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Le danger des étudiants en entreprise

La nécessité des entreprises à innover et former, expose l’entreprise au risque de perte d’informations stratégiques. Etudiants espions, mythe ou réalité ? Comment se protéger ? Quels sont les risques d’accueillir un étudiant au sein de son entreprise, et comment s’organiser pour limiter ces risques ?

 

Septembre a sonné et des centaines de milliers d’étudiants sont rentrés dans des entreprises, pour effectuer leur cursus en alternance. Toutes formations confondues (Ecoles de commerce, Ecoles d’ingénieurs, IUT, BTS…) la France est passée de 275.527 contrats signés en 2013, à plus de 700.000 en 2021. Parmi eux, 62 % des contrats d’apprentissages signés le sont pour préparer un diplôme ou titre du supérieur. (Source l’Etudiant 07 février 2022)

Si ce système réussi aussi bien aux étudiants qu’aux entreprises, il présente néanmoins, de nombreux risques pour beaucoup d’entre elles.

 

Pourquoi la formation en alternance représente un risque ?

Tout simplement car l’entreprise, l’étudiant et l’établissement sont généralement trois maillons faibles importants.

 

  • L’étudiant :

Avec toute sa bonne volonté n’a pas conscience des informations auxquelles il a accès. 

– Informations stratégiques :

Décideurs, agendas, organigramme, stratégie, R&D, commercial, politique salariale, ambiance de travail, appels d’offres, capacité de production, marges, fournisseurs…D’ailleurs, une des premières chose demandée à l’étudiant, est la réalisation d’une cartographie de l’entreprise, au travers d’une matrice SWOT (Forces Faiblesses en interne et Opportunités Menaces en externe). En d’autres termes l’étudiant identifie les faiblesses (majeures) de l’entreprise. Ce style d’information est cruciale pour toute entreprise qui désire prendre le dessus sur son concurrent.  Il ne reste plus qu’à appuyer sur les faiblesses, en mettant en place par exemple un plan d’actions, RH, commercial, financier… sur l’entreprise.  

Informatique : l’étudiant dispose des codes d’accès à distance, code wifi, accès aux serveurs de l’entreprise…

Sécurité/sûreté : on lui communique, clés, code alarme, caisse, badges, horaires d’ouvertures et fermetures…

En général, avant la fin de de son contrat avec l’entreprise, l’étudiant postule ou est démarché par d’autres entreprises, soucieuses de s’accaparer des connaissances sur l’entreprise, son savoir-faire ainsi que ses projets, pour les devancer.

L’étudiant peut représenter une proie facile pour une entreprise concurrente ou un gouvernement étranger. Nous avons été étudiants, et connaissons entre autre le besoin d’argent, ainsi que la nécessité de trouver un emploi rapidement.

 

  • L’établissement :

Il est dans une logique pédagogique et commerciale. « Placer » ses étudiants dans les entreprises, former et évaluer les compétences acquises, font partie de ses missions principales. 

L’Intelligence Economique est pour lui une notion plus théorique que pratico-pratique. Il l’assimile ou le réduit souvent  à de la veille. Quand l’Intelligence Economique est dispensée, ceux sont des professeurs ou bien des intervenants en marketing, en Economie, en Droit qui s’en occupent. A vrai dire pour l’avoir vécu, comme l’établissement ne sait pas trop de quoi il s’agit, mais qu’il faut le faire, personne ne veut s’en occuper. Les interventions sont donc dénuées de sens, et très théoriques, alors que c’est un élément transversal et concret au sein de l’entreprise, fondamental pour sa survie ou son développement.

Combien de rapports de stages, mémoires, thèses sont soutenues chaque année ? Combien l’ont été depuis les dix dernières années ? Au moment de rendre son travail, un volume important de rapports s’entassent sur les bureaux des établissements. Un condensé d’informations sur les faiblesses des entreprises, leur stratégie, technologie, brevets à venir, une quantité de chiffres, tableaux et d’annexes riches pour qui sait les exploiter ! 

A l’heure de la concurrence entre Universités, Ecoles d’Ingénieurs, ou de Commerce, il serait temps de faire de l’Intelligence Économique un argument commercial différenciant et rassurant. 

 

  • L’entreprise :

Grand groupe ou PME, elle est la plupart du temps inconsciente des risques, et trop souvent « étanche » à la notion d’Intelligence Economique.

    • Elle sous estime le risque de perte d’informations lié à l’arrivée de l’étudiant.  (Voir ci-dessus)
    • Elle sous estime les conséquences liées à cette perte d’information stratégique :
      • perte de l’avantage concurrentiel
      • perte de marchés
      • perte de chiffre d’affaires
      • perte de clients 
      • perte d’image éventuelle
      • possible perte de confiance de partenaires 

 

Cinq solutions à mettre en place rapidement.

