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Égalité Salariale : Les Femmes Gagnent Toujours 24% De Moins

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 » À travail égal, salaire égal « . Le 29 octobre 1996, la Cour de Cassation se prononce pour l’égalité des rémunérations qu’importe le genre de la personne. Une vingtaine d’année après, l’écart salarial entre hommes et femmes se chiffre à 24%Dans les espaces de coworking de WeWork France, Marie-Claire organisait le 9 février un colloque sur les entrepreneures. Au centre du débat, l’argent et l’attitude des femmes face à celui-ci.

« Vous pourriez être ma mère. » La réflexion misogyne de Robin Reda à l’encontre de la présidente de la commission des lois Yaël Braun-Pivet (LREM) fin janvier. Ou la double page du Point titrée « Jusqu’où ira-t-elle ? » et accompagnée d’une photo de Marlène Schiappa se dégrafant ou ré-agrafant son chemisier. Sexualisée ou réduite à l’image maternelle, la femme a encore du mal à s’imposer comme une entrepreneure dans l’imaginaire collectif. 

Le 9 février dernier, un débat animé par la journaliste Florence Dauchez dans l’espace WeWork abordait les thématiques de l’argent, l’auto-censure, le couple, l’éducation, la volonté de gagner de l’argent… Le tout à travers le prisme féminin. 

24% d’écart

Chez les hommes, évoquer le montant de la rémunération est monnaie courante. Ils sont en moyenne 49% à aborder le salaire dès le premier entretien contre 33% des femmes. Idem pour les augmentations, qu’ils sont 31% à réclamer contre 25% de leurs homologues féminins » J’ai travaillé dans la beauté, avec des équipes composées à 90% de femmes. Mes collaboratrices étaient très investies dans leur travail, on réalisait des chiffres d’affaires excellents et une chose m’a beaucoup étonnée : elles ne demandaient pas d’augmentations, alors même qu’on avait fini l’année en dépassant toutes les attentes ! « , témoigne Audrey Barbier-Litvak, directrice générale de WeWork France. 

Lorsque la question du salaire et de l’augmentation est lancée, Laetitia Avia, avocate et députée LREM, en profite pour dénoncer le double plafond de verre, femme de couleur.  » Je suis issue d’une famille pauvre « , évoque-t-elle avant de donner le montant de son salaire, 6000 euros. C’est d’ailleurs la seule à citer un chiffre. Lorsque les questions financières affleurent le débat, le tabou reste bel est bien présent.

Le plafond de verre est aussi évoqué par Axelle Tessandier, fondatrice AXL Agengy, une agence de réflexion et d’action sur la transition numérique. Elle s’est trouvée atteinte du syndrome de l’imposteur, l’impression qu’on ne mérite pas ce que l’on gagne. Plusieurs interrogations l’ont perturbé, dont un manque de confiance amenant une question :  » Est ce que je vaux ce que je touche ? « .  » Et vous, vous souffrez de ce syndrome ?  » lance-t-elle à la cantonade, ce à quoi une dizaine de femmes dans le public répondent en levant la main.

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Une certaine censure est présente dès lors qu’on parle d’argent. Historiquement, les liens unissant les femmes et l’argent sont directement connotés au pouvoir ou au  sexe : seules les prostituées ou les courtisanes avaient un rapport direct à l’argent, les épouses devaient quand à elles attendre une avance du mari pour pouvoir s’acheter quoi que ce soit. Le mythe de la femme dépensière n’a plus cours à présent.  » Les femmes discutent facilement des prix de leurs achats, plus particulièrement les millennials. Elles économisent, souvent pour des voyages. « , explique Ariel Steinmann, directrice marketing digital de BNP Paribas et Hello Bank. 

Intimité menacée  ?

«  Lorsqu’une femme se permet de gagner plus qu’un homme, ce dernier a souvent du mal à l’accepter, au point que les relations intimes deviennent très difficile à tisser « , évoque Axelle Tessandier. Une situation qu’elle a vécue et relate avec humour. Une redéfinition des rôles doit s’envisager, le couple ne repose plus sur l’apport matériel que l’homme se doit d’apporter. Une femme capable de s’assumer par elle-même suscite parfois la crainte de ses congénères masculins.

En règle générale, une femme aura moins de facilité à dire qu’elle change de travail pour gagner plus. L’épanouissement est plus souvent recherché. Des résidus de l’attitude de la  » bonne élève «  peuvent parasiter la demande d’augmentation et les femmes finissent par attendre que l’on reconnaisse leur mérite.  

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Culture masculine

Le 1er février 1966, les femmes peuvent ouvrir un compte en banque sans avoir besoin de l’autorisation de leur mari. A la maison, c’est souvent à la femme que revient la responsabilité de gérer les cordons de la bourse. Étrangement, cette tendance ne se retrouve pas à l’extérieur, où les postes de finances sont rarement confiés aux employées. Idem pour les postes scientifiques. Malgré les salaires élevés, les femmes ne s’épanouissent pas forcément dans le domaine des sciences. Mercedes Erra, fondatrice de BETC, une agence de publicité française évoque la «  bro culture « . Cet environnement de travail essentiellement occupé par des codes masculins. Quand bien même les femmes excellent dans les matières scientifiques, l’environnement ne favorise pas leur épanouissement.

En dehors du travail, les femmes jonglent avec plusieurs rôles et différentes actions. Une vie de famille les attend une fois à la maison, les tâches domestiques leur reviennent souvent. Happées par d’autres obligations, il leur est difficile de se focaliser uniquement sur sa carrière.  » Les femmes ne lâchent pas un domaine pour s’investir sur un autre plan, elles attaquent tout de front « , renchérit Mercedes Erra, provoquant les applaudissement du public. 

Anne-Christelle Perochon a souvent à faire à des investisseurs masculins, qui ne tenaient pas compte du fait qu’elle soit une femme. Son application BIM géolocalise les tables disponibles en temps réel à Paris.  » Les investisseurs étaient parfois étonnés de ne pas me voir développer un produit destiné aux femmes, pour autant, une fois le premier contact établi, ils voient qu’ils ont une personne sérieuse et motivée en face d’eux, qu’importe le genre. « , témoigne-t-elle. 

L’éducation autrement

Les écarts de salaires ne surgissent pas d’un coup, dès lors qu’une femme se retrouve sur le marché du travail. Un long processus se met en place, «  dès 14-15 ans « , note Mercedes Erra. L’adolescente se bride, n’ose plus formuler ses rêves, revoit ses ambitions à la baisse. Pour Nathalie Rozborski, CEO de NellyRodi, une agence de prospection, le processus est bien plus long, s’étendant de la naissance jusqu’à 18 ans. Les différents mondes (la mode et la publicité en priorité) proposent des projections de la femme, des fantasmes irréalisables. La femme-enfant, la diva, la putain se partagent les représentations (toujours érotisées) des femmes. Les stéréotypes sont déjà en place lorsque les filles grandissent. Par la suite, il est difficile d’intervenir dans la répartition des tâches souvent inégales à l’intérieur des foyers. 

Poussées à être parfaites durant leur éducation, les filles ne parlent pas d’argent. «  Elles se posent trop de questions, se disent qu’elles ne savent pas le faire. Les mecs n’ont pas ce réflexe, ils y vont ! On doit prendre les devants. « , intervient Sabrina Herlory Rouget. Directrice générale de MAC Cosmetics, elle a remarqué que les femmes font passer beaucoup de choses avant l’argent. 

 

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