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COP28 | Les énergies propres perturbent le secteur pétrolier, mais la neutralité carbone est-elle possible ?

Un demi-siècle après le premier choc pétrolier de 1973, la COP28, qui débutera jeudi, se penchera sur la question des objectifs mondiaux en matière de climat. La United States Energy Association s’est intéressée à ce scénario et est parvenue à des conclusions très diverses sur le chemin parcouru et sur la possibilité de parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2050.

 

Les Émirats arabes unis (EAU), riches en pétrole, s’apprêtent à accueillir la conférence mondiale sur le climat à Dubaï. Les Émirats arabes unis et l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) entendent s’appuyer sur les fondements que sont le solaire, l’éolien, l’hydroélectricité, la géothermie et les systèmes de stockage d’énergie par batteries (SSEB).

« L’énergie éolienne, l’énergie solaire, les batteries, les véhicules électriques et les pompes à chaleur ont atteint ou dépassé leur point d’inflexion. Ils sont désormais en concurrence sur le plan des coûts et de la valeur finale sur le marché », a déclaré Markham Hislop, éditeur d’Energi Media, lors d’un forum. « Nous nous attendons à une croissance exponentielle dans l’adoption de ces technologies, même si les pays construiront à des rythmes différents. »

Il ajoute que la Chine sera le moteur de la transition énergétique au cours des 30 prochaines années, en particulier dans les économies en développement. Par exemple, 130 pays ont participé au troisième forum de l’initiative chinoise « la Ceinture et la Route » (Belt and Road Initiative) en 2023, afin de s’informer sur les investissements chinois dans les infrastructures mondiales et de les obtenir.

Qu’entend-on par « zéro émission nette » et est-ce que cela équivaut à l’élimination des combustibles fossiles ? Le concept de « zéro émission nette » consiste à éliminer de l’atmosphère autant de carbone que nous en émettons. Les forêts tropicales, par exemple, absorbent le CO2.

L’objectif de l’accord de Paris est de limiter la hausse des températures à 1,5 degré Celsius d’ici le milieu du siècle par rapport aux niveaux préindustriels, afin d’atténuer les effets des sécheresses, des inondations et des pénuries d’eau et de nourriture. Les scientifiques affirment que nous approchons de la barre des 1,2 degrés et que nous sommes en passe d’atteindre les 2,7 degrés. Avant l’accord de Paris, la tendance était de 4 degrés Celsius.

La question est maintenant de savoir si les pays émergents s’appuieront davantage sur les ressources énergétiques renouvelables ou sur le charbon, le pétrole et le gaz naturel pour alimenter leurs économies. Quelles sont les sources les plus abordables et les plus accessibles ?

 

Les sociétés peuvent-elles s’adapter à une nouvelle économie énergétique ?

L’année dernière, le monde a ajouté un record de 300 gigawatts d’énergies renouvelables. Selon l’IRENA, l’énergie verte représente 40 % de la capacité totale installée dans le monde. Cependant, les taux de croissance doivent rapidement augmenter si l’on veut que l’accord de Paris soit un succès. Il faut savoir que nous émettons chaque année 35 milliards de tonnes de CO2 à partir des combustibles fossiles et l’équivalent de 5 milliards de tonnes de CO2 à cause de la déforestation.

« Les modèles climatiques montrent que ce sont les émissions cumulées de carbone qui sont corrélées et qui entraînent les hausses de température », explique David Greely, économiste en chef chez Abaxx Exchange. Le problème est donc principalement le rythme auquel nous avons brûlé les combustibles fossiles et déboisé les terres à des fins agricoles.

« Nous devons atteindre la neutralité carbone si nous voulons que les températures se stabilisent aux niveaux actuels », ajoute-t-il. « À présent, notre capacité à éliminer le carbone de l’atmosphère est très limitée par rapport à la quantité que nous y introduisons. Pour atteindre la neutralité carbone, il faut réduire radicalement l’utilisation des combustibles fossiles et la déforestation. Nous parlons de pic pétrolier. Nous n’avons pas encore atteint le pic de charbon au niveau mondial.

