En novembre dernier, le groupe RATP annonçait le rachat de Mappy. Ses équipes ont alors rejoint celles de la filiale RATP Smart Systems. Un seul objectif : développer, main dans la main, un compagnon digital du quotidien, permettant à chacune et chacun de choisir le moyen de transport qui correspond à ses besoins (le plus rapide, le plus durable…) ; de réserver ce moyen de transport ; et de le payer, ceci sur une seule et même application. Pour en savoir plus, nous avons posé quelques questions à Eric Alix, président de RATP Smart Systems, et à Florence Leveel, directrice générale de Mappy.

 

Où en est le projet de combinaison de vos services respectifs, au sein d’une même application ?

Eric Alix : Les services digitaux RATP et Mappy ont des audiences importantes, avec 8 millions de visiteurs mensuels uniques sur le site et l’application RATP et 12 millions mensuels du côté du site et de l’application Mappy. En unissant nos expertises et la connaissance fine de nos secteurs respectifs, c’est-à-dire le routier et les transports en commun, nous allons créer ensemble le compagnon du quotidien de millions de voyageurs. Nous allons transformer le paysage de la multimodalité. A ce stade, nous cherchons à enrichir mutuellement nos solutions digitales, tout en gardant leurs spécificités. Un seul objectif : toujours mieux répondre aux attentes de nos clients.

 

Les deux applications distinctes vont-elles perdurer ?

EA : Oui, nous aurons toujours deux applications distinctes ! Seuls les algorithmes et les traitements de data seront communs afin de mutualiser la gestion de la cartographie, des itinéraires, de l’information voyageurs, de la réservation et du paiement du titre de transport. Cette mutualisation nous permettra de présenter toute l’offre de transports des app Mappy et RATP à l’ensemble de nos utilisateurs.

Florence Leveel : En effet, le rôle de ces applications est de fournir un comparateur multimodal intégrant un certain nombre de partenaires de transport, qu’on appelle des « mobility service providers ». Comme le disait Eric, l’expertise de Mappy vient de la cartographie, notamment car nous avons nos propres algorithmes routiers. De son côté, le groupe RATP et RATP Smart Systems ont une connaissance plus précise sur les transports en commun et la billettique mobile. Nous avons combiné toutes nos expertises dans une plateforme commune pour être plus forts ensembles, avoir des algorithmes, des savoir-faire et des propositions qui soient les meilleurs possibles sur l’ensemble de nos univers. Néanmoins, chacun garde sa propre marque et ses propres services.
Mappy s’adresse d’abord aux automobilistes pour leur offrir, demain, de développer des trajets intermodaux où ils laisseront leurs véhicules en périphérie des villes et emprunteront d’autres modes de transports sur le dernier kilomètre. De son côté, l’application RATP va se concentrer sur les transports en commun et déployer des options avec d’autres partenaires de mobilité douce, comme le vélo en libre-service ou la trottinette. Nous avons une logique de modules complémentaires : nous mettons en commun nos expertises, et ensuite chacun a vocation à travailler son audience, avec les propositions de valeur qui lui sont propres.

 

Ces évolutions sont-elles favorisées par la loi d’orientation des mobilités, promulguées fin 2019 ? 

EA : La Loi d’Orientation des Mobilités fixe le cadre de l’ouverture du marché du MaaS (Mobility as a Service). D’un côté, elle oblige l’ensemble des acteurs à ouvrir leurs données, et d’un autre, elle incite les acteurs à ouvrir la distribution des titres de mobilité. Ce sont des conditions nécessaires pour pouvoir agréger l’offre et la présenter à des audiences importantes. Cette loi vient également positionner l’Autorité Organisatrice de Mobilité, sur l’ensemble des mobilités de son territoire et non plus uniquement sur les transports en commun : la voiture, les mobilités douces, les VTC, les transports en commun… Le challenge est donc de gérer au mieux cette mobilité en prenant en compte les enjeux sociétaux comme la congestion du trafic routier ou les économies de CO2.
La gestion de l’espace public est également en train d’évoluer, puisque les villes ont une politique de mobilité qui s’étoffe de plus en plus. Demain, chacun pourra prendre une décision de mobilité en ayant toute l’information accessible dans son smartphone, depuis une unique application. Pour schématiser, vous pourrez vous rendre au bureau en prenant votre voiture jusqu’à un parking, et finir à pied. Vous pourrez aussi prendre votre voiture, vous rendre jusqu’à une station et finir votre trajet en transports en commun. Ou prendre votre vélo parce qu’il fait beau, ou encore prendre les transports, et finir en trottinette. L’ensemble des mobilités s’enchaînent, ce qui est d’autant plus facile si vous avez toute l’information dans une unique application, et si vous pouvez réserver et payer dans celle-ci. Le MaaS permet de créer des parcours complètement fluides. L’enjeu de RATP Smart Systems et Mappy est donc de construire cette application qui vous accompagnera dans l’entièreté de votre mobilité.

 

Quelles sont les nouvelles fonctionnalités qui seront prochainement mises en service ?

EA : L’application ratp.fr a changé de nom pour devenir « Bonjour RATP », elle utilise désormais la cartographie de Mappy et s’enrichira de près de 150 000 points d’intérêts. Il sera également possible de réserver et payer directement sur l’application son VTC Marcel et son Vélib’. Dès la rentrée, les trottinettes Tier rejoindront également l’application, tendant un peu plus vers le MaaS.

FL : Du côté de l’application Mappy, il y a aussi du mouvement ! Depuis mi-juin, un moteur d’itinéraires vélo & trottinette propose 2 choix aux utilisateurs : l’itinéraire le plus direct et l’itinéraire empruntant le plus de pistes cyclables. Les utilisateurs pourront également visualiser le pourcentage de dénivelé. Ce nouveau moteur s’applique à tout l’hexagone et les pistes cyclables seront mises à jour tous les mois. Au courant de l’été, notre GPS sera enrichi avec les modes piéton, vélo et trottinette. Ce GPS permettra un trajet de bout en bout, une première en France !

Est-ce que le mouvement du MaaS va créer plus de cohérence entre les différents acteurs ?

EA : Les applications MaaS agrègent l’offre et la demande. Du côté de la demande, il s’agit d’avoir l’expérience client la plus aboutie possible en incluant toutes les mobilités. Chez RATP Smart Systems, nous savons déjà combiner tous ces trajets, nous devons désormais passer des contrats avec un ensemble d’acteurs, dans le cadre des politiques de mobilité définies par les autorités. À travers toutes ces négociations, nous développerons un écosystème plus abouti.

FL : L’enjeu du MaaS est de fluidifier les mobilités sur un territoire, de casser les silos. Nous avons encore trop de spécialisations des acteurs par mode de transports ce qui créé une situation de congestion des infrastructures. Afin de fluidifier les déplacements sur un territoire donné, il est donc impératif de mieux combiner ces différents modes de transport, de fournir une bonne information aux voyageurs et d’articuler les algorithmes. Le bénéfice sera pour les utilisateurs mais aussi pour la société, avec la réduction des émissions carbone. Dans les applications de MaaS, il y a des acteurs privés et des acteurs publics qui travaillent ensemble pour optimiser et fluidifier les trajets sur un territoire donné. Et en venant de la voiture et des transports en commun, RATP Smart Systems et Mappy sont parfaitement placés pour travailler sur ces sujets !