C’est au beau milieu des massifs du Jura, près du lac Saint-Point, que s’est réunie ce 2 octobre une foule d’aventuriers et de sportifs passionnés et accomplis. Leur souffle glacé s’évanouissant dans un épais brouillard matinal, tous sont enjoués à l’idée de s’adonner à un nouveau défi de taille : le « Qui veut battre les Légendes » de Mike Horn et Vincent Desfrasne. Un évènement placé sous les valeurs du sport, de la compétition mais surtout de la cohésion, mêlant épreuves de biathlon, d’escalade et de kayak. Le tout dans un décor grandiose, entre champs verdoyants, lac scintillant et collines embrumées.
Au total, 30 légendes du sport et de l’aventure se sont affrontées autour du lac Saint-Point. Parmi elles : Cyril Despres, Nico Mathieux, Anthony Verlaine ou encore Maxime Sorel, chacune accompagnée d’un binôme – un amateur passionné sélectionné par AYAQ, la marque de vêtements outdoor fondée par Vincent Desfrasne, rejoint depuis 2024 par Mike Horn, désormais associé au développement international de la marque. Forbes a eu l’honneur de participer à cette rencontre intense et haute en couleur.
Ces « Légendes » sont des visages reconnus pour leur capacité d’abnégation, leur résistance dans des environnements extrêmes ou leur goût pour l’exploration. Devenus des modèles d’inspiration pour une jeune génération avide de contenus survivalistes et sportifs, ils partagent une même question : comment transformer sa passion en métier ?
La clé de l’authenticité
Bien avant le lancement des épreuves, lors d’une soirée inaugurale sous un ciel d’encre et une fraîcheur saisissante, nous rencontrons Anthony Verlaine, aventurier émérite qui a, entre autres exploits, effectué un tour du monde de quatre ans et demi sans moteur thermique.
« On me demande cent fois par jour comment je fais pour vivre de ma passion. Je n’ai pas gagné un seul centime pendant sept ans, je me baladais, je dormais dans mon hamac, je partais à la cueillette, je pêchais… c’est ce que je montrais au début dans mes vidéos. La meilleure des choses c’est de rester soi-même, de ne pas essayer de faire comme tout le monde. Je le ressens ici avec les plus anciens de “Qui veut battre les Légendes” : on a la même personnalité et on assume qui on est. »
Une idée qui coïncide tout à fait avec la philosophie de Clara Pichon, créatrice de contenus, grande coureuse et fondatrice de deux sociétés (Chocolats Pichon et Koacher). La jeune femme de 27 ans, que nous avons rencontré sur un bateau au beau milieu du lac Saint-Point, s’apprête à sortir une nouvelle application permettant de réserver des coachs sportifs à proximité. Grande entrepreneuse, elle exprime son point de vue :
« Il faut juste faire ce qu’on aime, pas faire quelque chose parce qu’on voit que ça marche et qu’il y a une porte d’entrée, parce que ça ne va pas durer dans le temps. Il y a risque de se lasser, d’arrêter au bout d’un an. Je pense qu’il faut le faire par passion et ne pas chercher à gagner sa vie. Quand j’ai commencé à aller sur les réseaux, je me suis pas dit que je gagnerai ma vie avec, je me suis dis “j’ai envie de faire un IronMan, je suis perdue dans ma vie”. Et je n’aurais jamais pensé que ça prendrait autant d’ampleur. On dit que dans l’entreprenariat, un projet sur dix fonctionne, et j’ai pu trouver mon projet, qui a marché ! »
La passion avant le travail
L’ensemble des Légendes retenues pour l’évènement de Mike Horn et Vincent Desfrasne sont indéniablement de grands passionnés du sport et de l’aventure. L’amour immodéré pour le dépassement de soi et l’abnégation sont la raison, entre autres, de leur réussite et de leur visibilité sur les réseaux sociaux. Colin Mottas, aventurier Koh Lanta, explorateur et créateur de contenus, confirme ce point de vue après une journée d’épreuves haletantes et quelques minutes avant que la fondue générale ne soit servie aux invités.
« C’est une équation très complexe. Je pense qu’il faut faire un taf qui nous plaît : si je n’avais pas été créateur de contenus, j’aurais fait de la vidéo. J’adore la vidéo. Il faut faire ce qui nous plaît pour être heureux et ne pas avoir l’impression de travailler ou de subir ses journées, parce qu’il n’y a rien de pire. Soyez persévérants, mais faîtes quelque chose que vous aimez profondément. »
Louise Picavet, aventurière, pisteuse secouriste et créatrice de contenus, souligne également l’importance primordiale de la passion du sport plutôt que la course vers les vues. La jeune Alpine, révélée au grand public en 2025 grâce à sa participation à Koh Lanta, mise également sur la nécessité de se forger un cercle de connaissances.
