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Démission de Lecornu : sans Premier ministre, la France peut-elle encore voter son budget à temps ?

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Sébastien Lecornu | Crédits : Getty Images
Adopter le budget 2026 dans les temps semble, depuis la démission de Sébastien Lecornu le 6 octobre, une mission de plus en plus chimérique. Toutefois, quelques solutions sont encore sur la table.

La démission surprise de Sébastien Lecornu, nommé Premier ministre il y a à peine un mois, rebat toutes les cartes. Parmi les grands bouleversements enclenchés depuis ce retournement de situation se tient l’adoption du budget 2026, qui s’éloigne à grande vitesse.

« Nous sommes le 7 octobre, nous n’avons toujours pas de budget, s’alarme Édouard Philippe, maire du Havre et patron d’Horizons, au micro de RTL. Le temps presse, il faut impérativement doter la France d’un budget. Ce sera la responsabilité du prochain gouvernement. Le prochain gouvernement doit se dire que l’on ne va pas faire durer ce que nous vivons depuis déjà six mois pendant dix-huit mois encore : c’est beaucoup trop long et cela nuit à la France. »

Valider un budget est un processus complexe, qui le devient encore plus dans un contexte politique en crise comme celui que la France connaît en ce début d’automne 2025. Moins d’un jour après sa constitution, le gouvernement Lecornu est devenu démissionnaire, instaurant ainsi une ère d’incertitude pour le projet de loi de finances (PLF) et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Il existe néanmoins plusieurs scénarios pouvant acter leur validation dans les temps.

Le projet devait initialement être présenté en Conseil des ministres avant le premier mardi d’octobre, soit le 7. Il aurait dû, par la suite, être déposé à l’Assemblée nationale « au plus tard le 13 octobre », afin de respecter l’article 47 de la Constitution, lequel précise que le Parlement dispose d’un délai de 70 jours pour examiner le projet de loi de finances. Peut-on encore espérer tenir un tel calendrier à l’heure où la France vient de connaître le gouvernement le plus éphémère de son histoire (14 heures de durée de vie) ? Selon le ministère de l’Économie, les équipes techniques de Bercy poursuivent néanmoins la préparation du texte « afin d’assurer la continuité de l’État », une pratique déjà observée lors de périodes d’instabilité politique, comme en 1995 ou 2024.


 

Vers une potentielle nouvelle loi spéciale

Le premier scénario auquel les Français peuvent s’attendre concernant le budget 2026 est le vote de la loi spéciale. Un dispositif qui avait déjà été adopté après la chute du gouvernement Barnier en décembre 2024 dans l’optique d’assurer le fonctionnement de l’État jusqu’à la validation du budget 2025 à la mi-février.

« La possibilité de passer un budget avant le 31 décembre risque de s’avérer très faible, estime Mathieu Carpentier, professeur de droit public à l’Université Toulouse Capitole, interrogé par l’AFP. La loi spéciale paraît de nouveau s’imposer ».

La loi spéciale, encadrée par l’article 47 de la Constitution, consiste à geler temporairement les dépenses du pays, autorisant la perception des impôts et des ressources publiques nécessaires au financement des dépenses publiques essentielles. Si elle ne permet pas, par exemple, d’indexer le barème de l’impôt sur le revenu à l’inflation, elle pourrait stabiliser temporairement les finances publiques en limitant les dépenses non prioritaires. Le déficit public, actuellement proche de 5 % du PIB selon les dernières estimations de l’Insee, pourrait être légèrement contenu si la loi spéciale est prolongée au-delà de janvier 2026.

 

Quel rôle pour le gouvernement démissionnaire ?

Le second cas de figure verrait un projet de loi de finances 2026 dirigé par le gouvernement démissionnaire. Bien que celui-ci soit dans les faits cantonné à gérer les affaires courantes et qu’aucun autre gouvernement démissionnaire n’ait adopté de projet de loi au cours de la Ve République, certaines exceptions peuvent être envisagées. C’est ce qu’indique une note du secrétariat général du gouvernement en 2024 :

« La nécessité de prendre des mesures financières urgentes, et singulièrement de doter la France d’un budget, sous les Républiques précédentes, a le plus fréquemment justifié souvent le recours à des initiatives législatives de la part des gouvernements démissionnaires. »

Si les ministres démissionnaires peuvent, dans les faits, jouer un rôle prépondérant dans l’application du projet de loi de finances 2026, la nomination d’un nouveau gouvernement n’est pas un scénario à écarter. Avec un tout nouveau Premier ministre à la barre – Sébastien Lecornu ayant annoncé ne pas vouloir reprendre son rôle de chef du gouvernement -les prochains ministres pourront déposer rapidement un projet de budget. Selon plusieurs sources parlementaires, Emmanuel Macron envisagerait une nomination d’ici le 15 octobre afin d’éviter un vide institutionnel prolongé. Le calendrier reste toutefois extrêmement resserré, rendant difficile la validation des textes dans les temps.

 


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