En Chine, les opérateurs de centres de données peinent à trouver une alternative locale aux puces H20 de Nvidia, devenues indispensables au traitement des données pour les services d’IA. Aucune solution nationale ne rivalise encore avec la performance du géant américain.
L’annonce surprise de Nvidia, qui prévoit de reprendre les ventes de sa puce d’IA H20 en Chine, a fait bondir les actions des centres de données chinois mardi, à commencer par celles de Range Intelligent Computing, dirigée par la milliardaire Zhou Chaonan. Cotée à Shenzhen, l’action de l’entreprise a grimpé de 9,8 %, portant la fortune de sa présidente de 64 ans à 5,8 milliards de dollars, selon les estimations de Forbes.
L’effet d’entraînement s’est fait sentir sur l’ensemble du secteur : Beijing Sinnet Technology a progressé de 6,6 %, Kehua Data Co. de 7,5 %, et GDS Holdings de 10,2 %. « La levée partielle des restrictions sur les puces de Nvidia va accélérer le développement de l’IA en Chine », estime Shen Meng, directeur général de la banque d’investissement Chanson & Co, à Pékin. « Ce dynamisme dopera mécaniquement la demande en infrastructures de centres de données. »
Les opérateurs de centres de données, qui s’appuient sur les puces H20 de Nvidia pour alimenter divers services d’intelligence artificielle, peinent à trouver des alternatives locales aussi performantes, selon Kenny Ng, stratégiste chez Everbright Securities International à Hong Kong. L’annonce inattendue du géant américain a ravivé l’optimisme des investisseurs quant aux perspectives de croissance du secteur, ajoute-t-il.
Dans un billet de blog publié lundi, le PDG milliardaire de Nvidia, Jensen Huang (désormais huitième fortune mondiale avec un patrimoine estimé à 143 milliards de dollars) a révélé que l’entreprise s’attendait à obtenir des licences du gouvernement américain pour reprendre ses ventes de puces H20 en Chine. Ces semi-conducteurs avaient déjà été volontairement bridés afin de respecter les restrictions américaines à l’exportation, avant de faire l’objet de contrôles encore plus stricts en avril dernier.
À l’époque, Nvidia avait enregistré une dépréciation de 5,5 milliards de dollars, conséquence directe du durcissement imposé par l’administration Trump sur les exportations de puces d’IA avancées vers la Chine. Ce revirement spectaculaire intervient peu après une rencontre entre Huang et le président américain Donald Trump. Le dirigeant de Nvidia se trouve actuellement à Pékin, où il participe à une exposition commerciale, selon l’agence officielle Xinhua. « Le gouvernement américain a assuré à Nvidia que les licences seraient accordées, et Nvidia espère pouvoir reprendre les livraisons prochainement », a indiqué l’entreprise dans un billet de blog.
Selon Shen Meng, directeur général de la banque d’investissement Chanson & Co, ce revirement de Washington pourrait s’inscrire dans une stratégie de négociation avec Pékin. Malgré une trêve commerciale conclue plus tôt cette année entre les deux principales puissances économiques mondiales, plusieurs différends majeurs subsistent, notamment la réticence de la Chine à autoriser l’exportation de terres rares vers les marchés étrangers, dont les États-Unis.
Essentielles à des secteurs tels que l’automobile ou la robotique, les terres rares sont majoritairement contrôlées par la Chine. Ses restrictions à l’exportation ont déjà désorganisé les chaînes de production à l’échelle mondiale. En avril dernier, Elon Musk affirmait d’ailleurs que ces limitations avaient perturbé la fabrication du robot humanoïde Optimus de Tesla. « Les États-Unis ne peuvent pas empêcher la Chine de faire progresser sa technologie des semi-conducteurs, qu’ils restreignent ou non les ventes de Nvidia », estime Shen Meng. « En assouplissant leur position, ils pourraient atténuer les tensions commerciales et inciter Pékin à desserrer ses propres restrictions sur l’exportation de métaux rares. »
Un article de Yue Wang pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie
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