 

Si le risque zéro n’existe pas, il est impératif pour toutes les entreprises, quelles que soient leurs tailles, de mettre en place des éléments, leur permettant de ne pas être déstabilisée, lors du départ d’un étudiant.

1 – Mettre en place une politique d’intégration des stagiaires et étudiants en alternance au sein de l’entreprise. (Règlement intérieur, charte de bonne conduite, convention …).

2 – Sensibiliser les salariés y compris étudiants et stagiaires aux problématiques d‘Intelligence Economique. Des conférenciers « Eucles » ont été formés par les services de l’Etat dans cet objectif. 

3 – Nommer un tuteur, impliqué et sensibilisé à l’information stratégique, au sein de l’entreprise.

4 – Relire le dossier avant qu’il soit transmis à l’établissement, pour enlever toute information sensible que les concurrents n’ont pas à savoir.

5 – Surveiller que les ex apprentis et alternants ne travaillent pas pour vos concurrents par la suite.

 

Une actualité riche d’exemples 

 

La justice, au travers de l’article L1227-1 est précise en la matière. « Le fait pour un directeur ou un salarié de révéler ou de tenter de révéler un secret de fabrication est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 euros.

La juridiction peut également prononcer, à titre de peine complémentaire, pour une durée de cinq ans au plus, l’interdiction des droits civiques, civils et de famille prévue par l’article 131-26 du code pénal. »

 

L’affaire la plus connue en la matière, est sûrement celle de l’étudiante chinoise Lili.

« Lili, jeune femme âgée de 22 ans, avait décroché en 2005 un stage à la direction Recherche & développement de l’équipementier automobile Valeo. Elle y est interpellée et incarcérée car elle a copié une quarantaine de fichiers sans rapport avec son stage. Face au tribunal qui la condamnera à un an de prison, dont dix mois avec sursis, pour abus de confiance, Huang Lili s’excusera de n’avoir pas prêté attention à l’engagement de confidentialité présenté au début de son stage : « Je l’ai lu vite sans faire attention. » Elle avait également ignoré les mises en garde du personnel de Valeo qui la voyait toujours avec son portable équipé d’un disque dur de 40 gigas. »

En 2011, c’est la PME française Converteam (travaillant entre autre pour l’armée française), qui voit 2 étudiants voler ses secrets industriels. 

« Entre avril 2018 et septembre 2021, une thésarde a passé plusieurs nuits dans des laboratoires sensibles à Metz et Strasbourg, permettant à un de ses compatriotes d’y pénétrer. La DGSI s’inquiète des nombreuses vulnérabilités des établissements de recherche français. » 

En 2022, sous le nom de « Viktor Muller Ferreira », cet agent russe a réussi à se faire embaucher comme stagiaire à la Cour pénale internationale. Il aurait eu accès aux enquêtes de la CPI sur le conflit en Ukraine. (voir lien ci-dessous)

 

 

Le problème ne réside pas dans la mise à disposition de la connaissance à l’étudiant(e), mais d’avoir conscience du risque que cette masse d’information représente si elle part. Il en va du capital informationnel de l’entreprise. A ce titre, l’entreprise peut également estampiller certains documents avec la mention « Confidentiel ».

Le plus gros travail est donc de sensibiliser les patrons, étudiants et établissements à l’Intelligence Economique. Il est ensuite nécessaire d’être capable d’identifier, s’il y a bien eu fuite d’information profitant à un de ses concurrents.  

Les risques sont nombreux et les parades également. Pensez bien que sur les bancs de l’école, les langues se délient, les présentations sur les entreprises sont nombreuses (et devant tous les autres étudiants de la classe), et pour l’avoir vécu, des camarades de classe sont parfois concurrents dans le monde de l’entreprise ! Les étudiants créent leur profil Linkedin, est sont des proies faciles pour des concurrents qui voudraient acquérir l’ensemble des connaissances au sein de votre entreprise.

Qui souhaite former des étudiants qui vont partir à la concurrence ?

 


Liens complémentaires : 

https://etudiant.lefigaro.fr/international/actu/detail/article/la-campagne-choc-du-fbi-pour-dissuader-les-etudiants-de-devenir-des-espions-4922/

https://www.huffingtonpost.fr/international/article/un-espion-russe-a-infiltre-la-cpi-en-se-faisant-passer-pour-un-etudiant-bresilien_197426.html

 

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