« Il faut vraiment se dépasser pour soi, faire ce qu’on aime. Parce que c’est comme ça qu’on pourra avoir plus tard des contacts et construire un réseau, qui vont permettre de pouvoir en vivre. En réalité, tout cela est secondaire : les réseaux ne doivent pas être un but. »

Mais vivre de sa passion ne s’improvise pas. Se lancer sur les réseaux pour gagner sa vie dans le sport et l’aventure nécessite une réflexion approfondie et une vraie stratégie. La création de contenus est un pari risqué qui ne peut être immédiatement exploité à plein temps. Colin Mottas insiste sur la nécessité de prendre son temps :
« C’est trop facile de dire aux gens de se lancer à 100%. Ne le faîtes pas si vous n’avez pas de garanties. Si j’avais un taf classique sans économies, je ne me lancerais pas dans l’influence. Il faut continuer de travailler avec son taf classique, puis travailler à la fin de votre journée sur ce que vous aimez. Il y a une grande part d’incertitude et une grande chance que cela ne marche pas. »
La communication, un atout difficile à travailler
Au-delà de la passion de l’authenticité, gagner sa vie en profitant de sa passion du sport requiert une solide capacité de communication. C’est ce que nous confirme Alix Noblat, révélée lors de ses deux aventures Koh Lanta en 2021 et 2022, dans son chalet au bord du lac Saint-Point. La coach sportive et créatrice de contenus, passionnée de trail, nous explique que vivre de sa passion dans le sport ou l’aventure requiert avant toute chose la création d’une image forte.
« Il faut savoir communiquer. Il faut être présent sur les réseaux. Aujourd’hui il y a des athlètes qui sont incroyables mais qui n’explosent pas parce qu’ils ne partagent rien sur les réseaux sociaux. On ne va pas le cacher, les sponsors sont frileux avec les personnes qui ne se montrent pas. Je pense qu’être un bon communicant, c’est essentiel et ça se travaille. Il ne faut pas baisser les bras : ce n’est pas parce que tu n’as pas atteint les 1000 followers au bout d’un an que tu ne peux pas buzzer l’année d’après parce que tu as trouvé la créativité. »
Même constat pour Isabelle Fabre, ancienne ingénieure devenue grande sportive et vidéaste à plein temps, qui insiste sur l’importance d’apprendre et de s’élever au fur et à mesure de ses expériences :
« C’est vraiment en faisant qu’on apprend. Il faut se lancer, essayer, faire des rencontres et tout va se connecter. Il ne faut pas attendre que tout soit parfait pour s’engager. On peut se faire confiance et se dire qu’on peut rebondir quoiqu’il arrive. »

Selon une étude publiée en 2025 par Hootsuite, plus de 70 % des sportifs indépendants en Europe estiment que les réseaux sociaux sont leur première source de visibilité et de partenariats. Si se mettre en avant sur les réseaux sociaux représente pour beaucoup une certaine crainte, il s’agit d’une condition essentielle pour vivre de ses aventures ou de sa pratique sportive. Entretenir un compte public est effectivement nécessaire pour travailler avec des marques et obtenir des sponsors :
« Tu as plein de façons de réussir, poursuit Colin Mottas. Mais effectivement, les réseaux sont la porte vers la liberté. Tu n’as pas de patron, hormis l’algorithme et les marques avec qui tu collabores. Moi je dis aux gens qui me parlent de projets de création de contenus et qui veulent démarrer une chaîne : “go, vas-y à 200% et fais ce que tu aimes”. La différence entre quelqu’un qui va vivre de ça et quelqu’un qui ne va pas en vivre, c’est celui qui aura persévéré malgré le manque de retours. »
Une minorité de créateurs parvient à franchir les paliers symboliques du nombre d’abonnés. Bien qu’il n’existe pas de recette miracle, certaines approches peuvent faire la différence. Alex Vizeo, aventurier et pionnier de l’influence voyage, partage ses conseils pour s’imposer dans un univers ultra-concurrentiel :
« Tu réussis à sortir du lot quand tu es tranché, polarisé. C’est pour ça qu’il y a beaucoup d’hommes politiques extrêmes qui se démarquent. Un business est juste la solution à un problème. Si tu exacerbes un problème qui est en train d’exister, et que tu apportes une solution, tu peux réussir. Dans le domaine du sport, cela va au-delà du sport, puisque c’est multi-holistique. »
Vivre de ses aventures à travers le monde ou de ses performances sportives requiert désormais une présence notable dans l’influence. Alimenter un compte public sur les réseaux sociaux est aujourd’hui primordial pour gagner son pain, notamment grâce aux possibilités de partenariats et de collaborations avec les marques. Les plus grands aventuriers et sportifs que l’on connaît aujourd’hui ont pu, grâce à une présence publique à travers des posts ou des stories, vivre de leur passion.
Ce milieu dynamique et exigeant reste accessible à ceux qui en maîtrisent les codes : authenticité, communication et passion – trois ingrédients que partagent toutes les Légendes réunies à « Qui veut battre les Légendes », l’événement signé Mike Horn et Vincent Desfrasne, qui prépare déjà de nouvelles éditions.
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