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IA et Management | Ludovic Williams Lecomte : « L’IA ne doit pas vouloir dire Intelligence Anxiogène : l’antidote à la peur est de prendre en main les outils existants afin de ne pas en devenir esclave »

L’avènement de l’IA dans les entreprises obligera-t-il les managers à anticiper la transformation en profondeur des pratiques de leur métier ? Pour Ludovic Williams  Lecomte, directeur chez Perpetual spécialisé dans les ressources humaines, la question est de savoir comment lever les derniers freins psychologiques, dans ce qui s’apparente à une peur de l’inconnu. Interview.

 

 

Désirée de Lamarzelle : En quoi L’IA peut être une chance pour les collaborateurs alors que l’on parle d’emplois menacés ? 

Ludovic Williams Lecomte : Les effets positifs de l’apport de l’IA ne sont pas encore tous anticipés. Les plus couramment cités sont le traitement de tâches répétitives, la vitesse d’exécution et la réduction des erreurs. Le tout permettant de libérer du temps pour exprimer des capacités plus valorisantes et qualitatives comme la créativité. Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg : l’IA va s’immiscer dans tous les aspects du métier de chacun, même ceux que l’on soupçonne le moins. A partir de ce constat, la seule anticipation rationnelle à laquelle on puisse se risquer est de prévoir que de nouvelles fonctions vont apparaître ; c’est de mon point de vue exaltant : la nouveauté permet le progrès qui lui-même engendre la nouveauté…

Comment aider les entreprises à intégrer l’IA dans leurs bonnes pratiques ?

L.W. L. : Nous préconisons d’agir sur plusieurs leviers. Le premier consiste à éliminer la peur de leur logiciel de pensée. Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, nous sommes concurrencés sur nos capacités intellectuelles. C’est vertigineux, mais IA ne doit pas vouloir dire Intelligence Anxiogène : l’antidote à la peur est de comprendre en prenant en main de manière proactive des outils existants afin de ne pas en devenir esclaves. Les dirigeants doivent être en mesure d’identifier les domaines où l’IA pourrait remplacer des missions ou des emplois humains, et surtout en créer. Autre levier : investir intensivement dans la formation. Enfin, la généralisation du travail humain + machine exigera que le manager réponde plus précisément aux besoins émotionnels de ses collaborateurs. C’est perçu comme paradoxal, mais plus de machine requiert encore plus d’humain si l’on veut que celui-ci ne soit pas déstabilisé. Le fait de communiquer plus finement et personnellement pour rassurer est crucial.

Comment penser la formation par le prisme de l’IA ? 

L. W. L. : L’offre de formation ne peut demeurer statique ; elle doit être pensée en flux. De nombreuses startups y travaillent, notamment en personnalisant afin que chacun puisse bénéficier d’un apprentissage adapté à son niveau et à ses objectifs, mais aussi avec la progression en continu : adapter en temps réel son contenu au besoin de l’apprenant, où et quand il le souhaite, et ce tout au long de sa vie professionnelle.

Qui sera le manager de 2030 ?

L.W. L. : 2030, c’est déjà aujourd’hui… Pour le définir, permettez-moi d’utiliser un terme technique qui habituellement ne concerne pas les hommes et les femmes : le manager devra être ductile. C’est la faculté à s’étirer sans se rompre. Entre la révolution tech permanente, les nouveaux modes de travail, les besoins nouveaux des collaborateurs, les implications éthiques, ses propres questionnements, il devra se déployer sur un grand nombre de dimensions de plus en plus complexes, et cela sans craquer : un manager multidimensionnel.

Quel rôle indispensable auront les ressources humaines à jouer dans ce nouveau tournant numérique ?

L. W. L. : Ce manager multidimensionnel sera en demande d’un accompagnement quasi-permanent afin de rester efficace -et serein. Aux DRH et aux cabinets de conseil de s’adapter eux-mêmes pour mieux le servir. Impossible de l’aider sans expérimenter soi-même les transformations qu’il subira (au pire) ou dont il bénéficiera (au mieux). Cela passe par un questionnement continuel et une mise à niveau permanente pour comprendre comment chaque métier est impacté. La complexité induite par l’IA devient une fonction géométrique : les enjeux ne s’additionnent pas, ils se multiplient. C’est là que l’humain reste le plus performant : en matière de RH, l’ouverture, le bon sens et l’écoute resteront toujours les outils les plus utiles.

*Perpetual fondé en 2013 est un cabinet de conseil en ressources humaines spécialisé dans l’univers des marques.

 

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