« Nous vivons dans un système énergétique construit sur 150 ans qui dépend de combustibles fossiles fiables et bon marché, et nous devons nous en détacher très rapidement », conclut M. Greely. « Il s’agit là d’un problème d’une complexité stupéfiante. Lorsque les gens doivent choisir entre une énergie abordable et fiable et des objectifs climatiques, ils reviennent à une énergie abordable et fiable. Personne ne veut voir son économie s’effondrer. »

Quelle est la part de l’hésitation par rapport aux implications pratiques de changements sociétaux significatifs ? Le ministère américain de l’énergie indique que le réseau pourrait devoir s’étendre de 60 % d’ici à 2030 et tripler d’ici à 2050 pour répondre à la demande d’énergie propre. Melanie Kenderdine, de l’Energy Future Initiative, a expliqué au public qu’il faudrait 360 000 pylônes pour construire le réseau de transmission à longue distance, ce qui nécessite de l’acier, de l’aluminium et du cuivre, des matières premières très demandées.

À l’échelle internationale, la tâche est encore plus ardue. Branko Terzic explique que l’engouement pour les véhicules électriques dépend du revenu disponible et de l’accès à l’électricité.

Cependant, les revenus augmentent. Au cours de la dernière décennie, 900 millions de personnes sont entrées dans la classe moyenne. La Chine compte autant de voitures que les États-Unis, même si ce n’est pas par habitant. À titre de comparaison, l’Inde compte 50 véhicules pour 1 000 habitants.

« Les pays développés peuvent passer à l’électrique. Mais ceux en développement, qui n’ont pas un grand accès à l’électricité, continueront d’utiliser de l’essence », explique M. Terzic, directeur général du Berkeley Research Group.

 

Les services publics peuvent-ils alimenter l’avenir ?

La COP28 se penchera sur les domaines dans lesquels les pays ne parviennent pas à réduire leurs émissions et sur ce qu’ils peuvent faire pour y remédier. Francesco La Camera, directeur général de l’IRENA, reconnaît que la communauté mondiale doit rattraper son retard, car les infrastructures énergétiques existantes favorisent la production de pétrole, de gaz et de charbon, au lieu de tendre à la neutralité carbone.

Pourtant, 80 % de la capacité installée de production d’électricité provient des énergies renouvelables au cours des quatre dernières années, en raison de la chute des prix. Cependant, l’augmentation de la taille et de l’échelle de ces efforts nécessite un financement pour le climat et une politique publique saine. Cela signifie qu’il faut inciter les entreprises de services publics à réaliser de tels investissements et motiver les pays riches à payer les pays du Sud pour qu’ils conservent leurs forêts tropicales.

Selon l’IRENA, l’écologisation du monde nécessitera 5 700 milliards de dollars (5 200 milliards d’euros) et créera 85 millions d’emplois d’ici à 2030. En revanche, l’industrie pétrolière et gazière représente 9,8 millions d’emplois, soit 5,6 % de l’emploi total aux États-Unis, selon PwC.

Si les compagnies d’électricité et de gaz relèvent le défi, elles prospéreront et donneront l’exemple à d’autres secteurs. Aux États-Unis, Ameren, American Electric Power, CenterPoint Energy, ConEdison, Duke Energy et National Grid figurent parmi les services publics qui se sont fixé des objectifs de consommation zéro émission nette. Au niveau international, Iberdrola (Espagne), Électricité de France (France) et Enel (Italie) donnent le ton.

« L’industrie du pétrole et du gaz est déjà perturbée », déclare Markham Hislop d’Energi. « Les petites entreprises ne peuvent pas obtenir de capitaux, ou les coûts sont excessifs. Les politiques climatiques les étranglent et on assiste à de nombreuses pertes d’emplois », ce qui les oblige à maintenir le statu quo et à repousser les défis politiques.

Prenons l’exemple de l’industrie de la presse, qui a atteint son apogée en 2005, au moment même où Google et Facebook étaient sur le point de décimer leurs modèles d’entreprise. De même, l’industrie pétrolière pourrait bientôt atteindre son apogée, selon le dirigeant des médias. « Les technologies d’énergie propre sont compétitives et perturbent déjà les marchés. Et c’est cette tendance que nous devons envisager pour l’avenir. »

En effet, c’est ce que les Émirats arabes unis prévoient – se détacher du pétrole – et c’est pourquoi leur stratégie à long terme consiste à continuer à investir dans les énergies vertes. Le changement arrive, mais à un rythme plus lent que nécessaire.

 

Article traduit de Forbes US – Auteur : Ken Silverstein

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