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Retour express de Sébastien Lecornu à Matignon pour piloter un budget de compromis

Déjà nommé début septembre, Sébastien Lecornu avait surpris lundi en présentant sa démission, estimant que les conditions n’étaient plus réunies pour poursuivre sa tâche à Matignon.

De retour à peine une semaine après sa démission, Sébastien Lecornu a été reconduit au poste de Premier ministre, a annoncé l’Élysée vendredi soir dans un communiqué. Sa reconduction était pressentie depuis plusieurs heures et a provoqué une levée de boucliers jusque dans le camp présidentiel. L’ancien ministre des Armées doit désormais s’atteler au texte budgétaire de l’automne.

« Le président de la République a nommé M. Sébastien Lecornu premier ministre, et l’a chargé de former un gouvernement », a dit l’Elysée dans un communiqué, après une dernière journée de tractations politiques intenses.

« J’accepte – par devoir – la mission qui m’est confiée par le président », a répondu Sébastien Lecornu. 

Déjà nommé début septembre, Sébastien Lecornu avait surpris lundi en présentant sa démission, estimant que les conditions n’étaient plus réunies pour poursuivre sa tâche à Matignon. Son retour intervient après une semaine de tractations intenses avec les différentes formations politiques, dans le but de bâtir une équipe gouvernementale capable de faire adopter le budget dans les délais prévus.


Son retour intervient après une semaine de négociations avec les différentes formations politiques, dans l’objectif de constituer une équipe capable de faire adopter le budget avant la fin de l’année. Emmanuel Macron a reçu les responsables des principaux partis – à l’exception de La France insoumise et du Rassemblement national – pour une réunion de crise à l’Élysée. À la sortie, la gauche a exprimé sa déception. « Nous estimons que nous ressortons avec aucune réponse sur rien, si ce n’est que le prochain Premier ministre ne sera pas de notre camp politique », a fustigé la cheffe de file des écologistes  Marine Tondelier.  

 

Un budget moins austère 

Le Premier ministre doit désormais s’attaquer au budget 2026. Deux jours avant sa reconduction, Sébastien Lecornu s’était dit prêt à assouplir la trajectoire de réduction du déficit public afin d’obtenir un compromis. Il a affirmé, mercredi 8 octobre, que le déficit devrait rester « en dessous de 5 % » du PIB, soit entre 4,7 % et 5 %, contre un objectif initial de 4,6 % défendu par François Bayrou.

Ce recalibrage marque un net recul de la rigueur budgétaire annoncée cet été. Là où le plan Bayrou prévoyait une baisse de 0,8 point de déficit en un an, Lecornu se contente d’une réduction limitée à 0,4 point – soit 11 milliards d’euros d’efforts, deux fois moins que prévu initialement. L’exécutif justifie ce relâchement par l’urgence politique : il faut un budget adopté avant le 31 décembre, sous peine de débuter l’année 2026 avec une loi de finances provisoire.

Le calendrier s’annonce serré. Un nouveau gouvernement doit être nommé d’ici dimanche pour tenir un premier conseil des ministres le 13 octobre. L’examen du texte budgétaire au Parlement est prévu le 15. Dans ce contexte, Lecornu plaide pour un budget de discussion, plus souple et amendable, intégrant des baisses ciblées de cotisations pour les entreprises, mais aussi certaines hausses d’impôts.

Sur les marchés, le scepticisme demeure. Plusieurs institutions, dont Goldman Sachs et Natixis, jugent les ambitions budgétaires du gouvernement peu crédibles. Elles anticipent un déficit stagnant autour de 5,3 % à 5,5 % du PIB en 2026, faute de réformes profondes. Un constat qui reflète, selon les analystes, la difficulté du pays à conjuguer stabilité politique, exigences sociales et discipline financière.

 

Vers un gel de la réforme des retraites ? 

Après le projet de loi de finance, viendra celui du financement de la Sécurité sociale. Lors de son examen, la réforme des retraites pourrait de nouveau être rouverte, deux ans après son adoption houleuse. Face à la crise politique persistante, Sébastien Lecornu a reconnu, mercredi 8 octobre sur France 2, que le sujet restait « un vrai point de blocage ». Sans annoncer de mesure concrète, le Premier ministre démissionnaire a laissé entendre qu’un nouveau débat pourrait s’engager à l’automne, parallèlement à l’examen du budget de la Sécurité sociale pour 2026.

En coulisses, plusieurs scénarios circulent. Il ne s’agirait pas d’abroger la réforme d’avril 2023, qui contenait aussi des mesures favorables comme la revalorisation des petites pensions, mais de revoir ses points les plus contestés : le relèvement progressif de l’âge légal à 64 ans et l’allongement de la durée de cotisation. L’une des pistes évoquées consisterait à geler temporairement l’âge de départ à 63 ans, une option qui n’aurait d’effet réel qu’à partir de la génération 1965, donc à partir de 2028.

Mais cette hypothèse aurait un coût non négligeable. Suspendre la montée en charge de la réforme permettrait à environ 200 000 salariés supplémentaires de partir plus tôt, entraînant une hausse des dépenses de retraites et une baisse des cotisations perçues. Selon Sébastien Lecornu, une telle mesure représenterait 3 milliards d’euros de manque à gagner dès 2027. La Cour des comptes évalue pour sa part à près de 6 milliards d’euros d’ici 2035 l’impact d’un gel à 63 ans, voire 13 milliards si l’on prend en compte l’ensemble des comptes publics.

 


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