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Dans les coulisses de Quandela, la pépite française du quantique qui veut rivaliser avec IBM et Google

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Les locaux de Quandela, à Massy (91300)
Forbes France a pu visiter les locaux de Quandela, start-up française de Massy spécialisée dans les ordinateurs quantiques photoniques, à l’occasion d’une rencontre en huis clos entre représentants français et allemands du secteur. Reportage.

Créée en 2017, la start-up Quandela s’est rapidement imposée comme une référence dans le secteur des ordinateurs quantiques photoniques. Basée à Massy, la jeune pousse nous a ouvert ses portes le temps d’un après-midi pour dévoiler ses coulisses et ses derniers projets.

 

Nos premiers pas dans les locaux de Quandela

C’est sous un ciel encombré de nuages que Forbes France pénètre les locaux de Quandela, un mardi 23 septembre. Très vite, nous prenons place dans une pièce remplie de hauts représentants du monde quantique français et allemand.

Face à eux, debout sur une estrade, se tiennent le PDG de Quandela, Niccolo Somaschi, ainsi que l’ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne en France, Stephan Steinlein. Tous deux louent, micro en main, le « réflexe franco-allemand » à l’égard du quantique : une technologie hautement stratégique, dans un secteur compétitif et prometteur.


C’est en leur compagnie, ainsi que de Valérian Giesz, cofondateur de Quandela, que commence notre visite.

« On a fabriqué dans l’usine 5 ordinateurs quantiques photoniques : 2 pour nos clouds, 2 déjà livrés chez des clients et partenaires dans des data centers privés, explique Niccolo Somaschi. Le cinquième, qui est prêt, sera livré dans un mois au centre national HPC (High Performance Computing) français dans le cadre d’un projet commercial et européen. »

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Un ordinateur quantique photonique chez Quandela

Quandela a mis en service l’un des plus puissants ordinateurs quantiques photoniques du monde : une machine ressemblant à une armoire noire et bleue de plus de deux mètres de haut, composée de tiroirs et traversée d’un dense réseau de câbles. Cette machine compte 12 qubits photoniques, soit deux fois plus que la génération précédente conçue en 2022. Elle devrait cependant être deux fois moins puissante que la prochaine version, baptisée Canopus, qui comportera 24 qubits et dont la sortie est prévue dans un an.

 

Les promesses du quantique dans le futur proche

Mais qu’est-ce qu’un qubit ? Un bit classique, unité de base de l’information informatique, peut prendre deux valeurs : 0 ou 1. Le qubit, lui, peut superposer ces deux états et être les deux en même temps. Ce phénomène ouvre la voie à une puissance de calcul démultipliée par rapport au bit classique.

« Dans dix ans au moins, les ordinateurs quantiques pourront faire des calculs que les ordinateurs classiques ne peuvent pas faire et ne pourront jamais faire, explique Niccolo Somaschi. Ils auront la possibilité de pousser la technologie à des limites dont nous avons même pas conscience aujourd’hui. »

La France compte cinq grandes entreprises travaillant sur les ordinateurs quantiques : Alice&Bob, C12, Quobly, Pasqal et Quandela. Selon Niccolo Somaschi, cet écosystème fonctionne en « coopétition », mélange de coopération et de compétition.

« On peut travailler avec les mêmes partenaires sur différents axes. À long terme, il s’agit d’un atout, puisque ça permet la cross-pollination : un expert qui a travaillé pour une technologie peut être transféré sur une autre. Ce transfert de connaissances aide l’écosystème et permet de le faire avancer beaucoup plus vite ».

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Niccolo Somaschi et Stephan Stenlein

La France bénéficie d’une avancée remarquable à l’échelle européenne. Comme Quandela, les autres entreprises du secteur visent une indépendance stratégique et économique face aux géants extra-européens tels qu’IBM ou Google. Le Vieux Continent s’est déjà lancé dans une course au quantique vis-à-vis des autres puissances chinoise et américaine.

 

Le quantique en Europe

L’Union européenne a engagé depuis 2023 le déploiement d’une infrastructure quantique de communication (EuroQCI) pour sécuriser les échanges de données grâce à la distribution quantique de clés (QKD).

