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Défaillances d’entreprise : comment rendre l’échec vertueux ?

« Avec 42.500 procédures ouvertes sur 2022, le nombre de défaillances d’entreprise accuse une hausse exceptionnelle de près de 50 % par rapport à 2021, un taux jamais observé auparavant « , déclare le cabinet Altares.

En effet, les faillites ont explosé dans toutes les régions françaises (la hausse de l’énergie, l’arrêt des aides d’état, le remboursement des prêts, la frilosité des foyers à consommer aussi …). Échec ou défaite ? De quoi parle-t-on ? Comme je l’ai entendu une fois lors d’une séance de coaching « dans notre CODIR nous parlons de non-réussite ». Intéressant de constater que ce mot d’échec était impossible à prononcer dans la culture de cette entreprise. En effet, globalement dans notre culture française nous associons le mot échec à celui de défaite.

Or, les sens sont différents et le terme de défaite et celui de se défaire de ne plus être dans l’action : une sorte de petite mort. Les « loosers » sont ceux ou celles qui ratent. Dans le monde de l’entreprise comme dans celui de l’école on ne les aime pas trop « les loosers ». Pourtant, ce sont souvent nos innovateurs, ceux et celles qui risquent, qui tentent, qui essaient. Alors, les médias nous montrent et vantent la réussite d’entrepreneurs winners en taisant souvent le parcours (parfois) compliqué de ces derniers. On parle d’ailleurs souvent des dégâts de l’échec et assez peu du coût de la réussite sur l’ensemble des domaines de vie pourtant il existe (famille/divorce, loisirs en berne, enfant élevés par des tiers, …). Et si finalement l’échec faisait aussi parti de l’aventure managériale et entrepreneuriale ?

  1. La dimension culturelle

La culture américaine offre aux entrepreneurs la possibilité de l’échec et ensuite, sans jugement négatif, le choix de se relever emprunts de fierté. C’est ainsi aux Etats-Unis et spécialement dans la Silicon Valley. L’échec est admis parce qu’il est source d’innovation. Ici tout se résume avec la formule bien connue « Fail fast, Learn fast ». Alors qu’en France et ce même en 2023, « avoir raté » et « être un raté » dans notre culture c’est amalgamé. Or, c’est évident « avoir raté » est juste l’idée que l’on a expérimenté une voie certes pas porteuse de fruits comestibles mais on a tenté. En effet, il est possible d’échouer sans l’associer à sa propre personne et à son égo.

C’est ainsi que l’on comprend facilement que l’échec devrait être enseigné dès la maternelle pour changer de point de vue sur ce dernier. Et féliciter l’échec parce qu’il est mu, au départ, par l’envie de créer. En précisant que seul(es) ceux et celles qui auront tenté pourront dire « j’ai raté parce que j’ai essayé ». Quelle avancée dans les mentalités !

  1. Détermination vs entêtement

Il est commun d’entendre « Après un échec, il faut se relever » un peu comme l’adage populaire « Lorsque l’on tombe de cheval et on se remet vite en selle ». Alors oui cela montre la bravoure de l’entrepreneur et son courage à faire face. Cependant il est aussi important d’envisager la capacité à se poser et à comprendre avec profondeur ce qui s’est joué. En effet, cela soulève la question du désir comme essence à faire. De quoi j’ai envie pour aujourd’hui et pour plus tard ?. Avoir cette force de vouloir vivre une autre aventure c’est en cela que se nomme la régularité. Ce sont d’ailleurs les mots de Steve Jobs : « Je suis convaincu que la moitié qui sépare les entrepreneurs qui réussissent de ceux qui échouent est purement la persévérance. ». Alors que l’entêtement tendrait à dire « j’y retourne sans me poser de questions » avec une injonction qui pourrait verbaliser « je dois » alors « je dois recommencer, je dois prouver, je dois refaire … »

Sauf que le temps de l’échec est celui de l’introspection et de la compréhension du « pourquoi on en est là ? ». L’échec questionne sur cette capacité interpersonnelle à revisiter ses propres désirs et donc ses propres peurs (de réussite parfois). C’est ainsi que l’on voit souvent se répéter des scenarios d’échecs parce que le questionnement était superficiel. Or, pour progresser sur la voie de l’entrepreneuriat il est utile de comprendre ses propres zones d’ombre. C’est échouer pour dire à quoi j’aspire vraiment et vers quoi je tends. En effet c’est en se confrontant au réel qui parfois résiste que l’on comprend que tout ne dépend pas uniquement de nos efforts à faire.

