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Guerre en Ukraine : Les entrepreneurs ukrainiens luttent pour sauver leurs employés

UkraineAlors que leur pays vit sous le feu des bombardements russes, plusieurs entrepreneurs ukrainiens tentent de sauver leurs employés. | Source : Getty Images

Alors que la guerre en Ukraine menace d’écraser leurs entreprises, plusieurs entrepreneurs ukrainiens tentent de sauver leurs employés.

 

« Il y a un dicton populaire en Ukraine », explique Alex Medevoï, propriétaire de trois entreprises dans la ville de Kharkiv déchirée par la guerre. « La nuit ukrainienne est très calme, mais au moment le plus calme de la nuit, il faut cacher ce qui a le plus de valeur ». Pour Alex Medevoï, ce qui a le plus de valeur ce sont ses employés. Cet entrepreneur de 36 ans affirme avoir dépensé 340 000 dollars pour évacuer 85 % de ses employés et d’autres personnes de la deuxième plus grande ville d’Ukraine, qui est la cible de bombardements russes incessants.

Alex Medevoï ne sait pas dans quel état sont les bureaux de ses entreprises qu’il a laissées derrière lui, que ce soit ceux de sa société de conseil en technologie du voyage, AltexSoft, ou ceux de son entreprise d’alimentation pour enfants et ses centres d’éducation pour enfants, qui ont rapporté au total environ 20 millions de dollars en 2021. « Pour nos entreprises qui se concentraient sur le marché local, il n’y a pas d’affaires qu’il n’y a pas de marché », affirme Alex Medevoï.

Les entrepreneurs ukrainiens comme Alex Medevoï se sont battus pour prendre soin de leurs employés et protéger leurs entreprises au milieu d’une invasion russe à grande échelle. Peinés par leurs pertes, mais espérant la victoire, ils continuent d’aider les civils, la police et l’armée ukrainienne en livrant des produits de première nécessité comme de la nourriture, des médicaments, des couches et des couvertures.

Andrey Zdesenko, fondateur de Biosphere Coporation, a mis à l’arrêt ses trois usines en Ukraine qui produisaient des couches, des lingettes humides et d’autres produits ménagers de base. Il affirme continuer de payer ses fournisseurs ukrainiens et ses 2500 employés, dont beaucoup, dit-il, se sont réfugiés dans des abris anti-bombes. « Ils font confiance à l’entreprise depuis de nombreuses années », indique Andrey Zdesenko.

Figurant parmi les 100 Ukrainiens les plus riches, selon Forbes Ukraine, Andrey Zdesenko a également mis en place cinq centres où les bénévoles de son entreprise distribuent de la nourriture et des produits sanitaires de première nécessité provenant des stocks de l’entreprise.

Après avoir fondé Biosphere Corporation en 1997 dans sa ville natale de Dnipro, dans le centre de l’Ukraine, Andrey Zdesenko a fait de son entreprise le plus grand fabricant ukrainien de produits d’entretien ménager et de soins personnels, exportant vers 30 pays et réalisant un chiffre d’affaires d’environ 250 millions de dollars en 2021.

« C’est vraiment, vraiment triste parce que nous avons passé dix ans à leur dire que les produits ukrainiens sont de bons produits, de qualité fiable, avec de bons prix et agréables à utiliser, ils sont fabriqués en Ukraine », indique Andrey Zdesenko, 52 ans. « Nous mettons beaucoup de passion et de cœur dans notre produit. » Il prévoit que la guerre entraînera la pauvreté et qu’il faudra environ cinq ans pour que l’économie se rétablisse et que les infrastructures du pays soient reconstruites.

Fozzy Group, qui exploite 900 supermarchés et magasins de proximité à travers l’Ukraine, se bat pour conserver le maximum de magasins ouverts et approvisionnés. Le groupe, qui comprend les chaînes de supermarchés Le Silpo et Fora, a rapporté environ trois milliards de dollars de revenus en 2020 et emploie 68 000 personnes en Ukraine.

