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Pénurie alimentaire mondiale : vers un afflux de migrants dans les pays du G7 ?

pénurie alimentaire mondialePénurie alimentaire mondiale. | Source : Getty Images

La guerre en Ukraine a provoqué de nombreuses crises dans le monde, notamment une pénurie alimentaire mondiale, obligeant de nombreuses personnes à fuir leur pays pour survivre.

 

En médecine, on dit souvent que poser un diagnostic est la première étape vers la découverte d’un remède. Il en va largement de même en ce qui concerne l’immigration. Pour trouver une solution, il faut avoir une bonne connaissance des faits et du contexte. Cependant, on aimerait parfois ignorer ces faits, surtout lorsqu’ils représentent un problème qui semble insurmontable. Pourtant, même dans de telles circonstances, il est préférable d’affronter le problème de front que de faire l’autruche. Ce n’est qu’en se confrontant à la réalité que l’on pourra trouver des solutions durables. L’ignorance n’est pas le bonheur. L’ignorance est le début du désastre.

 

Six millions d’Ukrainiens ont fui l’invasion russe

En janvier, avant que la Russie n’envahisse l’Ukraine, Forbes a publié un article indiquant que près de sept millions de réfugiés ukrainiens pourraient être déplacés en cas d’invasion russe. À l’époque, un tel chiffre semblait irréel. Pourtant, de nombreux experts s’étaient penchés sur le sujet et avaient prévu les implications d’une telle invasion. Au final, il s’est avéré que 12 millions de personnes ont été déplacées et ont fui l’Ukraine. Alors que les pays européens doivent assumer la plus grande partie de l’accueil et de l’hébergement de ces réfugiés, environ la moitié d’entre eux sont désormais rentrés en Ukraine. Cela signifie qu’il reste toujours six millions de réfugiés ukrainiens en Europe. De son côté, le président américain Joe Biden s’est engagé à accepter 100 000 de ces réfugiés aux États-Unis.

 

Le problème vient de la pénurie de nourriture, de carburant et d’engrais, selon l’ONU

Actuellement, une crise migratoire encore plus grave se prépare en Afrique et en Asie : une migration massive due à la pénurie de nourriture. En effet, selon la FAO, la guerre en Ukraine a conduit 70 millions de personnes au bord de la famine. En outre, la guerre a également perturbé l’approvisionnement alimentaire de 345 millions d’individus. Le directeur exécutif du Programme alimentaire mondial des Nations Unies, David Beasley, a récemment déclaré : « Il est incroyablement inquiétant que 50 millions de personnes dans 45 pays souffrent de malnutrition très aiguë […] ». D’après David Beasley, depuis que la Russie a envahi l’Ukraine le 24 février dernier, la flambée des prix des denrées alimentaires, du carburant et des engrais a conduit 70 millions de personnes au bord de la famine.

 

Les pays du G7 comme principale destination

Que vont faire ces personnes si elles ne veulent pas mourir ? La réponse, selon Yulia Klymenko, membre du Parlement ukrainien et première vice-présidente de la commission des Transports et des Infrastructures, est que ces individus vont essayer d’émigrer. Où iront-ils ? Toujours selon Yulia Klymenko, ces personnes voudront se rendre dans les pays du G7. Elle souligne que « la Russie utilise les denrées alimentaires comme une arme, et si on la laisse faire, l’ampleur des crises sera bien plus importante. »

En effet, Yulia Klymenko indique que « le bombardement russe des villes ukrainiennes, le minage et le blocus délibérés de tous les ports ukrainiens et le ciblage systématique des installations de stockage de céréales ont pour but d’interrompre l’approvisionnement alimentaire mondial. La stratégie consiste à déstabiliser massivement l’économie et l’ordre politique à l’échelle mondiale en provoquant une famine en Afrique et en Asie qui entraînerait un afflux de migrants à destination de l’Amérique du Nord et de l’Europe occidentale. »

 

