La Société Forestière de la Caisse des Dépôts accompagne les investisseurs (particuliers et institutionnels) qui se tournent vers la forêt. Dans un contexte de lutte contre le réchauffement climatique, cet investissement est loin d’être anodin et pousse le marché, déjà étroit, à s’adapter. Jean-Pierre Mesnil, Directeur des Investissements Forestiers et Fonciers, et Aymeric Plauche-Gillon, Directeur des Investissements en Groupements Forestiers, répondent à nos questions. 

 

Pouvez-vous présenter la Société forestière de la Caisse des dépôts ?

La Société Forestière est une des premières sociétés de services dédiées aux espaces forestiers et naturels en France. Acteur de référence de la filière forêt-bois depuis 1966, la Société Forestière construit pour ses clients, en France et à l’international, une gamme innovante et unique de solutions et de services intégrés, nourrie de l’expérience de terrain développée par ses collaborateurs. Filiale du Groupe Caisse des Dépôts, agréée par l’AMF, elle gère les actifs forestiers de la majorité des investisseurs institutionnels français, de Groupements Forestiers et de particuliers, représentant une valeur d’actifs de plus de 2 milliards d’euros. Intervenant sur près de 310 000 hectares, la Société Forestière réunit les compétences et expertises de plus de 170 spécialistes travaillant au plus près du patrimoine de ses clients grâce à son réseau d’agences régionales. Sa gestion durable est certifiée ISO 9001 et ses forêts sont éco-certifiées PEFC. Mobilisée sur des projets de territoires, elle investit dans une sylviculture responsable et engagée, valorisant les externalités et aménités du patrimoine naturel forestier (capacité de séquestration carbone, régulation de la température et de l’humidité, …) et favorisant les cobénéfices (biodiversité, paysages, emploi local…).

 

Quelles sont justement vos missions ?

Notre première mission est la gestion forestière durable des patrimoines de nos clients. Nous mettons en œuvre les pratiques sylvicoles assurant sur le long terme le meilleur revenu à nos clients, tout en conciliant les intérêts économiques de la filière bois française, l’adaptation au changement climatique et la préservation des écosystèmes forestiers. La Société Forestière est le partenaire de référence pour les transactions forestières à l’achat ou à la vente en France et à l’international. Pionnière et leader de ce marché, elle intervenue sur environ 115 000 hectares de forêts achetées ou vendues en France depuis 2005. Et chaque année, elle réalise de l’ordre de 20 % des transactions portant sur des forêts non bâties de 100 hectares et plus. Nous créons également des véhicules d’investissement généralistes (groupements forestiers) et sur mesure pour répondre aux attentes patrimoniales et extra-financières de nos clients institutionnels et particuliers. La Société Forestière est, à cet égard, agréée depuis 2014 par l’AMF (Autorité des marchés financiers) pour la gestion de Fonds d’investissements Alternatifs. A ce jour, nous assurons l’intégralité des opérations pour plus de 7 000 associés personnes physiques, sur plus de 100 véhicules d’investissement forestier. La Société Forestière développe, en outre, en France et à l’international, une offre de conseil et d’expertises à destination des acteurs publics et privés des territoires : projets de sylviculture urbaine (arbres en ville), diagnostics phytosanitaires arboricoles … Nous mettons également en œuvre des « solutions fondées sur la forêt », en accompagnant nos clients qui souhaitent investir dans les services écosystémiques de la forêt, sans nécessairement en détenir le foncier : projets à impact « carbone », pilotage d’actions en faveur de la biodiversité …

 

La Société Forestière de la Caisse des Dépôts est aussi sollicitée par les territoires…

Nous mettons notre expertise au service des collectivités locales pour valoriser la place et le rôle de l’arbre en ville, non pas uniquement comme un élément de décor mais également comme un régulateur climatique : l’arbre constitue un remède aux îlots de chaleur urbain (ICU) par la création de microclimat ou par la séquestration de carbone. L’arbre permet d’atténuer les conséquences du changement climatique, de recréer de la biodiversité à partir de niches écologiques, d’améliorer la qualité de l’air, tout en embellissant le cadre de vie, augmentant, ainsi, l’attractivité du territoire. Nous disposons, pour ce faire, d’une équipe d’experts arboricoles avec des compétences spécifiques sur l’arbre en ville.