  1. De la Bienveillance pour soi avant tout

Être dans une situation d’échec doit permettre de se départir de l’égo pour pouvoir réfléchir sainement. Les plus grands innovateurs sont ceux et celles qui ont échoué au début. On peut citer quelques exemples connus comme Bill Gates, Pierre Oubidar, Elon Musk, Walt Disney, Thomas Edison, Steve Jobs, Xavier Niel … Le point commun de tous est l’échec qui leurs ont permis d’ensuite développer leur business avec la croissance qu’on leur connait. Visionnaires et souvent avant-gardistes, ils ont échoué pour une question de timing et ont su rebondir. L’échec est un catalyseur de sa propre responsabilité en disant « je suis responsable ».

L’enjeu est double, le premier est ne pas rejeter la faute sur l’autre (collaborateurs, contexte social, politique et économique, fournisseur …) et le deuxième de ne pas culpabiliser. En effet la culpabilité n’est pas un levier d’accession à la compréhension. En clair, elle est inutile. Le pire serait encore la rumination qui freine la réflexion et empêche la projection sereine d’une vision claire de l’avenir. La solution est là toute proche en vous inspirant des mots d’Henry Ford « Ne cherchez pas la faute, cherchez le remède ».

  1. Nos croyances dévastatrices doivent évoluer

Avant toute chose, il est essentiel d’accueillir l’échec comme il est. Maintenant notre nature humaine nous pousse souvent à y mettre des émotions comme la colère, la rage, la tristesse, la résignation parfois. Donc revisiter ses croyances sur l’histoire que l’on se raconte à propos de l’échec semble pertinent. Une multitude de croyances peuvent se bousculer : « Je n’y arriverai pas » « C’est terminé pour moi » « Je suis un(e) raté(e) » « Je ne suis pas fait(e) pour entreprendre »… La liste est longue. Quand votre cerveau se met en route en mode « down » dites bien à votre cerveau que cette expérience est un apprentissage en taille réelle. Soyez en gratitude pour cela. Parce que vous le savez probablement notre cerveau est friand de notre côté sombre en se complaisant dans la noirceur.

Comme le disait Miles Davis « Quand vous jouez une note, seule la suivante permettra de dire si elle était juste ou fausse ». Le tremplin est donc celui de la résilience en comprenant ce qui s’est déroulé en acceptant aussi de recevoir du feed-back, d’envisager les points d’amélioration (s’il y en a), de s’appuyer sur ses réussites passées et de décorréler l’échec de estime de soi. Il est urgent de dissocier votre échec et l’échec de votre entreprise. Cela n’a rien à voir. L’échec de votre organisation est juste un révélateur d’une vérité à un instant T mais jamais un révélateur de vos vulnérabilités et de vos incapacités. Il sert à éprouver la vie, à dire notre rapport au réel et à exprimer nos désirs.

L’échec doit être vu comme une expérience et non une humiliation. Il est évident qu’il y a une énorme travail à faire en déplaçant votre regard sur votre propre histoire ; loin de ses cruels jugements auto destructeur et d’auto dévaluation. De toute façon il existe toujours de bonnes âmes pour vous rappeler votre chemin d’erreur. Donc tout démarre par vous.

Parce que comme le précise l’adage latin  « Errare humanum est persevare diabolicum » il est intéressant d’aller plus loin en partageant votre histoire et en rencontrant d’autres entrepreneur(e)s. Voilà quelques noms d’associations pour éviter la solitude et le petit vélo qui tourne en boucle dans votre tête. Ces associations peuvent vous accompagner : 60.000 rebonds, SOS entrepreneurs, Re-créer, Second Souffle. En concluant avec les mots de Samuel Beckett qui vont résonner pour certain(e)s « Déjà essayé. Déjà échoué. Peu importe. Essaie encore. Échoue encore. Échoue mieux. »

 

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