Une crise évitée de justesse dans le couloir alimentaire de la mer Noire

Les propositions de la Russie visant à établir des couloirs pour l’exportation des céréales ukrainiennes en échange de la levée des sanctions étaient absolument inacceptables pour l’Ukraine et l’Occident. Heureusement, une initiative sur les céréales de la mer Noire, négociée par les Nations Unies et la Turquie, a permis d’ouvrir temporairement un couloir pour que les navires puissent exporter les céréales ukrainiennes vers les marchés mondiaux via la mer Noire. La crise alimentaire semblait avoir été évitée, du moins pour l’instant. Toutefois, le problème est que l’initiative, signée en juillet, doit expirer en novembre. Pendant ce temps, la guerre en Ukraine se poursuit, les troupes ukrainiennes regagnant des territoires perdus et la Russie lançant des avertissements de plus en plus menaçants, notamment concernant l’utilisation d’armes nucléaires.

Ce dilemme politique comporte deux volets. Le premier consiste à garantir la libre circulation des exportations de céréales par la mer Noire. Ce problème est également lié à celui de la vidange des installations de stockage actuelles, remplies de céréales de la précédente récolte, afin de les ouvrir pour la récolte de cette saison. Le choix du moment est crucial. Entre-temps, le deuxième volet porte sur comment cultiver et récolter pendant que les champs sont bombardés, le tout au cœur d’une pénurie d’engrais, de carburant et de main-d’œuvre, sans compter les mines qui n’ont pas encore explosé qui rendent la production et l’exportation encore plus difficiles. Si l’Ukraine n’est pas le seul à fournir des céréales sur le marché international, elle en est un producteur important, notamment pour certains pays. Par exemple, l’Égypte dépend de l’Ukraine pour 80 % de son approvisionnement en blé.

 

Une solution globale à long terme doit être trouvée

Pour éviter une nouvelle crise alimentaire mondiale, il faut débloquer les routes maritimes ukrainiennes et empêcher les navires de guerre et les sous-marins russes d’entraver le trafic international. Les routes maritimes doivent être déminées. Pour protéger les terres agricoles et les infrastructures ukrainiennes et ouvrir des corridors de transport durables, l’Ukraine doit renforcer sa défense aérienne, soutenir ses opérations de défense terrestre contre la Russie et sécuriser ses avancées dans l’est et le sud du pays. Pour soutenir la capacité d’exportation de l’agriculture ukrainienne, le pays doit reconstruire les installations de stockage de céréales, les infrastructures ferroviaires et routières détruites. L’enjeu est de taille.

Il semble y avoir un lien direct entre le manque de sécurité alimentaire et les migrations. Qui plus est, si l’on ajoute l’insécurité alimentaire à la crise énergétique et au coût de la vie, les Nations Unies ont récemment averti qu’environ 1,2 milliard de personnes vivent dans des pays gravement vulnérables face à ces trois facteurs. Lorsqu’on lui a demandé d’indiquer dans quelle mesure elle estimait que ces facteurs allaient influer sur les migrations, la commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansson, a déclaré aux journalistes qu’il était actuellement impossible de prévoir le nombre de personnes qui pourraient tenter de rejoindre l’Union européenne pour fuir ces crises, mais que plusieurs travaux étaient en cours pour se préparer à une telle éventualité, notamment des plans d’urgence.

 

Les élections de mi-mandat aux États-Unis sont cruciales

Les États-Unis s’apprêtent à vivre des élections de mi-mandat. D’après les derniers sondages, les républicains devraient prendre le contrôle de la Chambre des représentants, et peut-être du Sénat. Alors que Joe Biden et certains démocrates et républicains du Congrès débattent actuellement sur ces problématiques liées à la pénurie alimentaire mondiale, d’autres Républicains MAGA (Make America Great Again, slogan de campagne de Donald Trump), dont Kevin McCarthy qui devrait devenir le nouveau président de la Chambre, s’engagent à mettre un terme à l’aide à l’Ukraine. Le leadership mondial américain est mis à l’épreuve. Les décisions que les Américains prendront prochainement pourraient avoir des implications très importantes pour la communauté mondiale dans les jours à venir.

 

Article traduit de Forbes US – Auteur : Andy J. Semotiuk

<<< À lire également : L’Europe fait face à une pénurie d’engrais >>>

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