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Les prisons reflets d’un regard sur l’Homme

prisonSource : GettyImages

OPINION | Régulièrement la question des conditions de détention se pose en France en raison de la faible « capacité d’accueil ». Prisons insalubres, conditions de détention inhumaines, état antédiluvien des prisons sont autant de griefs qui revenaient régulièrement au rythme des réformes de la Justice, du vote des budgets pénitentiaires et disons-le aussi d’une certaine forme d’indifférence quant aux conditions de vie de ceux qui ayant fauté sont condamnés à une privation de libertés. Pendant longtemps les hospices, les asiles et les prisons connaissaient les mêmes dénuements et la même absence de droits ou de recours pour ceux qui y séjournaient.

Ponctuellement des révoltes, des suicides mais encore des stigmatisations par un Observatoire des prisons, par un Défenseur des droits, par les détenus eux-mêmes ou leurs avocats venaient troubler et médiatiser une confortable indifférence publique. A force les choses ont récemment changé avec le Conseil Constitutionnel qui, en réponse, à une QPC a déclaré non conforme à la Constitution l’absence de recours effectif devant le juge judiciaire pour des prévenus dont les conditions de détention constitueraient une atteinte à la dignité humaine. En conséquence de quoi, un juge judiciaire peut dorénavant être saisi. Ce faisant, la France a été récemment condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) pour l’état de ses prisons.

 

La question est de savoir s’il existe un bon modèle de prison ?

En ce domaine la règle du « quand je me regarde je me désole, quand je me compare je me console » est applicable, mais n’est pas une source de consolation ; de nombreux pays ayant des systèmes carcéraux qui n’ont rien à envier au notre en termes de précarité, état d’insalubrité ou dénuement. Si les prisons américaines font d’excellents décors de films ou de séries rappelons que du Prisonnier (puis l’Evadé) d’Alcatraz à Prison Break les détenus veulent tous s’en échapper. La privatisation de certains établissements a entrainé une dégradation des conditions de détention quand il ne s’agit pas d’une volonté délibérée de briser une résistance (Guantanamo) ou une réputation (la walkline depuis la prison de Rikers Island face à un mur de photographes proportionnel à la renommée de l’incarcéré).

La question est de savoir s’il existe un bon modèle de prison. On porte souvent au pinacle le modèle nordique. Des prisons suédoises propres – pour ne pas dire agréables – sans logique de barreau et d’enfermement, permettant les visites intimes de proches, permettant de priver de liberté un individu sans que celui-ci perde pour autant le contact avec la liberté effective qu’il a pu connaitre avant son incarcération. Ce modèle est séduisant. Il est certainement adapté pour un petit pays dont les problématiques de délinquance ne sont peut-être pas comparables avec celles qui peuvent être connues en France. Il est en tout cas transposable, pour une partie de la population carcérale française. Celle emprisonnée pour des délits mineurs, des pertes de courte durée, des jeunes mineurs ou majeurs offrant de bonnes chances de réinsertion. Là en effet la prison peut offrir les chances professionnelles et ouvertures culturelles que ces détenus n’ont pas eues avant. 

Maintenant que cela soit pour des conditions de détention provisoire ou non l’évolution, pour les cas où cela est possible, de nos prisons de geôles insalubres aux établissements suédois nécessite non seulement des décisions telles que celles du Conseil constitutionnel ou de la CEDH mais surtout des budgets. Le choix carcéral a un coût, certes, mais celui-ci doit être en cohérence avec la politique pénale générale et le principe d’exécution de la peine dont l’automaticité de la révision inscrite dans les textes et les pratiques a longtemps été un pis-aller, le cache-sexe honteux d’une politique quantitative pour vider les prisons, qui ne voulait pas dire son nom. Nous verrons ce que le prochain projet de loi en la matière va modifier en ce sens.

 

Tribune rédigée par Olivier de Maison Rouge, docteur en droit et avocat d’affaires et Nicolas Lerègle, avocat au Barreau de Paris

 

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