L’IA est-elle en train de réécrire les règles du 7e Art ? Selon une étude du CNC, un professionnel du cinéma sur deux a déjà utilisé cette technologie. L’IA s’impose progressivement, redéfinissant les codes, bouleversant les pratiques traditionnelles de l’industrie cinématographique et repoussant les limites de l’imaginaire.
Une contribution de Sarah Lelouch, fondatrice de clapAction et techCannes, et Frédéric Sitterlé, directeur général de l’école de cinéma international EICAR
Malgré cette révolution technologique, l’humain reste au cœur du processus de la création. La créativité humaine, avec sa richesse émotionnelle et sa capacité unique à transcender les frontières, reste irremplaçable. Loin de constituer une menace, l’IA se révèle être un catalyseur de l’innovation cinématographique, à condition qu’elle soit utilisée de manière éthique et maîtrisée.
L’IA : un impact profond et global sur l’industrie
L’intelligence artificielle n’est pas une simple avancée technologique parmi d’autres. Elle est au cœur des débats actuels, traversant des domaines aussi variés que l’environnement, la société, l’éducation, et bien plus encore. Son influence s’étend désormais à chaque étape de la production cinématographique, de l’écriture du scénario à la post-production, en passant par les effets spéciaux, la direction artistique et même la distribution.
L’IA transforme en profondeur les méthodes de travail dans l’industrie. Elle offre une capacité de production démultipliée et des outils accessibles à tous imposant une véritable démocratisation des usages. Différents outils voient le jour quotidiennement : les outils comme ceux utilisés dans le film The Irishman ont permis de créer des effets visuels saisissants, notamment pour rajeunir les personnages en post-production de manière réaliste. L’IA est également mise à profit pour optimiser la création sonore, comme dans l’ajustement dynamique du mixage en fonction de l’environnement d’écoute, ou encore pour analyser les préférences des spectateurs afin d’affiner la stratégie de distribution des films.
Bien que l’IA permette de gagner en efficacité et d’explorer de nouvelles dimensions créatives, sans les créateurs et les artistes qui la manipulent, elle ne génère que des contenus sans jamais capturer la vision artistique, l’émotion brute et la touche personnelle qui font la singularité d’une œuvre. Sans l’intervention humaine pour les orienter, les outils d’IA, aussi puissants soient-ils, seraient réduits à de simples applications techniques, privées de l’essence qui fait la magie du cinéma.
Afin d’accompagner ce mouvement, il devient indispensable – et même vital dans les mois à venir – de multiplier les espaces d’échange, d’acculturation et de formation, au plus près des talents de demain. C’est dans cette perspective que le World AI Film Festival (WAiFF) a vu le jour, un exemple parmi d’autres, pour encourager ces rencontres entre innovation et transmission, entre technologie et création.
La co-formation : essentielle à l’ère de l’IA
L’intelligence artificielle est un levier considérable pour l’industrie du cinéma, mais elle nécessite une maîtrise technique approfondie pour être pleinement exploitée. Ce défi impose aux écoles et aux professionnels de développer des compétences nouvelles, tout en préservant les valeurs et les fondamentaux du cinéma. La question n’est pas simplement d’adopter l’IA, mais de l’intégrer de manière intelligente et harmonieuse avec les savoir-faire traditionnels du 7e Art.
Pour que l’IA soit véritablement efficace, les talents du cinéma ont non seulement besoin d’acquérir des compétences techniques pointues, mais aussi de comprendre les enjeux éthiques et créatifs qui se posent. L’industrie elle-même exprime un besoin croissant de ces profils hybrides, capables de marier expertise technologique et sensibilité artistique. Dans ce contexte, les formations doivent être agiles et réactives aux évolutions rapides du secteur. Si nous ne préparons pas les générations futures à cette fusion entre l’IA et le cinéma, nous risquons de nous retrouver dépassés dans un secteur en pleine mutation.
La formation doit impérativement être collaborative. Les écoles doivent travailler en étroite collaboration avec les entreprises du secteur et les institutions publiques pour garantir que les compétences théoriques et professionnelles soient en phase avec les besoins réels du marché. Les professionnels du cinéma doivent être directement impliqués dans la formation des étudiants, afin de leur transmettre l’expérience du terrain et d’adapter les enseignements aux réalités du secteur. Ce processus de coformation – entre théorie et pratique – devient indispensable pour garantir la réussite de l’intégration de l’IA dans le monde du cinéma, tout en préservant son essence.
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