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Elon Musk a envisagé de lancer son propre réseau social

Elon MuskLe PDG de Tesla, Elon Musk, lors du Met Gala 2022, le 2 mai 2022 à New York. | Source : Getty Images

Avant de se concentrer sur le rachat de Twitter, le PDG de Tesla, Elon Musk, a envisagé de lancer son propre réseau social.

 

Dès le départ, Elon Musk a souhaité racheter Twitter, et pas seulement siéger au sein de son conseil d’administration ou rester un actionnaire important, certes, mais silencieux. Cependant, avant de se concentrer sur le rachat du réseau social, le milliardaire a envisagé de lancer un service concurrent avant d’abandonner ce projet, selon de nouveaux détails sur la proposition de rachat mentionnés dans un document déposé auprès de la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis.

Ce document, à savoir une déclaration de procuration émanant du conseil d’administration de Twitter et invitant les actionnaires à approuver le rachat du réseau social par Elon Musk, fait toute la lumière sur la quête initiale du milliardaire : Elon Musk voulait vraiment racheter Twitter ! Et il y réfléchissait depuis bien longtemps. Comme beaucoup d’autres informations dans ce dossier, les révélations de cette procuration ne font que compliquer un peu plus la situation, Elon Musk ayant mis sur pause le rachat de Twitter. Le milliardaire affirme que l’accord est annulé à moins que le réseau social ne puisse prouver ses déclarations concernant les spams et les « bots » (au sens de comptes automatisés). De son côté, Twitter insiste sur le fait que l’accord doit se poursuivre au prix convenu de 54,20 dollars par action.

Qu’apprend-on d’autre dans cette procuration déposée à la SEC ? Après avoir commencé à accumuler ce qui serait une participation de plus de 9 % dans la société, Elon Musk a rencontré le PDG de Twitter, Parag Agrawal, et le président du conseil d’administration, Bret Taylor, le 27 mars. Le milliardaire leur a affirmé qu’il avait récolté une importante participation dans la société. Il a ensuite ajouté qu’il réfléchissait à un certain nombre d’options pour la suite des évènements : lancer un service concurrent, rejoindre le conseil d’administration de Twitter ou racheter purement et simplement le réseau social. Elon Musk a rapidement abandonné l’idée d’une application concurrente, et il ne voulait pas non plus entrer au conseil d’administration. Il a accepté un poste de directeur, puis l’a refusé quelques jours plus tard en informant Twitter qu’il avait l’intention de racheter la société.

Jusqu’à présent, l’on ignore exactement à quel moment Elon Musk a décidé de procéder au rachat non sollicité de Twitter. Cependant, la procuration indique clairement depuis combien de temps il y réfléchit. De son côté, Twitter n’a laissé filtrer quasiment aucune information sur les plans d’Elon Musk. Dans une déclaration publique sur le milliardaire et son siège au sein du conseil d’administration de Twitter, Parag Agrawal a mis en garde les employés et les actionnaires contre les « distractions à venir ». Toutefois, le message ne fait aucune mention du fait qu’Elon Musk avait déjà informé le PDG de Twitter, ainsi que le conseil d’administration, de son intention de racheter la société. En interne, néanmoins, le spectre d’un rachat par Elon Musk a accaparé l’attention du conseil d’administration et semble avoir été un facteur déterminant dans la manière dont ce même conseil a traité avec le milliardaire depuis le début, notamment en lui offrant un siège au sein du conseil et en essayant de limiter la quantité d’actions Twitter que le milliardaire pouvait continuer à acheter.

La procuration nous apprend également qu’Elon Musk et le cofondateur de Twitter, Jack Dorsey, ont été de proches confidents tout au long de cette affaire. Ils sont amis, et non, il ne s’agit pas d’une exagération charmante. La procuration montre bien la proximité entre les deux hommes. À la page 43, concernant une réunion du conseil d’administration de Twitter du 3 avril, l’on peut lire : « Mr Dorsey a informé le conseil d’administration de Twitter que Mr Musk et lui étaient amis ». Leur relation a été une source de complication pour Twitter tout au long de ce processus, Jack Dorsey ayant publiquement plaidé pour qu’Elon Musk privatise Twitter et critiqué le conseil d’administration (dont il fait toujours partie). Il s’avère que Jack Dorsey a été la première personne qu’Elon Musk a contactée au sujet de Twitter (le 26 mars) et, lors d’une autre conversation, le milliardaire a demandé au cofondateur du réseau social de revenir sur son intention de quitter le conseil d’administration en mai. Jack Dorsey a refusé et, parallèlement, a affirmé à Elon Musk que Twitter serait mieux en tant que société privée. Quatre jours plus tard, Elon Musk a informé le conseil d’administration de son intention de privatiser Twitter.

En résumé, Elon Musk et Jack Dorsey sont amis et leur amitié est, au moins en partie, à l’origine de l’intérêt du milliardaire pour Twitter.

