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ESG : de l’erreur méthodologique du E, du S et du G

Teleperformance vient de recevoir le prix Enlightened Growth Leadership de la part de Frost & Sullivan, récompensant le groupe pour son engagement ESG. La capacité de Teleperformance, figurant dans le CAC 40, à tenir son engagement de neutralité carbone d’ici 2040, à répondre aux enjeux liés à la crise sanitaire et à réduire les inégalités entre les sexes, a notamment été saluée.


 

Ce prix illustre combien l’entreprise est devenue en quelques années un corps intermédiaire, en charge de nombreuses missions traditionnellement dévolues au pouvoir régalien. 

Ainsi, on attend d’elle qu’elle participe activement à la lutte contre le réchauffement climatique, qu’elle lutte contre les inégalités, qu’elle reflète et intègre la diversité sociale, qu’elle s’approprie les enjeux sanitaires, qu’elle contribue enfin plus largement au bien-être collectif et au bien commun.

Depuis la loi Pacte, la partie déclarative de cette contribution au bien commun prend la forme de l’édiction d’une raison d’être. Surtout, et dans un raccourci narratif, cette responsabilité de l’entreprise se cristallise désormais dans le sigle ESG, E pour environnement, S pour social et G pour gouvernance. Si l’on perçoit aisément les bénéfices d’une telle abréviation, notamment son efficacité, elle porte en elle une double erreur méthodologique dont nous allons démontrer que les conséquences ne sont pas théoriques.

D’une part, le placement du G en troisième et dernière position, occulté ainsi par les deux premiers, réduit son importance. Cette erreur méthodologique est d’autant plus majeure qu’il ne serait précisément y avoir de bonne politique de l’entreprise dans les domaines du E et du S, sans une bonne gouvernance. Pas de E, pas de S sans un G solide.

Car c’est bien la gouvernance qui permet d’assurer la prise en compte, à travers la stratégie définie et portée par les instances décisionnelles, des défis environnementaux et sociaux.

 

Sans une gouvernance solide et en particulier un conseil d’administration compétent et volontaire, les enjeux environnementaux et sociaux ne pourront être embarqués et défendus efficacement et sincèrement par l’entreprise.

D’autre part, le sigle E-S-G laisse penser que les trois volets, parce que mis sur le même plan, sont de même nature, et par là-même remplissent des fonctions similaires.

Voilà donc la seconde erreur méthodologique. La gouvernance est un moyen, et doit le rester, tandis que les défis environnementaux et sociaux sont des objectifs.

 

Le E, le S et le G n’ont donc pas la même nature.

Toute autre analyse, notamment celle qui verrait dans la gouvernance une fin en soi, menace l’entreprise et l’exercice sain du pouvoir. Il s’agit là d’une compréhension purement fonctionnelle de la gouvernance qui porte en elle une déviance très grave, celle de considérer qu’une fois les métriques de bonne gouvernance posées et imposées aux différentes instances décisionnelles, le plus souvent en respect avec la lettre et non l’esprit des codes de gouvernance de Place, la gouvernance est nécessairement garante de la qualité des décisions sociales. Cette conception détourne la gouvernance de sa fonction, être au service de la création de valeur de l’entreprise, financière et extra-financière, ainsi que de son partage.

En mettant le G au même plan que le E et le S, le sigle érige la gouvernance en finalité, aux côtés des objectifs environnementaux et sociaux. La gouvernance devient une matière autonome, sans boussole, sans objectif… si ce n’est la gouvernance !

 

Il est donc urgent de désolidariser les trois initiales afin de rendre à ces trois volets leur juste place et leur juste fonction.

Et de rappeler, une fois de plus que, si la gouvernance est un actif à part entière, elle ne serait être une fin en soi. La gouvernance porte la stratégie, dont la fonction ultime est de servir l’intérêt de l’entreprise, lequel passe désormais par l’intégration nécessaire car vitale des enjeux environnementaux et sociaux.

 

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