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Meta et OpenAI se lancent dans la course à la superintelligence grand public

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Intelligence artificielle. Source : Getty Images

Peu utilisée jusqu’ici, l’idée de « superintelligence grand public » gagne en visibilité, portée par la récente note de service de Mark Zuckerberg. Dans un secteur en pleine effervescence, où les milliards affluent et les talents s’arrachent, la course à la superintelligence prend une nouvelle tournure. Mais malgré l’enthousiasme, sa définition précise, notamment dans un cadre grand public, demeure incertaine.

 

Décrypter la superintelligence grand public

La superintelligence, souvent définie comme une intelligence artificielle surpassant celle des humains, reste un concept encore largement théorique. Le philosophe Nick Bostrom, auteur de Superintelligence: Paths, Dangers, Strategies et fondateur du Future of Humanity Institute, la décrit comme des « cerveaux artificiels plus intelligents que les cerveaux humains en termes d’intelligence générale ».

Cependant, dans le débat public, cette notion est souvent cantonnée aux enjeux liés aux entreprises et aux risques de destruction d’emplois. Or, un autre pan se dessine : celui de la superintelligence appliquée au grand public, dont l’objectif est de répondre aux besoins concrets des consommateurs — qu’il s’agisse de productivité, de divertissement ou de vie sociale. Deux entreprises s’imposent déjà comme les chefs de file de cette nouvelle frontière : OpenAI et Meta.


 

OpenAI, l’entreprise d’IA grand public… par accident

Ben Thompson, analyste technologique et fondateur de Stratechery, qualifie OpenAI d’« entreprise technologique grand public accidentelle ». Dans sa newsletter du 23 juin 2025, il estime que « ChatGPT a conquis le marché de l’IA grand public et semble plus en mesure de renforcer sa domination que d’être détrôné ».

OpenAI ne se limite plus à une simple interface de chat ou à des API. Avec l’acquisition de la start-up io de Jony Ive, qui conçoit des produits matériels boostés à l’IA, l’entreprise se positionne pour jouer un rôle central à la fois dans les logiciels et dans le hardware. Une stratégie qui pourrait lui permettre de dominer l’écosystème de la superintelligence à venir.

Dès ses débuts, la mission d’OpenAI était claire : développer une intelligence artificielle générale (AGI), un concept encore flou, souvent associé à la superintelligence. Si l’entreprise atteint cet objectif, il y a fort à parier qu’elle s’appuiera sur ses produits phares, comme ChatGPT ou Operator, pour en faire profiter le grand public.

 

Les grandes ambitions de Meta pour la superintelligence

Meta ne cache plus ses ambitions dans la course à la superintelligence. L’entreprise a adopté une stratégie offensive, à la fois sur le plan du recrutement et des investissements. En juin, elle a notamment fait sensation en recrutant Alexandr Wang, fondateur et PDG de Scale AI, tout en attirant à prix d’or des talents de premier plan en intelligence artificielle issus d’OpenAI, de Google et d’autres poids lourds du secteur. Selon le Wall Street Journal, certaines de ces recrues ont reçu des offres dépassant les 100 millions de dollars.

Lors de la présentation de ses résultats pour le deuxième trimestre 2025, Meta a indiqué que ses investissements dans l’IA resteront à un niveau élevé en 2026, affirmant qu’elle cherchait activement à augmenter ses capacités pour soutenir ses efforts dans l’intelligence artificielle. Une note interne récente va plus loin : la vision de Meta est d’apporter la superintelligence personnelle à chacun.

Pour Om Malik, entrepreneur et analyste tech, le véritable produit de Meta n’est ni un réseau social ni un casque de réalité virtuelle, mais plutôt la captation de l’attention et des relations humaines. Autrement dit, ce que Meta cherche à maîtriser, c’est notre attention, nos liens sociaux et la manière dont nous interagissons avec le monde numérique.

Même si Meta n’a pas encore dévoilé de produits ou de fonctionnalités spécifiques fondés sur la superintelligence, la direction semble claire. Il s’agira de solutions capables de capter l’attention, de nourrir des liens émotionnels, voire d’agir comme des substituts relationnels.

Meta parle ainsi d’aider les utilisateurs à atteindre leurs objectifs, à créer le monde qu’ils souhaitent voir, à vivre toutes sortes d’aventures, à devenir un meilleur ami ou une meilleure version d’eux-mêmes. Concrètement, cela pourrait passer par des amis artificiels sur Instagram générant du contenu hyper-personnalisé pendant des heures, ou des assistants sociaux capables de planifier votre vie quotidienne en s’appuyant sur une connaissance poussée de vos préférences, de vos interactions, de vos achats et de vos habitudes de déplacement.

 

Les prémices d’un écosystème de superintelligence grand public

OpenAI et Meta ne se contentent pas de tracer leur propre route dans la course à la superintelligence : elles posent aussi les bases d’un véritable écosystème, capable d’alimenter toute une génération d’innovations destinées au grand public.

OpenAI, en particulier, joue déjà un rôle central dans l’écosystème tech. Ses API sont massivement utilisées par des start-ups B2B et B2C, et il est probable que, si elle maintient son modèle économique actuel, ces jeunes pousses pourront s’appuyer sur ses futurs modèles superintelligents pour concevoir leurs propres produits destinés au grand public.

Meta, de son côté, reste plus opaque. Il est encore trop tôt pour savoir si la firme ouvrira l’accès à ses futurs modèles de superintelligence. Ses modèles Llama sont pour l’instant open source, mais cela ne semble pas être la voie privilégiée pour la diffusion de sa superintelligence. Au vu de ses ambitions affichées, il est probable que Meta garde cette technologie pour renforcer l’attractivité et la rétention sur ses propres plateformes.

 

Vers de nouvelles alliances stratégiques

À mesure que la superintelligence grand public se précise, les partenariats technologiques de demain commencent à se dessiner. Apple pourrait par exemple approfondir sa collaboration avec OpenAI pour concevoir une maison connectée dopée à la superintelligence, capable de rivaliser avec ce que Google est en mesure de proposer.

Avec son expertise en matière d’appareils connectés – de la Google Watch à Google Home – et son rôle historique dans le développement de l’intelligence artificielle, Google dispose de sérieux atouts pour s’imposer dans cette nouvelle ère, malgré une perte de vitesse récente. Les objets intelligents pourraient ainsi devenir véritablement « super intelligents » en s’intégrant dans un écosystème domestique connecté à l’Internet des objets et propulsé par des modèles de superintelligence.

Mais au-delà des ambitions technologiques de Meta, d’OpenAI ou d’autres géants, le véritable enjeu résidera dans l’adoption par le grand public. Ce sont les usages réels qui dicteront le rythme : la croissance, les revenus, mais aussi la pertinence des produits développés.

Selon une étude de NextMSC, le marché de l’IA grand public pourrait atteindre 674,49 milliards de dollars d’ici 2030. Les entreprises capables de s’imposer dans ce domaine ne se contenteront pas de lancer des produits : elles redéfiniront nos usages numériques, créeront de nouvelles catégories, de nouveaux modèles économiques — et peut-être, une nouvelle norme technologique.

La vraie question n’est donc plus de savoir s’il faut s’y intéresser, mais comment s’y préparer.

 

Une contribution de Anne T. Griffin pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie


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