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Cyberguerre et résilience nationale : les entreprises en première ligne 

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Cyberguerre et résilience nationale : les entreprises en première ligne 

À l’heure où les tensions géopolitiques s’aggravent, la cyberguerre s’impose comme un nouvel outil d’ingérence et de pression stratégique.

Une contribution de Nadir Izrael, CTO et co-fondateur, Armis 

 

L’intelligence artificielle, loin d’être un simple levier d’innovation, est désormais devenue une arme de puissance massive. Elle transforme les cyberattaques leur permettant d’agir plus vite, plus discrètement, et de frapper simultanément un grand nombre de cibles, estompant progressivement les frontières entre conflits physiques et numériques. Et ce sont les entreprises, en particulier celles opérant dans les infrastructures critiques, qui deviennent les premières lignes de défense d’une résilience désormais aussi économique que nationale. 82% des décideurs informatiques français craignant l’impact d’une cyberguerre sur leur organisation, un signal fort que les directions générales et les conseils d’administration ne peuvent plus ignorer. 


L’intelligence artificielle, entre les mains de groupes étatiques ou de cybercriminels organisés, redéfinit les usages, les menaces et les rapports de force. Elle permet de contourner les systèmes de défense traditionnels, diffuser de la désinformation et des logiciels malveillants à grande échelle et de cibler des fonctions vitales d’un pays. Les Jeux olympiques de Paris 2024 en sont un exemple concret : la France a su protéger ses infrastructures critiques malgré des attaques massives, mais a dû affronter en parallèle des campagnes de déstabilisation numérique. Ailleurs, les menaces sont constantes. Des groupes liés à la Chine comme Salt Typhoon ciblent les grands opérateurs télécoms américains. D’autres, affiliés à l’Iran, exploitent des IA génératives pour infiltrer des réseaux d’eau, d’énergie ou des systèmes industriels. Le combat est permanent, souvent invisible pour les citoyens.

Demain, les campagnes politiques, les médias, voire les processus électoraux pourraient devenir les prochaines cibles, et ce ne serait pas une première. En parallèle, la surface d’attaque, c’est-à-dire les points ciblés par les cybercriminels, explose : technologies connectées incluant des systèmes et des équipements industriels (OT), ascenseurs, escaliers mécaniques, bornes de chargement pour les véhicules électriques, environnements cloud… tout devient une porte d’entrée potentielle. Dans ce contexte, la cybersécurité ne peut plus se contenter d’une posture défensive. Les entreprises doivent identifier les menaces en temps réel, détecter les comportements anormaux et les neutraliser de manière automatisée avant leur exploitation. À défaut, elles s’exposent à des interruptions d’activité, des pertes financières et une atteinte durable à leur réputation. 

 

Cybersécurité : condition de souveraineté et de performance économique 

Longtemps cantonnée aux équipes techniques, la cybersécurité est devenue un enjeu de souveraineté nationale et de performance économique. La montée en puissance de l’IA rebat les cartes : elle donne à des groupes activistes et à des nations moins puissantes, les moyens d’agir avec l’efficacité des grandes puissances. Pourtant, 55 % des entreprises françaises déclarent ne pas faire confiance à l’État pour les protéger en cas de cyberguerre. Cette défiance impose aux organisations de renforcer leur autonomie, en s’appuyant elles aussi sur l’IA pour rétablir l’équilibre. Mais un obstacle majeur subsiste : près de la moitié des décideurs IT déplorent un manque criant de talents en cybersécurité dopée à l’intelligence artificielle. 

 

Vers une riposte collective et proactive 

La ligne de front s’est déplacée vers le numérique. Il est temps pour les entreprises de passer d’une simple détection et protection réactives à une réponse proactive et coordonnée. Cela suppose une visibilité en continu sur leurs actifs connectés, une surveillance des risques comme les failles ou les appareils non gérés, et la capacité à réagir en temps réel pour mitiger ces mêmes risques introduits dans l’organisation, de manière automatisée. L’intelligence artificielle joue un rôle clé, en permettant aux équipes de sécurité d’utiliser cette technologie à bon escient pour renforcer leurs efforts contre les cybercriminels qui s’appuient, eux aussi, sur l’IA. 

 

À l’ère des menaces invisibles et omniprésentes dopées à l’intelligence artificielle, la cybersécurité nécessite une mobilisation collective, impliquant entreprises, pouvoirs publics et même les citoyens. Investir dans les compétences, encourager la coopération, adopter une posture proactive, offensive et agile : tels sont les piliers d’un futur numérique résilient. L’ingérence numérique est devenue la norme. À nous de faire de la cybersécurité le système immunitaire de notre économie. 

 


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