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Quelle Place Pour La France Dans La Course Aux Véhicules Autonomes ?

Le CES 2018 a fait la part belle aux véhicules autonomes. Un acteur français, Nayva, a particulièrement pris la lumière avec la démonstration de son taxi autonome (l’Autonom Cab). L’automatisation des véhicules devient tangible ; elle aura des impacts économiques et sociétaux que l’Etat doit accompagner.

Bien que la mobilité soit depuis plusieurs années un secteur privilégié pour l’apparition de modèles d’affaires portés par de nouveaux usages et technologies, l’arrivée programmée du véhicule autonome accélère les mutations en cours.

Le véhicule autonome annonce une rupture de modèle pour les acteurs traditionnels

Les constructeurs traditionnels, les géants de la tech (Google, Apple, Baidu, etc.) et les nouveaux pure players automobiles (Tesla, Byton, Robomart Navya, etc.) qui se lancent dans cette course rassemblent progressivement les briques technologiques qui permettent le développement du véhicule autonome. Ces briques sont les capteurs (LiDAR, radars, ultrasons, RGB, etc.), les outils de cartographie, les chipset neuronaux qui exploitent les données des capteurs, la fusion de données pour exploiter en temps réel les données issues des séries de capteurs et enfin les télécommunications (entre véhicules et entre véhicules et infrastructures routières)1. Ces innovations augmentent évidement le contenu technologique du véhicule au détriment de son contenu industriel et la compétence logicielle devient un des facteurs les plus différenciant pour l’industrie2.

Ces compétences ne sont pas les compétences historiques des constructeurs traditionnels. Afin d’éviter de devenir les sous-traitants d’intégrateurs ou de systémiers technologiques, ceux-ci doivent intégrer ces nouvelles compétences, en propre ou en partenariat.

Le véhicule autonome, l’un des leviers de rééquilibrage des territoires ?

Le rapport de l’institut Montaigne de Juin 20173 rappelle l’intérêt des véhicules autonomes pour déployer des services de transports de personnes basés sur des véhicules de faible capacité (minibus, etc.), en particulier dans les zones peu denses. Dans un contexte où, depuis plusieurs années, des essais ou des rapports ont diffusé l’idée selon laquelle la répartition des bienfaits de la mondialisation dans les territoires a été inégale, le véhicule autonome comme solution de mobilité aux populations isolées (communes rurales ou seniors) illustre l’idée selon laquelle cette inégalité n’est pas une fatalité.

De plus, le véhicule autonome – et le véhicule connecté – s’inscrivent dans une réflexion plus générale d’une politique de la ville : les données issues de ces véhicules permettront par exemple optimiser les solutions de mobilité mises à disposition des citoyens.   

Les acteurs français et la concurrence 

Les constructeurs français multiplient les effets d’annonce depuis plusieurs mois4. PSA et Renault indiquent faire rouler des véhicules autonomes sur des voies publiques depuis 2016. L’alliance Renault-Nissan a même annoncé la création d’un fonds d’investissement d’un milliard d’euros dans la mobilité. Les équipementiers ne sont pas en reste. Valeo réalise ses propres tests et en 2017 a réalisé l’acquisition de la start-up allemande Gestigon, spécialiste du traitement d’images en 3D de l’habitacle.

Ces annonces ne sont malheureusement pas encore suffisantes. Selon Statistia, ce sont les entreprises allemandes (Bosch, Audi, Continental) qui dominent le classement du nombre de brevets liés à la conduite autonome et déposés dans le monde depuis 2010 ; aucun acteur français n’est présent dans le top 105. Aux Etats-Unis, l’historique Intel s’est engouffré dans le marché du véhicule autonome avec l’acquisition de Mobileye (start-up israélienne) en mars 2017 pour plus de 15 Md $. Nvidia, fournisseur de processeurs graphiques depuis 1993, en particulier dans le secteur des jeux vidéos, a profité du CES 2018 pour présenter les fruits de sa diversification vers le véhicule autonome avec de nouvelles puces offrant une puissance de calcul suffisante pour voir l’environnement et l’interpréter en temps réel.

L’Etat français peut jouer le rôle de catalyseur au sein de l’écosystème

Parce que les freins au développement du véhicule autonome ne sont pas seulement technologiques, l’Etat a aussi un rôle à jouer. D’abord sur la question de la responsabilité en cas d’accident d’un véhicule autonome. Le Royaume-Uni a ouvert la voie puisque son gouvernement a joué le rôle de coordinateur dans le cadre de consultations avec les assureurs en juillet 2016 pour adapter leurs règles actuelles6. Les freins réglementaires de l’ouverture de zones tests pour les véhicules autonomes posent question et in fine, offrir aux véhicules autonomes le droit de circuler sur la voie publique doit encore se définir. Enfin, la mise en place d’infrastructures spécifiques s’invite dans le débat. Par exemple, dans l’objectif d’instaurer un service de taxis à base de véhicules autonomes pour les JO de 2020, la ville de Tokyo a annoncé en 2016 le projet de cartographier précisément l’ensemble du territoire urbain7.

Conscient des enjeux, Edouard Philippe a fait du véhicule autonome une priorité et souhaite une stratégie nationale de développement des véhicules autonomes d’ici mai 2018. Espérons que son ambition soit au moins à la hauteur de celle portée par le Ministre des Finances britannique : les véhicules autonomes circuleront sur leurs routes en 20208.

 

1- Olivier Ezratty – Rapport du CES 2018

2- McKinsey – Automotive revolution, perspective towards 2030

3- Institut Montaigne – Quelle place pour la voiture demain ?

4- Les Echos – 12 février 2018 – Les tests des véhicules autonomes se multiplient

5- https://fr.statista.com/infographie/10890/qui-mene-la-course-a-la-voiture-autonome/

6- Connected And Autonomous Vehicle : the Future ?

7- https://www.forbes.com/sites/janetwburns/2016/09/08/japanese-leaders-aim-to-make-tokyo-a-self-driving-city-for-2020-olympics/#382ddebc1090

8- http://uk.businessinsider.com/the-government-wants-self-driving-cars-on-uk-roads-by-2021-2017-11

 

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