Le 2 juillet 2025, Bruxelles a présenté une stratégie quantique 2030 visant à faire de l’Europe un leader mondial du secteur. Elle prévoit le renforcement de la recherche, le développement d’ordinateurs quantiques accessibles via le cloud et un futur Quantum Act attendu en 2026 pour structurer l’écosystème.

Objectif : placer l’Europe au premier rang mondial aux côtés des États-Unis et de la Chine d’ici la fin de la décennie.

 

Le développement de l’informatique quantique en Europe s’appuie aussi sur l’intelligence artificielle ; un partenaire technologique que Quandela n’a pas toujours accueilli avec enthousiasme :

« Il y a trois ans, on l’a vue comme une aide pour le quantique. Depuis le boom de ChatGPT, on l’a vue comme un compétiteur. Désormais, nous sommes ensemble, dans le sens où l’IA nous aide sur certains processus internes comme l’analyse des données ou des sujets mathématiques sur des protocoles complexes. Je pense que ça va être encore plus excitant dans les années à venir, puisqu’on aura beaucoup plus d’acteurs IA qui commenceront à intégrer les solutions quantiques. »

Le 23 septembre, l’Europe a inauguré son deuxième ordinateur quantique VLQ à Ostrava, en Tchéquie. Dédié à la recherche et à l’innovation, il sera accessible à un large public académique, industriel et institutionnel. L’objectif : faire de l’Europe un leader mondial d’ici 2030.

 

Vers un renforcement de la relation franco-allemande

Le dialogue franco-allemand organisé chez Quandela symbolise le dynamisme des coopérations transfrontalières dans l’informatique quantique.

« Devenir un pionnier mondial des technologies stratégiques ne peut se faire qu’au niveau européen,  déclare Stefan Steinlein, ambassadeur allemand en France. Nous avons ce qu’il faut pour y parvenir. Les deux pays sont déjà à l’avant-garde. Mais nous pouvons faire encore mieux. »

Quandela n’échange pas seulement avec l’Allemagne : la start-up multiplie aussi les contacts avec d’autres voisins comme l’Italie. « Je pense qu’on aura plusieurs points de contact avec le pays, sur l’intégration de certains composants faits en Italie, sur l’expertise créée par certains groupes de recherches italiens », dévoile Niccolo Somaschi. 

Déclarée par l’ONU “Année internationale des sciences et technologies quantiques”, 2025 marque un pas de plus dans la coopération franco-allemande.

« Alors que les technologies quantiques font partie des priorités communes qui ont été réaffirmées lors du Conseil des ministres franco-allemand du 29 août 2025, je me réjouis que les écosystèmes français et allemands se réunissent pour la deuxième année consécutive à l’occasion du Dialogue franco-allemand du quantique, exprime l’Ambassadeur de France en Allemagne François Delattre. Il s’agit maintenant de monter en puissance et d’élaborer ensemble des cas d’usages industriels dans l’informatique quantique ».

 

Les atouts forts de Quandela

La visite se poursuit dans une petite pièce climatisée où repose un prototype de circuit photonique : une étrange construction de lentilles et de fils, reproduisant la trajectoire des photons. Ce système, reproduit en version miniaturisée sur les puces de Quandela, permet de piéger et d’isoler les photons, briques de base d’un processeur quantique fiable.

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Une tablette optique développée par Quandela

Cette technologie photonique, qui n’exige pas de refroidissement à des températures extrêmes comme les qubits supraconducteurs, offre un avantage significatif en termes de coûts et de consommation énergétique. Un point stratégique alors que la question environnementale s’impose aussi dans le calcul haute performance. Un autre atout majeur de Quandela réside dans son efficacité énergétique, supérieure à celle de nombreux concurrents.

La start-up a pour ambition de croître à l’échelle internationale. Elle a ouvert une filiale au Canada en 2024 et prévoit de s’implanter en Corée du Sud. Cette dynamique suit de près la livraison d’un ordinateur quantique à OVHcloud en mars 2024, faisant de l’hébergeur français la première entreprise à se doter d’un système quantique et de sa suite logicielle en tant que client industriel.

 


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