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Voitures Électriques : Leur Avenir Selon Carlos Ghosn

Carlos ghosnCalvin Sit/Bloomberg via Getty Images

Souvent surnommé « le cost killer » pour avoir transformé deux marques de voitures mal en point en une seule rentable, Carlos Ghosn a réussi à se forger un vrai nom dans le secteur de l’industrie automobile.

Actuellement, l’industrie automobile connaît un changement de paradigme avec la montée en puissance du marché électrique mondial, ainsi que le large potentiel offert par de nouveaux secteurs innovants comme celui des véhicules autonomes. Malgré le défi du maintien de compétitivité et de rentabilité dans un environnement en constante évolution, l’homme de 64 ans né au Brésil pense que les marques qu’il dirige sont déjà en pole position et ont bien l’intention d’y rester.

Carlos Ghosn avait déjà repris Renault en main lorsqu’il a rejoint l’entreprise en 1996. Trois ans plus tard, il entreprenait d’aider le japonais Nissan à renaître de ses cendres, à l’aide d’une alliance stratégique avec la marque française. Au lieu d’une fusion traditionnelle, les deux entreprises ont préféré conserver leur identité respective en se rachetant mutuellement des parts. De cette manière, leur intérêt commun permet d’alimenter leur collaboration de manière efficace.

En 2016, Nissan achète 34 % des parts de son confrère Mitsubishi, affaibli par un scandale de fraude sur les performances énergétiques de ses véhicules. Mais au lieu d’un rachat classique, le PDG de Mitsubishi, Osamu Masuko a pu conserver son poste, et son entreprise est devenue partenaire à part entière du groupe pour former l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, avec Carlos Ghosn à la manœuvre, en tant que PDG.

Grâce à la forte présence de Mitsubishi sur les marchés asiatiques en développement, surtout en Asie du Sud-Est, le groupe a pu surpasser Volkswagen au rang de premier constructeur automobile mondial en 2017, avec un total de ventes de 10,61 millions de véhicules.

Les fusions ratées

De passage à Hong Kong la semaine dernière, Carlos Ghosn affirmait que l’alliance se portait à merveille : « Nous n’avons pas rejoint toutes les fusions ratées de l’industrie automobile. Chacun a su trouver sa place ». Mais il a rapidement minimiser son rôle dans la réussite de ce regroupement.

« Ce n’est pas une seule personne qui fait tout le travail. C’est un travail d’équipe. Tout le monde est en place, tout le monde à un moment ou un autre apporte une valeur ajoutée ou du soutien. Alors aujourd’hui, j’ai une grande expérience dans le secteur, j’ai mené de nombreuses transformations, je peux donc soutenir tous les dirigeants qui sont prêts à écouter mes conseils. »

Et maintenant, petit à petit, il délègue ses responsabilités à d’autres membres de l’alliance capables de les assumer : « Ils seront évalués sur leurs résultats : la profitabilité, la croissance, l’adoption de technologies ».

Et la technologie, surtout celle des véhicules électriques, c’est précisément ce sur quoi l’alliance se concentre actuellement : « Nous sommes aujourd’hui le plus gros vendeurs de véhicules électriques dans le monde. C’est nous qui vendons le plus de voitures en Europe, le plus de voitures électriques au Japon, et nous sommes sur le point de redevenir le plus gros vendeur aux États-Unis, tout simplement parce que nous sommes les premiers à nous être lancés sur ce segment ».

L’an dernier, le groupe a vendu près de 500 000 véhicules électriques dans le monde et il prévoit d’introduire douze nouveaux modèles sur le marché, d’ici 2022.

Focus sur la Chine

Mais Carlos Ghosn a reconnu que le principal véhicule électrique du groupe destiné à la Chine, la Nissan Leaf, s’est avéré trop cher pour le plus gros marché de voitures électriques au monde : « Toutes les voitures électriques chinoises sont plus qu’abordables. Le prix de vente de la Leaf n’est pas adapté à ce marché ».

