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Julia Pallé, Formule E : « La pollution de l’air liée aux voitures thermiques tuent l’équivalent de la ville de New York chaque année »

Julia Pallé. Crédits :DR

Le sport automobile peut-il (vraiment) devenir éco responsable ? Forbes a échangé, à l’occasion de la journée de la Terre, avec Julia Pallé, directrice du développement durable de la Formule E. 

 

Forbes France : Faire courir des voitures électriques, est-ce le seul moyen d’avoir un sport automobile vertueux ?

Julia Pallé : C’est effectivement l’une des solution, en tous cas celle a qui a le plus d’impact. Techniquement, les voitures électriques sont plus performantes que les voitures thermiques avec un rendement (rapport entre l’énergie fournie, et l’énergie mécanique restituée, ndlr) à hauteur de 90% pour l’électrique contre 45% en moyenne pour le thermique. Non content d’être la technologie la plus performante, c’est aussi la technologie la plus respectueuse de l’environnement car sur le cycle de vie d’un BEV – un véhicule électrique à batterie – si l’énergie qui l’alimente est de source renouvelable, elle émet entre 50% à 80% d’émissions de CO2 en moins. Enfin, on ne peut pas occulter le fait que les véhicules électriques améliorent la qualité de notre air. Evidemment, elles n’émettent aucune émission de pots d’échappement. Il faut savoir que ces émissions sont responsables de la majorité des polluants présents dans l’air, ils sont aussi la cause principale de la pollution de l’air dans nos villes et tuent l’équivalent de la population de la ville de New York chaque année, soit 9 millions de personnes.

 
Pourrait-on à terme voir des voitures électriques ailleurs ? en rallye par exemple ? 
 
J.P. : Tout à fait, car la technologie notamment celle des batteries est de plus en plus performante comme en témoigne notre voiture de troisième génération – la GEN3 – qui va au-delà des 320km/h. D’autres séries en sport automobile adoptent l’électrique, c’est le cas en rallye en effet. À noter également l’Extreme E qui démontre avec ses courses de SUV électriques dans des zones d’ores-et-déjà impactées par le changement climatique que ces véhicules peuvent proposer une alternative plus écologique alors que ces modèles sont les plus émetteurs de CO2 mais aussi les plus demandés par les consommateurs et les plus profitables pour les constructeurs. 
 
 
Quelles sont les initiatives éco responsables mises en place par la FE ? Et avez-vous pu en évaluer les résultats ? 
 
J.P. : Nous sommes Net Zero Carbone depuis la création du championnat en 2014 et le premier sport au monde à avoir atteint cet objectif en 2020. Nous sommes fiers de célébrer nos 10 ans de Net Zero cette année. Nous sommes aussi le premier sport à être aligné sur les « SBT », les Science Based Targets, avec des objectifs validés chaque année depuis 2021 et nous sommes par ailleurs en avance sur nos objectifs de réduction de 5% de CO2 par an avec 23% à ce jour. Nous travaillons essentiellement sur l’utilisation d’énergie renouvelable pour nos voitures et nos évènements ainsi qu’une logistique la plus ecoresponsable possible avec notamment une approche régionale de notre calendrier, c’est à dire que nous privilégions l’utilisation du fret maritime ou l’utilisation de bio fuels par rapport à l’avion.
 
 
Êtes-vous satisfaits du spectacle rendu par les voitures électriques ? comment l’améliorer ? 
 
J.P. : Nous sommes le sport automobile dont la croissance en termes d’audience est la plus rapide de toutes les disciplines. C’est dû en partie à l’imprévisibilité de nos courses et aux rivalités sur la piste, ce qui les rendent passionnantes. Le fait d’être un sport jeune, nous permet aussi d’être flexible. Nous avons travaillé et travaillons encore pour faire évoluer le format sportif. Ce fût le cas avec l’introduction de l’ATTACK MODE qui permet d’apporter un surplus de puissance temporaire à utiliser de manière stratégique par les équipes favorisant ainsi les dépassements, l’action en piste et au final un spectacle attrayant pour tous les fans. 
 
 
Comment expliquer encore ce déficit de notoriété à l’heure où les questions écologiques sont sur toutes les lèvres ? le public du sport auto est-il mûr ? 
 
J.P. : Nous sommes un jeune sport qui a dû créer son public sur un concept totalement innovant. Après 10 ans d’existence seulement, nous avons une croissance bien plus rapide que tous les autres sports automobile. Notre force est que nous attirons des fans au-delà du sport automobile, des fans de sport en général qui sont intéressés par notre côté innovant, par les technologies utilisées dans le championnat et les questions liées au développement durable.
 
 
La formule E pourrait-elle séduire un public qui a priori ne s’intéresse pas au sport auto, mais s’intéresse aux questions écologiques ? 
 
J.P. : C’est déjà le cas. Parmi les profils de nos spectateurs, il y a notamment une frange de gens, âgés entre 30 et 40 ans qui sont parfois parents, qui s’inquiètent pour l’avenir de leurs enfants et se tournent vers un sport durable avec des valeurs environnementales qui leurs ressemblent. Il y a aussi un segment de très jeunes fans avec 20 ans de moyenne d’âge, parmi lequel les femmes sont grandement représentées et qui sont très touchées par l’impact social que nous créons.
 
 
Un événement sportif est-il une bonne entrée vers la sensibilisation aux questions environnementales ? 
 
J.P. : Le sport est un moyen d’inspirer les gens. Ce n’est pas un hasard si les Nations unies ont choisi en 2018 le sport et la mode comme deux secteurs clefs pour inspirer les gens vers un style de vie plus durable non pas en raison de leur impact mais de leur capacité à toucher des millions de spectateurs via leur medium. Notre sport, non seulement permet de développer et transférer des technologies innovantes dans les véhicules que nous conduirons demain, mais aussi permet d’inspirer les gens à adopter un mode de vie plus durable en adoptant la mobilité éclectique.
 
 
Comment les innovations sportives sont-elles transférées vers l’automobile « civil » ? 
 
J.P. : Le Championnat du Monde ABB FIA Formula E est un laboratoire. Il offre une plateforme aux constructeurs pour tester les innovations les plus pertinentes dans le cadre de la course afin qu’ils puissent les transférer aux voitures de série de demain. Le groupe Stellantis affirme que l’innovation déployée dans le cade du Championnat a un cycle de 4 ans pour pouvoir être commercialisée, ce qui est un cycle très court pour commercialiser des technologies de pointe. Jaguar a aussi pu optimiser les softwares de ses SUV IPACE permettant d’apporter 10% d’energie supplémentaire à ses batteries, tout cela grâce aux innovations développées en Formule E.
 
 
Quels sont les objectifs à venir pour vous ? 
 
J.P. : Le premier est de maintenir notre statut Net Zero en lien avec les objectifs de réduction de nos SBTs  (Science Based Targets) c’est-à-dire de réduire de moitié nos émissions de CO2 d’ici à 2030 par rapport à 2019. Ensuite, maximiser notre impact social notamment grâce à des projets comme FIA Girls On Track qui va impacter cette année 2 500 jeunes filles issues des villes-hôtes qui accueillent nos courses et qui vise à leur faire découvrir les opportunités professionnelles qu’offre le sport automobile électrique. Enfin, nous souhaitons montrer l’exemple et continuer d’être un standard international en matière d’éco-responsabilité démontrant que l’on peut faire du sport automobile au niveau de compétitivité le plus élevé tout en étant le plus responsable possible
 
 

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