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Les tendances 2022 de la gestion des talents

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L’enchaînement des vagues de la pandémie a transformé un test mondial brutal de travail à distance en nouveaux ancrages comportementaux durables. Alors que les plateformes digitales fluidifient, comme jamais auparavant, la compétition des talents, ces derniers se retrouvent en position de force dans de nombreux secteurs dans lesquels l’innovation crée la valeur ajoutée et différencie les acteurs. Les compétences et expertises apparaissent déterminantes et de plus en plus pointues, appelées en tant que de besoin par un projet, une situation rencontrée par l’organisation. La mise en réseau des organisations elles-mêmes, et aussi de leur écosystème s’accélère significativement.

 

Comme le révèle le baromètre Aneo Holaspirit de l’Entreprise Nouvelle Génération, dans ce contexte ultra volatile et imprévisible, les dirigeants reconnaissent devoir améliorer leurs capacités en gestion de crise et plus des deux tiers des entreprises souhaitent investir pour augmenter leur résilience. Une sorte de symétrie des chocs de conscience cristallise chez les employés une profonde remise en cause du sens et un besoin de souplesse, désormais non négociable. Selon KPMG, pour 81% des dirigeants mondiaux, la pandémie a renforcé leur attention sur la composante sociale des programmes ESG. Mckinsey indique que faute de souplesse dans les conditions de travail, 25% des salariés considèreront un changement d’employeur.

Le recrutement et la fidélisation des talents s’imposent aujourd’hui comme une condition première de survie ou de croissance des organisations. Nous dégageons dans cet article les 8 tendances majeures de 2022 qui aideront les leaders à ajuster leur politique de gestion des talents et à transformer les craintes actuelles en opportunités.

 

Les 8 tendances 2022 du recrutement et de la fidélisation des talents : 

 

1- Développer les aptitudes et les compétences clefs

La culture de l’apprentissage continu, permanent, s’impose et prend forme dans une mobilité interne renforcée ou des carrières agiles au sein d’écosystèmes qui reconnaissent et évaluent les talents.
Pour Alain d’Iribarne, la notion de compétence seule est dépassée ; nous passons des compétences pour tous aux talents pour tous. Dans cette acception, le sociologue ne se focalise pas sur le talent qui désigne habituellement une frange marginale des travailleurs, par exemple issus des grandes écoles. Il s’intéresse au talent comme mobilisation de ses compétences pour les mettre en relation avec d’autres dans le cadre d’une coopération ; autrement dit cette “mutualisation des savoirs vers un paradigme de la créativité et de l’innovation”. Cette coopération au sein et au-delà d’une organisation donnée s’appuie fondamentalement sur un modèle d’empathie et de bienveillance.

Le pivot autour des talents et des compétences plutôt que des entités business, des fonctions ou des zones géographiques s’opère dans les organisations. Les modèles Spotify ou OCTO Technology déploient des réseaux d’équipes sous forme de tribus et de leagues pour les expertises et de guildes sectorielles pour la commercialisation. L’entreprise devient un réseau de talents et d’apprentissage continu où l’émulation et la reconnaissance se jouent sur le fond – compétences, expertises, réalisations – et des publications qui nourrissent les écosystèmes internes et le marché, assurant par là même de nouvelles opportunités commerciales.
Dans ce nouveau paradigme, les recrutements s’appuieront toujours plus sur les critères hors diplômes. La gestion interne des talents investira de façon croissante la requalification et la montée en compétences des salariés.

 

2- Évoluer vers les gouvernances partagées et l’impact

Comme nous l’avons montré dans les conclusions du livre “L’Entreprise Nouvelle Génération”, il existe un lien consubstantiel grandissant entre le type de management pratiqué et l’impact de l’organisation considérée. Autrement dit, un management distribuant l’autorité, et promouvant l’autonomie, la responsabilité, la transparence et la confiance, ne se satisfera pas très longtemps d’une raison d’être non contributive aux fractures sociales ou environnementales de notre monde. De même, comment une mission à impact fort pourrait-elle être soutenue dans la durée par un management archaïque ?
Les deux tendances se rejoignent et se nourrissent mutuellement. Les gouvernances évoluent partout sous l’influence de la révolution industrielle de l’Internet vers plus d’agilité à l’échelle, en s’inspirant des méthodes scrum, lean startup et du self-management. Les hiérarchies persistent mais s’aplatissent et se structurent autour de réseaux d’équipes, de réseaux de projets. Les organisations deviennent plus fluides. Les acteurs de première ligne, au contact de l’extérieur, gagnent en responsabilité et en autonomie. Les processus de décision deviennent progressivement plus participatifs et efficaces en impliquant toutes les personnes concernées par une proposition qui pourra ainsi être validée ou améliorée par consentement intégratif – qui prend en compte les objections – par exemple.