La procuration contient également d’autres précieuses informations :

  • Elon Musk a réussi sa vérification des antécédents. Quelques légères spéculations sur Internet semblaient indiquer qu’il y aurait un problème lors des vérifications effectuées par Twitter, alors que la société pensait que le milliardaire allait rejoindre son conseil d’administration.
  • Twitter n’a pas investi beaucoup d’efforts pour se trouver un « chevalier blanc ». Le 14 avril, un jour après qu’Elon Musk a révélé publiquement son intention de racheter Twitter, le conseil d’administration de la société a rencontré ses banquiers de Goldman Sachs et a décidé de ne pas poursuivre les « alternatives stratégiques » à une vente. En d’autres termes, le conseil d’administration n’a pas cherché à « trouver un autre acheteur avec lequel nous pourrons vivre plus facilement. » Pourquoi Twitter n’a-t-il pas formellement sollicité d’autres offres ? Au sujet des perspectives commerciales de Twitter, les banquiers et le conseil d’administration ont conclu : « Il est peu probable que d’autres parties aient l’intérêt ou la capacité de racheter Twitter ». Autrement dit, personne d’autre qu’Elon Musk ne serait prêt à racheter Twitter à l’heure actuelle.
  • Au moment où l’offre d’Elon Musk s’est présentée, Twitter savait déjà que les objectifs fixés ne seraient pas atteints, à savoir porter le chiffre d’affaires à 7,5 milliards de dollars d’ici 2023. Selon des projections internes, la société devrait atteindre les 7,2 milliards de chiffre d’affaires, ce qui représenterait une croissance substantielle par rapport aux 5,1 milliards de dollars de chiffre d’affaires de 2021. Twitter prévoit que son chiffre d’affaires atteindra 10 milliards de dollars en 2025 et 12,9 milliards de dollars en 2027. Elon Musk aurait présenté des objectifs bien plus ambitieux aux co-investisseurs potentiels. Selon le New York Times, le milliardaire pense pouvoir porter le chiffre d’affaires de Twitter à 28 milliards de dollars d’ici 2028, dont 12 milliards de dollars en publicités et 10 milliards de dollars en abonnements. À l’heure actuelle, le chiffre d’affaires de Twitter provient presque exclusivement de la publicité.
  • La procuration contient une section « Recommandation du conseil d’administration de Twitter et raisons de la fusion ». Dans cette section, le conseil d’administration énumère les raisons pour lesquelles il pense que les actionnaires devraient approuver l’opération, comme les difficultés rencontrées par Twitter dans le passé pour accroître simultanément le nombre d’utilisateurs et le chiffre d’affaires, la conclusion des banquiers selon laquelle 54,20 dollars par action est un bon prix, l’absence d’intérêt de la part d’autres acheteurs et la probabilité raisonnable de réalisation de l’opération.

Il est amusant de voir que l’expression « probabilité raisonnable de réalisation de l’opération » est écrite étant donné que l’accord semble bien moins susceptible d’être réalisé aujourd’hui (du moins à 54,20 dollars par action).

Quelques heures avant que Twitter ne publie ce document mardi matin (le 17 mai), Elon Musk a déclaré que l’accord ne pouvait être conclu tant que la société ne lui apporterait pas la preuve que moins de 5 % des comptes sur le réseau social sont des spams. Le milliardaire a fait de la lutte contre les spams l’un de ses sujets de conversation préférés et, vendredi 13 mai, il a déclaré qu’il suspendait l’opération jusqu’à ce qu’il ait analysé plus en détail les estimations de la société concernant les spams.

Au cours d’une conférence sur les technologies lundi 16 mai, Elon Musk a déclaré qu’il pensait que le taux de faux comptes sur Twitter pouvait atteindre 20 %. De son côté, Parag Agrawal a publié sur Twitter un long message décrivant les actions du réseau social contre les bots et a réaffirmé que le taux était inférieur à 5 %. Elon Musk a répondu à ce tweet avec un emoji caca.

Oui, Elon Musk, le milliardaire qui pense à racheter ou à concurrencer Twitter depuis longtemps, est peut-être en train de faire marche arrière. Il semble utiliser les bots comme prétexte pour se retirer de l’accord, bien qu’il serait redevable d’une indemnité de rupture d’un milliard de dollars si les deux parties acceptent d’annuler l’opération, ou comme prétexte pour forcer Twitter à renégocier le prix de 54,20 dollars par action.

Twitter pourrait choisir une tout autre option et poursuivre Elon Musk devant les tribunaux pour l’obliger à respecter l’accord qu’il a signé avec le conseil d’administration pour racheter la société. Si le conseil d’administration considérait que 54,20 dollars par action était une bonne affaire en avril, cet accord est bien plus intéressant en mai avec la chute des prix des actions du secteur des réseaux sociaux. Dans un communiqué de presse, Twitter a déclaré s’engager à « réaliser la transaction au prix et aux conditions convenus aussi rapidement que possible. »

Les investisseurs de Twitter ne sont pas emballés par cette situation. L’action de la société a encore reculé de 0,6 % dans les premiers échanges mardi 17 mai, après avoir chuté de près de 7 % lundi 16 mai. L’écart croissant entre le cours de l’action et l’offre d’Elon Musk indique que les investisseurs craignent de plus en plus que l’accord tombe à l’eau.

Tout cela est assez ironique. Il y a quelques semaines, Elon Musk voulait vraiment que cette transaction aboutisse, contrairement à Twitter. Aujourd’hui, le milliardaire est quelque peu frileux et semble moins impliqué, tandis que Twitter veut vraiment finaliser ce rachat, et la procuration en explique la raison : « Si la fusion n’est pas réalisée, et en fonction des circonstances de cette non-fusion, le prix de nos actions ordinaires peut baisser de manière significative ».

 

Article traduit de Forbes US – Auteur : Abram Brown

<<< À lie également : Elon Musk suspend la procédure de rachat de Twitter >>>

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