la plupart de mes investissements une fois que je suis convaincue par le modèle de l’entreprise. Je n’ai pas de stratégie particulière, et je souhaite que cela reste une affaire de rencontre. J’ai par exemple rencontré un jour une directrice du marketing et du digital chez Fauchon dont j’ai tout de suite repéré les qualités. Lorsqu’elle a monté son concept de magasin dédié à la vente de meringue (La Meringaie), je l’ai tout de suite suivie. »
Mais pas question de s’éparpiller pour autant. Chantal Baudron a ses secteurs de prédilection : la mode, le luxe, la cosmétique, l’éducation et le digital. « De par mes relations, j’ai beaucoup investi dans la cosmétique, explique t-elle, mais aussi à la périphérie de mon métier, comme dans Kudoz ,considéré comme le Tinder de l’emploi, que Le Bon Coin a racheté récemment. Dans cette branche, j’ai aussi accompagné Mitch, qui aide les non-cadres, et Extracadabra, dédié aux extras dans les métiers de bouche. Plus récemment, j’ai rejoint deux beaux dossiers dans la blockchain. La start-up BCDiploma qui sécurise et certifie les diplômes et Crystalchain qui, elle, garantit grâce à la blockchain la traçabilité des viandes, notamment à Carrefour. À chaque fois, je m’intéresse aux équipes tecŸiques, j’essaie de rencontrer le CTO ou les développeurs quand cela est possible. »
Mais Chantal Baudron a surtout son propre timing d’investissement. « Je n’investis que si je comprends le produit et je privilégie plutôt les phases d’amorçage, lorsque la start-up n’a pas encore réalisé de chiffre d’affaires. Mais c’est souvent compliqué de rejoindre un projet au tout début de l’aventure, c’est plus simple lorsque la start-up vient de lever des fonds et qu’elle a une meilleure visibilité pour les trois ans à venir. Par ailleurs, j’ai quelques clients dans les entreprises de capital-risque et j’ai donc investi à quatre reprises dans des fonds, celui de Fashion Capital Partners, de CapHorn Invest, de Luxury Tech Fund et d’Educapital », ajoute-t-elle.
Celle qui dit manquer de temps pour se consacrer pleinement à tous ces projets ne rechigne jamais à ouvrir les portes de son cabinet à ses jeunes ouailles. « Nous venons d’ailleurs de concevoir un produit spécialement pour les start-up avec de l’assessment [processus qui consiste à évaluer les compétences d’un individu par sa mise en situation au cours de simulations, NDLR], des RH partagées, du coaching, etc. », égraine la femme d’affaires.
Mais Chantal Baudron leur ouvre également son carnet d’adresses. Car elle cultive aussi ses réseaux, du CEW, le Cosmetic Executive Women, au très chic Cercle des femmes actives de l’Interallié, en passant par Femmes Business Angels. « C’est un écosystème qui permet une lente mais sûre fertilisation croisée », explique Chantal Baudron. Décidément, avec la première business angel de France, on en revient toujours au jardin.

 

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