Sur la dimension d’impact, selon KPMG, “64 % des dirigeants considèrent la raison d’être de l’entreprise comme l’axe central de leur stratégie. Elle doit infuser toutes les actions de l’entreprise pour créer de la valeur de long terme pour les clients, les collaborateurs, les investisseurs et la société. Seuls 13 % des dirigeants interrogés font du retour sur investissement pour l’actionnaire leur principal objectif. Pour la majorité des dirigeants, servir les actionnaires est désormais indissociable d’un impact positif sur la planète et la société”.

Très intéressant également, les dirigeants des gazelles, ces entreprises de forte croissance connues pour créer massivement de l’emploi, considèrent à 52% qu’il existe un lien entre leurs programmes ESG et l’amélioration de leur performance financière. Pour autant, “le chiffre tombe à 37 % dans l’échantillon total, tandis que 24 % associent les programmes ESG avec une réduction potentielle de leur performance financière”.
Les trois quart des travailleurs privilégient désormais des entreprises à la mission claire et à impact, et ce sur tous les continents. Même si une courte majorité privilégie encore le salaire sur ce critère, les deux composantes tendent progressivement à s’équilibrer.

Une large majorité de dirigeants considèrent la décarbonation de l’économie via des collaborations public-privé permettant de distribuer l’effort et les contributions. Près de 80% “estiment que les mesures gouvernementales sont nécessaires pour accélérer l’investissement des entreprises et atteindre leurs objectifs de neutralité carbone”.

La composante sociale des programmes ESG monte fortement en puissance sous l’effet de la pandémie pour 81% des dirigeants mondiaux, et les attentes des salariés ont elles aussi fait un bond en avant. 71% des dirigeants “ont conscience d’être tenus personnellement responsables des progrès dans ce domaine”.

 

3- Endiguer la grande vague des démissions

Recherche de sens clair au terme de sa journée de travail, d’impact social et environnemental, d’un management qui permet la collaboration et l’expression, d’outils numériques à l’état de l’art mondial : les attentes fondamentales des collaborateurs sont multiples et exacerbées par une crise sanitaire qui agit comme un révélateur face aux impossibilités artificielles passées. Les jeunes générations aspirent également à faire tomber tous les masques. Pourquoi ne pas télétravailler plus de deux jours par semaine, voire jusqu’à 95% si cela est possible et revoir drastiquement ses lieux d’habitation et de travail ? Pourquoi mettre une chemise, un costume, un tailleur ou une cravate ? Pourquoi continuer à travailler pour des clients qui font du green washing ?

Une récente enquête de Korn Ferry souligne que 55 % des professionnels pensent que le taux d’attrition des employés augmentera en 2022 et 31 % de ces derniers disent qu’ils quitteraient leur emploi même s’ils n’en avaient pas d’autre en vue.

Ces résultats inédits, confirmés par d’autres, invitent les organisations à développer urgemment une culture d’écoute et d’engagement des collaborateurs dans les processus de décision.

 

4- Soutenir les collaborateurs

La généralisation du travail à distance a fait émerger une meilleure compréhension et prise de conscience des individus sur le sujet de leur bien-être. Korn Ferry nous rappelle que le poids économique des travailleurs malades représente 10 à 15 % de la production économique mondiale. En grande majorité, les salariés attendent des entreprises qu’elles agissent de façon plus humaine, qu’elles rompent les relations d’adulte à enfant entre les managers ou leaders et leurs équipes pour généraliser la relation d’adulte à adulte. Le travail représente une activité personnelle pour la plupart des personnes. Il requiert un niveau de respect et de soutien important.
Comment manager ou façonner une culture d’entreprise sans adhérer pleinement à ces principes de base ?
Cette évolution nécessite, pour reprendre l’expression du BCG, “le passage de la standardisation de masse à l’unicité de masse”. L’explosion de la complexité du cahier des charges managérial requiert donc désormais et plus que jamais des aptitudes particulières au leadership.
L’engagement prend une position centrale dans les organisations et se nourrit de confiance, une confiance donnée a priori. Alors comment expliquer le chiffre de 78% des entreprises* qui utiliseraient des logiciels pour mesurer la productivité de leurs employés ?
On se souvient notamment d’un rétropédalage en règle de Microsoft sur son score de productivité intégré initialement au sein de sa suite 365.

