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Déficit, retraites, 49.3… ce qu’il faut retenir du discours de politique générale de Sébastien Lecornu

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Sébastien Lecornu a prononcé ce 14 octobre son très attendu discours de politique générale | Source : Getty Images
Deux jours après sa reconduction à Matignon, Sébastien Lecornu a présenté ce mardi sa feuille de route devant l’Assemblée nationale, entre rigueur budgétaire et compromis politique.

Deux jours après avoir été renommé Premier ministre, Sébastien Lecornu faisait face à un jour crucial pour sa survie politique. Décisif pour la suite de son mandat, le chef du gouvernement a présenté ce mardi 14 octobre son discours de politique générale, à travers lequel il a détaillé ses orientations budgétaires et sociales.

Un grand oral placé sous le risque, une fois n’est pas coutume, de la censure. Tandis que La France insoumise et le Rassemblement national ont d’ores et déjà déposé leurs motions de censure ce matin, le Parti socialiste a quant à lui imposé certaines conditions pour ne pas avoir à la voter. Parmi celles-ci, la suspension immédiate et complète de la réforme des retraites, mais aussi l’engagement de Sébastien Lecornu à renoncer à l’usage du 49.3.

« L’Assemblée, dans sa diversité et ses divisions, ressemble aux Français, a plaidé Sébastien Lecornu au début de son discours. Elle est le fruit du choix des Français. Elle traduit les doutes, peurs et espérances de millions de nos compatriotes. En un mot, cette assemblée n’a jamais été aussi représentative des Français. Il faut en tirer toutes les conséquences. »

Le « moine soldat » a donc dévoilé, dans un discours d’une durée d’une trentaine de minutes, ses décisions concernant le budget 2026 et la réforme des retraites. Face à une assemblée en apparence soulagée, Sébastien Lecornu a présenté une feuille de route entrecoupée de nombreux applaudissements, bien que parfois obstruée par diverses salves de réprimandes.


 

Le renoncement au 49.3 confirmé

Parmi les nombreuses déclarations évoquées lors de son discours de politique générale, Sébastien Lecornu a réitéré une promesse de son éphémère premier gouvernement : le renoncement à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution. Un dispositif hautement décrié par les membres de l’Assemblée, en particulier depuis son usage par l’ancienne Première ministre Élisabeth Borne, qui s’en était servie pour enclencher la réforme des retraites.

« C’est la garantie pour l’Assemblée nationale que le débat vivra, ira jusqu’au bout, jusqu’au vote, a déclaré Sébastien Lecornu, martelant à maintes reprises lors de son grand oral que « le gouvernement proposera, nous débattrons, vous voterez»

Le renoncement au 49.3 répond directement au Parti socialiste, lequel menaçait de censurer Sébastien Lecornu s’il ne se pliait pas à ce compromis. Depuis l’automne 2022, les budgets de l’État et de la Sécurité sociale ont tous été adoptés via le 49.3, jusqu’à celui de 2025 inclus.

 

Les grands plans de réduction du déficit

Dès les prémices de son discours, Sébastien Lecornu a souligné l’urgence budgétaire de la France, dans un contexte de dérapage inquiétant des comptes publics. Le Premier ministre a promis un déficit ramené à moins de 5 % du PIB « à la fin de la discussion budgétaire ».

« Nous ne pouvons pas placer notre pays en dépendance durable de prêteur étranger, et je ne serai pas le premier ministre d’un dérapage des comptes publics, a promis Sébastien Lecornu. Aussi, dès 2025, nous aurons respecté les 5,4 % de déficit prévu par mon prédécesseur. »

Le Premier ministre a reconnu par la suite la présence d’« anomalies » dans la fiscalité des très grandes fortunes. Sans toutefois se soumettre aux directives de la taxe Zucman, Sébastien Lecornu a annoncé des « hausses d’impôts ciblées et exceptionnelles pour certaines très grandes entreprises » censées mieux répartir les efforts au sein des contribuables :

« Nous demanderons à créer une contribution exceptionnelle des grandes fortunes que nous proposons d’affecter au financement des investissements du futur qui touche à notre souveraineté, pour les infrastructures, la transition écologique ou la défense »

 

Le gouvernement prévoit un effort budgétaire d’une trentaine de milliards d’euros, selon le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), dont 17 milliards d’euros d’économies de dépenses et 14 milliards d’euros supplémentaires grâce à des mesures sur les recettes fiscales. L’État devrait baisser ses dépenses en 2026 en diminuant les crédits alloués aux ministères à l’exception de celui des Armées, qui sera augmenté de 6,7 milliards d’euros, selon le ministère de la Défense. Le budget de la Sécurité sociale (PLFSS) sera lui aussi réduit avec des économies estimées à 17,5 milliards d’euros en 2026 contre 23 milliards en 2025 selon les projections transmises au HCFP.

 

Lecornu acte la suspension de la réforme des retraites

C’était sans doute le sujet le plus décisif de ce discours de politique générale. La réforme des retraites, point crucial pour les socialistes qui exigeaient sa suspension sous peine d’une censure du gouvernement Lecornu II, a bien été évoquée. Sébastien Lecornu s’est livré à un nouveau compromis vis-à-vis du PS en annonçant la suspension de la réforme de 2023.

« Aucun relèvement de l’âge n’interviendra à partir de maintenant jusqu’à janvier 2028, comme l’avait précisément demandé la CFDT, a assuré le chef du gouvernement. En complément, la durée d’assurance sera, elle aussi, suspendue et restera à 170 trimestres jusqu’à janvier 2028. »

Un compromis qui assure la non-censure des socialistes mais qui ne sera pas sans conséquences pour l’économie française. La suspension de la réforme des retraites devrait en effet coûter environ 400 millions d’euros en 2026 et jusqu’à 1,8 milliard en 2027 selon une note du ministère du Travail, et toucher 3,5 millions de Français. Sébastien Lecornu a été clair : cette décision « ne pourra pas se faire au prix d’un déficit accru ».

Le chef du gouvernement, une fois la menace de censure socialiste écartée, a annoncé une « conférence sur les retraites et le travail » en accord avec les partenaires sociaux. Si la conférence aboutit à un accord, le gouvernement « transposera l’accord dans la loi et le Parlement décidera ». Le Premier ministre a également confirmé que cette conférence serait ouverte dès la fin de l’année 2025, afin de définir une trajectoire de financement soutenable jusqu’en 2030.

 

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