 

Qui sont vos clients et pourquoi investissent-ils dans la forêt ?

Nous avons deux catégories de clients : les particuliers et les investisseurs institutionnels. Nos clients particuliers veulent diversifier leur patrimoine, détenir un actif tangible, qui prend naturellement de la valeur grâce à la croissance biologique des arbres. Dans le contexte inflationniste actuel, de nombreux investisseurs se tournent vers cette solution pour protéger leur patrimoine. Les jeunes générations cherchent, en outre, de plus en plus à donner du sens à leur investissement. Ils se tournent vers la forêt, avec un véritable intérêt pour sa dimension environnementale, tout en bénéficiant d’une fiscalité adaptée au cycle long de production. A titre d’exemple, il faut l’investissement de 5 générations successives de forestiers pour produire un chêne à merrains ; c’est souvent la troisième génération qui récolte pleinement les fruits de l’investissement initial. Nous proposons, selon les objectifs et les montants à investir, aux particuliers d’acquérir de la forêt en direct ou des parts de groupements forestiers. Nous travaillons également avec des investisseurs institutionnels, des entreprises, des gestionnaires d’actifs qui cherchent à diversifier leurs patrimoines, à introduire de la forêt dans leur allocation d’actifs et à contribuer à la préservation de l’environnement. Nous proposons de créer des fonds spécialisés qui détiennent des forêts en France et en Europe. Certains acteurs ont d’ailleurs des exigences précises et nous devons répondre à des cahiers des charges rigoureux sur le volet environnemental. Nos clients ont conscience du rôle que peut jouer la finance comme contributrice déterminante à la lutte contre le réchauffement climatique ou l’érosion de la biodiversité. Nous accompagnons ces démarches vertueuses en traduisant la volonté de ces acteurs, souvent formalisée en une stratégie, en actions concrètes. 

 

De quelle manière répondez-vous aux demandes de vos clients ?

La Société Forestière établit un véritable dialogue avec ses clients pour répondre à leurs besoins et leurs exigences. C’est un vrai défi puisqu’il s’agit d’un actif encore peu connu. Très concrètement, nos équipes doivent d’abord comprendre les besoins et les motivations des clients, leur présenter les différents modes d’acquisitions possibles de la forêt telle que l’acquisition en direct ou via des véhicules dédiés ou collectifs. S’agissant des particuliers, nous mutualisons les investissements en créant des groupements forestiers. Les risques inhérents à l’investissement forestier, notamment climatiques et sanitaires, sont ainsi maîtrisés au sein de portefeuilles diversifiés en termes d’essences d’arbres et de zones géographiques. Sur ce point, la connaissance fine de nos experts forestiers, agréés et membres du CNEFAF, est indispensable pour sélectionner les massifs, les sols, les essences et estimer les stocks de bois d’une forêt, par exemple. Sur les 310 000 ha gérés par la Société Forestière, 130 000 ha appartiennent à des institutionnels, 90 000 ha à des groupements forestiers et 90 000 ha sont en gestion directe. 

 

Outre l’enjeu de protection de l’environnement, quelles sont les autres tendances de votre marché ?

Le marché des forêts français est un marché étroit, où il y a peu d’offres par rapport à la demande. C’est la raison pour laquelle nous étendons nos activités à l’international. La Société Forestière investit, ainsi, pour le compte de ses clients, depuis quelques années, en dehors de France ; par exemple, en Ecosse. L’autre tendance concerne les prix des forêts qui augmentent depuis 2010, partout dans le monde. L’utilisation de l’éco matériaux bois se développe, notamment dans la construction avec la nouvelle réglementation RE2020 dans le bâtiment pour tendre vers la neutralité carbone en 2050. Le redémarrage de la construction après les confinements a, ainsi, entrainé une forte augmentation de la demande de sciages et une tension sur le prix des matériaux notamment du bois.