*Etude de Korn Ferry

 

5- S’engager avec sincérité sur les critères ESG

L’insatisfaction relative à l’insuffisance des plans d’action environnementaux en entreprise connaît un pic. Les pressions s’exercent via les employés d’une part et les États et grands donneurs d’ordre de l’autre. Les batailles sociales et environnementales doivent désormais atterrir dans le monde réel. L’exemple du bilan carbone et du plan d’action associé révèle un fossé grandissant entre les entreprises qui capteront dans le futur les marchés intégrant cette dimension par défaut et celles qui perdront ces marchés clés pour leur croissance. Selon PwC, “les talents sont attirés par les marques “vertes”, leurs valeurs et leur culture”. “65 % des personnes dans le monde souhaitent travailler pour une organisation dotée d’une forte conscience sociale”.

 

6- Travailler avec les meilleurs outils digitaux

Après une trentaine d’années d’entropie, la révolution industrielle de l’Internet poursuit désormais sa marche productive. L’internet des objets couplé aux robots et à des algorithmes d’intelligence artificielle permet désormais d’automatiser des pans entiers des processus industriels ou logistiques par exemple. La capacité des travailleurs à maîtriser les outils digitaux de pointe constitue non seulement un facteur clef d’employabilité mais aussi une motivation et une source d’engagement. L’évaluation d’un talent passe désormais de celle d’une productivité individuelle – ou de la contribution à une productivité collective – à celle de l’orchestration hybride de compétences humaines et de technologies.

 

7- Réduire l’insécurité de l’emploi

Cette montée en puissance de l’automatisation des machines connectées fait craindre la disparition de nombreux emplois. Selon PwC, 48% des salariés actuels pensent que les formes d’emplois que nous connaissons n’existeront plus dans le futur et que nous vendrons nos compétences à court terme à ceux qui en auront besoin. Le reste des interrogés pense que les formes d’emploi stables et de long terme seront l’apanage d’une faible minorité de personnes. 61% pensent que leur gouvernement devrait les aider à protéger les emplois et cette proportion est encore supérieure chez les 18-34 ans (66%). Enfin, toujours selon PwC, 39% pensent que leur emploi sera obsolète dans les cinq ans.

 

8- Fluidifier ses activités avec les plateformes et places de marché

Enfin, 2022 devrait marquer l’accélération des plateformes et places de marché permettant une fluidité optimale dans la rencontre de l’offre et de la demande.
Des places de marché nouvelle génération telles que Catalant, Toptal, InnoCentive, Kaggle et Upwork proposent des talents de haut niveau. HBR révèle que “leur nombre a considérablement augmenté depuis 2009, passant d’environ 80 à plus de 330. Aujourd’hui, presque toutes les entreprises du classement Fortune 500 en utilisent une ou plusieurs”.

Et de poursuivre “90 % des dirigeants que nous avons interrogés, tant au niveau de la direction que de la première ligne, estiment que ces plateformes seront essentielles pour leur compétitivité à l’avenir”. Un nombre croissant d’indépendants considèrent cette forme de travail comme un choix de carrière long terme.

Les grands groupes attirent traditionnellement des profils qui recherchent un haut niveau de rémunération, la sécurité de l’emploi et un statut. Mais le mouvement de fonds des talents semble nettement s’orienter vers des organisations de plus petite taille organisées en réseau, en écosystème adaptatif et agile. La reconnaissance et l’évaluation par le marché, une employabilité optimisée en permanence, constituent les nouveaux critères de ces indépendants libres et architectes de leur propre parcours. Selon PwC, “46 % des professionnels des RH s’attendent à ce qu’au moins 20 % de leurs effectifs soient constitués de contractants ou de travailleurs temporaires d’ici 2022.”
Chaque indépendant développera finement sa marque personnelle, son “classement” ou sa catégorie d’expertise ainsi que sa capacité à acquérir de nouvelles compétences dès qu’elles apparaissent sur le marché ou qu’elles sont certifiées par un groupement professionnel. La réputation des organisations autant que des individus déterminera pour beaucoup leur capacité d’attraction et leur tarif. Elle s’articulera autour de références qualitatives et de notes quantitatives. Et tandis que les RH seront progressivement amenées à négocier un nombre croissant de contrats avec des compétences externes, les partenariats projets entre différentes entreprises deviendront la norme.
Selon KPMG, “plus de 50% des dirigeants dans le monde identifient les coentreprises, les fusions-acquisitions et les alliances stratégiques comme les principales stratégies de croissance”. Par ailleurs, preuve de l’émergence durable des petites structures expertes, “40% des dirigeants internationaux se projettent dans une stratégie d’alliance avec les start-ups innovantes”.

 

Comme nous venons de le voir, 2022 ne devrait pas ressembler à une année de transition mais bien à celle d’une transformation accélérée des organisations vers l’Entreprise Nouvelle Génération.

 

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