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Négociations entre partenaires sociaux : le CDI Senior et le Cetu ne font pas l’unanimité

Entreprise | Alors que les syndicats et le patronat doivent accoucher d’un accord d’ici la fin du mois sur un  « nouveau pacte de la vie au travail », les négociations patinent, chacun campant sur ses positions. 

 

Il est rare de voir les syndicats et le patronat sur la même longueur d’onde. Cette fois-ci, on ne déroge pas à la règle alors que les partenaires sociaux doivent accoucher d’ici la fin du mois d’un « nouveau pacte de la vie au travail », comme promis par Emmanuel Macron, en guise de consolation au sortir du douloureux épisode sur la réforme des retraites. Au menu de ces discussions entamées en janvier : emploi des seniors, usure professionnelle, reconversion ainsi que le mise en place d’un Compte épargne temps universel (Cetu).

Si les négociations débouchent sur des accords interprofessionnels, l’exécutif s’est engagé à les retranscrire dans un projet de loi, à condition que cela n’entraîne pas de hausse de la dépense publique. Mais pour le moment, on n’en est pas encore là. Deux principaux points de blocage persistent. D’un côté, une mesure farouchement défendue par le patronat et honnie par les syndicats : le « CDI senior ». De l’autre, un dispositif voulu par la CFDT et le gouvernement, mis à l’agenda des négociations, mais inaudible pour les représentants patronaux : le fameux Cetu.

 

Un CDI senior pour répondre au déficit d’attractivité de l’emploi des personnes âgées ? 

Dans le cadre de ces discussions, les partenaires sociaux sont invités à apporter des réponses à la question du taux d’emploi des seniors (60-64 ans). En 2022, celui-ci s’est établi à 36,2%,  un niveau largement en deçà de certains voisins européens comme l’Allemagne par exemple (63%). Le gouvernement a pour objectif d’atteindre les 65% à l’horizon 2030. Si le report de deux ans de l’âge légal de départ à la retraite va mécaniquement faire augmenter ce taux, cela restera insuffisant. 

Pour le patronat, le constat est simple : l’emploi des seniors bénéficie d’un déficit d’attractivité aux yeux des employeurs. Quoi de mieux que de recycler le CDI senior, une mesure qui a un temps été portée par la majorité de droite au Sénat durant la réforme des retraites avant d’être retoquée par le Conseil constitutionnel, car considérée comme un cavalier législatif (disposition introduite par amendement dans un texte de loi qui n’a aucun lien direct ou indirect avec le sujet initial) ? 

A l’issue de la séance de discussion entre partenaires sociaux, le jeudi 15 février, Hubert Mongon, représentant du Medef, expliquait que l’idée soutenue par son mouvement cherchait à « éviter la case désinsertion professionnelle » pour les demandeurs d’emploi en fin de carrière. Pour autant, ce dispositif présente de nombreux intérêts pour l’employeur. Ce dernier pourrait ainsi rompre la relation de travail dès l’obtention des conditions de retraite à taux plein de son collaborateur alors qu’actuellement, il est interdit de contraindre un salarié à quitter son poste avant ses 70 ans. Si le senior retrouve un poste moins bien rémunéré par rapport à la précédente activité, le différentiel de salaire serait pris, en partie, en charge par l’assurance-chômage.

La CPME propose un mécanisme qui se dit « plus ambitieux ». Pour l’organisme, le contrat doit être assorti d’une réduction des charges patronales, qui s’élèvent entre 25% et 42% du salaire brut en fonction de la rémunération. La mesure d’allègement serait financée par une réduction de la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi les plus âgés. Ces derniers touchent actuellement une allocation plus longtemps que les autres. 

Ce CDI senior a été rejeté par l’ensemble des syndicats. « On est convaincu que ce n’est pas l’enjeu de cette négociation », balayait Olivier Guivarch, secrétaire national de la CFDT après l’annonce du patronat. « Un nouveau contrat ne résout en rien l’accès et le maintien en emploi des seniors, renchérissait Nathalie Bazire, secrétaire confédérale de la CGT. C’est une fausse bonne idée pour traiter l’enjeu de l’emploi des travailleurs expérimentés. » Les partenaires sociaux estiment que ce nouveau contrat se tromperait de cible. Selon eux, il ne s’agit pas de faire revenir les seniors au chômage sur le marché du travail mais de les y maintenir, en les formant davantage ou en aménageant leur fin de carrière.

 

Une mesure made in CFDT

Autre sujet de discorde, le compte épargne temps universel. Et cette fois, la mécanique est inversée. Le Medef et la CPME s’opposent farouchement à la création de ce dispositif, véritable bébé de la CFDT. « Ce dispositif vise à offrir à tous les travailleurs l’accès à un compte alimenté par l’argent non versé de leurs journées de congé et RTT non pris, explique Isabelle Mercier, secrétaire nationale de la CFDT dans La Croix. Quand ils le souhaitent, ils pourraient utiliser ces droits pour mettre en pause leur emploi et faire autre chose : du bénévolat, ou voyager, s’occuper d’un parent, d’un enfant, se former…». Soit une extension de l’actuel compte épargne temps (CET), pour le moment réservé à une minorité de salariés, le plus souvent au sein des grandes entreprises ou de la fonction publique rapportent les syndicats. 

 Grande nouveauté, ce dispositif « ouvert à tous peu importe le statut : salariés en CDI, en CDD, intérimaires, fonctionnaires, indépendants », serait transférable d’une entreprise à l’autre. Il serait géré par un organisme paritaire externe, « à l’image de l’Agirc-Arrco pour les retraites complémentaires », poursuit Isabelle Mercier. 

L’engouement n’est pour le moment pas partagé par tous au sein des partenaires sociaux. Si la CFTC se dit « fortement intéressée » par l’outil, FO appelle à un meilleur encadrement pour éviter que cela n’aboutisse à des arbitrages avec des employés qui choisiraient de ne plus prendre des jours de repos ou RTT. La CFE-CGC plaide quant à elle pour un CET pour tous, non transférable. Du côté du patronat, seul l’Union des entreprises de proximité ne s’est pas montrée fermée au projet. Reste que le temps est désormais compté, la fin des négociations se rapprochant à pas-de-géant.

 


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