« Nous travaillons jour et nuit sous les bombardements russes pour fournir tous les biens nécessaires à nos civils », a déclaré Ivan Palchevskyi, un porte-parole de Fozzy Group. Le groupe a transformé des entrepôts en centre d’aide humanitaire de fortune, distribuant de la nourriture et des médicaments. Cependant, ces entrepôts sont sur le point de manquer d’une longue liste de produits de première nécessité, notamment de l’eau, des pâtes, des céréales, des conserves, du papier toilette et des couches.

Pour les petites entreprises, la guerre a provoqué une crise existentielle.

Peter Souslenskii, PDG d’une entreprise de fabrication de nanoparticules basée à Kharkiv, NVKF Universal, a mis sa femme et ses enfants en sécurité à Dubaï tandis qu’il s’est réfugié dans les Carpates. Son technologue en chef de 70 ans, Volodymyr Koltsov, est piégé dans un village entouré de chars russes. À ce stade, Peter Souslenskii doute de la survie de son entreprise.

« Je veux dire, c’est le désespoir total. Quelque chose que nous avons passé des années de notre vie à construire. Juste, vous savez, disparu en quelques jours », explique l’entrepreneur ukrainien de 39 ans, dont la société produit des nanoparticules brevetées d’argent, de cuivre et de bismuth que seule une douzaine d’autres sociétés dans le monde peuvent fabriquer. Il n’a lancé que récemment des ventes internationales après plus de deux décennies de développement. Les ouvriers de NVKF Universal ont quitté Kharkiv après l’attaque de la ville. « Nous ne pouvions même pas expédier les produits que nous avions déjà fabriqués. »

Dans le sud-ouest de Kiev, Vlad Bazarov est assis dans sa chambre, dans sa maison familiale, les rideaux tirés, alors que des frappes de missiles russes secouent la ville. Pour ce jeune entrepreneur, la guerre a étouffé une activité qui venait juste de prendre son essor.

La startup LoveYouHome de ce jeune homme de 24 ans avait réalisé l’année dernière un chiffre d’affaires d’environ 300 000 dollars pour la vente de couvertures, de draps et d’ustensiles de cuisine, qu’il affirme avoir fabriqués à 90 % avec une main-d’œuvre de 250 personnes dans une usine sous-louée à Kharkiv. Il ignore l’état actuel de cette usine.

Selon Vlad Bazarov, l’Ukraine était un bon endroit pour créer une entreprise de fabrication et d’exportation en raison d’un accord de libre-échange avec plusieurs pays européens, notamment le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Espagne, la Pologne, la France, l’Italie, la Suède, les Pays-Bas et la République tchèque. Ils vendent également de la literie sous la marque Love You. « Et l’infrastructure est plutôt bonne. Et des couvertures en Allemagne sous la marque LYHome. Je veux dire les routes, les chemins de fer et les aéroports », indique le jeune entrepreneur, avant de se corriger, « enfin, c’était le cas avant. »

Alors que ces amis ont pris des armes pour rejoindre la force de défense territoriale volontaire, Vlad Bazarov explique qu’il souhaitait défendre son pays par des « moyens non létaux. » Il a fait don d’une centaine de ses édredons et couvertures en laine à l’armée ukrainienne, ainsi que de son propre sang et de son argent.

Au milieu du chaos de la guerre, certains des entrepreneurs disent s’accrocher à leur vision de l’avenir de leur entreprise. Andrey Zdesenko considère la guerre comme une occasion de montrer l’exemple en tant que leader et se réjouit de la reconstruction. Pour Alex Medevoï, la guerre est une raison supplémentaire de renforcer sa société AltexSoft.

Selon Vlad Bazarov, « nous sommes stressés et fatigués à cause des bombardements et des sirènes la nuit. En même temps, je vois que les gens se sentent très unis. En ce moment, toute la nation s’est unie contre un grand ennemi. »

 

Article traduit de Forbes US – Auteure : Rashi Shrivastava

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