« Alors nous planchons sur le Kwid, qui est beaucoup moins cher », ajoute-il en faisant référence au projet de crossover développé avec un partenaire chinois, Dongfeng Motor Group. « Cela dit, je pense que nous conservons une longueur d’avance concernant les véhicules électriques grâce à notre expérience. Nous avons déjà vendu près d’un demi-million de voitures électriques et nous allons sortir douze nouveaux modèles dans les cinq années à venir. En ce qui concerne la Chine, le nombre de voitures importe peu, il faut juste se trouver sur le bon segment. À mon avis, le Kwid aura un potentiel de vente bien plus élevé que tous les autres véhicules que nous proposerons sur ce marché ».

Lorsque la question de l’autre facette des véhicules électrique est abordée, c’est-à-dire, les marques comme Tesla, Carlos Ghosn plaisante sur le fait que les médias préfèrent parler des voitures haut de gamme : « C’est une niche importante, mais une niche quand même. Et les autres, les 90 millions de voitures vendues, c’est la voiture de monsieur et madame tout le monde. Même si les gens parlent de voitures à 80 000 ou 100 000 $, cela ne représente qu’une toute petite part du secteur ». Il a d’ailleurs ajouté que la plupart de clients, y compris la Chine, ne sont pas si intéressés par la technologie : « ils sont plus attachés à la fonctionnalité et au prix. Le gouvernement chinois pousse à l’adoption de véhicules électriques, en forçant les constructeurs automobiles à rendre les voitures électriques plus abordables et à y intégrer davantage de fonctionnalités ».

L’avenir du transport

Nissan en particulier, se situe à la pointe de la technologie avant-gardiste, surtout pour les voitures autonomes. Un peu plus tôt cette année, le constructeur a annoncé son intention de lancer son propre service de taxis autonomes, des robotaxis autonomes, à Tokyo, en rivalisant ainsi avec des entreprises comme Uber, dans un espace entièrement neuf : « Nous fournirons un service de voitures autonomes pour certaines entreprises, mais nous gérerons les robotaxis nous-même dans certains secteurs. Ce n’est pas de la concurrence directe, mais ça peut l’être dans certaines villes ».

Il déclare également que l’alliance discute avec un certain nombre de villes souhaitant travailler avec elle pour organiser le « transport du futur » : zéro émission et des voitures autonomes. « Ils nous disent « et si vous nous disiez quel genre d’infrastructures vous avez besoin dans la ville pour que vos voitures autonomes puissent fonctionner ? ». C’est quelque chose que seuls les constructeurs de véhicules peuvent faire. Les entreprises comme Uber ne peuvent pas. Ils ne disposent pas des technologies automobiles nécessaires pour s’adapter aux besoins spécifiques ».

À cause de nombreuses entreprises technologiques comme Google et Alibaba qui investissent beaucoup d’argent dans la conduite autonome, on a demandé à Carlos Ghosn si ces sociétés pouvaient devenir des entreprises automobiles et si elles représentaient une menace : « Je ne pense pas. Elles ne peuvent pas car ce n’est pas leur objectif, et ce pour une simple et bonne raison : les bénéfices et le retour sur investissement de l’industrie automobile ne correspondent pas à ce qu’elles connaissent dans leur secteur d’activité. Pourquoi demander à quelqu’un de se diversifier alors qu’il va gagner moins d’argent que s’il se contente de travailler dans son domaine ? Ce qu’elles veulent, c’est développer leur affaires pour le secteur automobile : la navigation, les technologies, les services de mobilité ».

Mais Carlos Ghosn a prévenu que l’industrie automobile n’était pas près de commercialiser des voitures autonomes, pas avant 2022 ou 2023 : « Nous pouvons faire rouler une voiture autonome sans problème sur un circuit, mais de là à la commercialiser sur le marché de masse en toute sécurité, il faudra encore attendre quelques années ».

Cependant, il reconnaît que les entreprises incitent à la production de véhicules autonomes : « Amazon, Alibaba, Uber, pourquoi cette technologie les intéresse? C’est très simple. Le conducteur, c’est leur plus gros poste de dépense. On peut faire un calcul rapide, pour une voiture circulant sans interruption durant un mois : la facture d’électricité tourne autour de 250 $, le loyer de la voiture autour de 300 $, et trois conducteurs pour assurer la conduite en trois huit, ce qui vous coûtera 15 000 $ par mois. Donc si on se débarrasse des conducteurs, ça baisse le prix d’environ 90 %. Voilà pourquoi Uber et les autres veulent être les premiers à bénéficier de cette technologie, pour ne pas se faire écraser par leurs concurrents ».

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