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Comment les États-Unis peuvent se libérer de la dépendance aux terres rares chinoises

États-Unis
Relations entre les États-Unis et la Chine. Getty Images

À Washington, les responsables américains ne peuvent plus se permettre de dépendre de Pékin pour l’approvisionnement en matériaux, alors même que la Chine s’impose comme un concurrent militaire majeur. Pour éviter une situation potentiellement périlleuse, la seule solution envisageable est de réduire drastiquement cette dépendance, notamment dans le secteur des minerais stratégiques.

 

Le 4 juillet, le ministère du Commerce de la République populaire de Chine a annoncé que Pékin et Washington avaient intensifié leurs efforts pour finaliser l’accord conclu lors des négociations commerciales des 9 et 10 juin à Londres, tout en mettant en garde l’administration Trump contre toute remise en cause de ce consensus « durement acquis ». Les deux parties s’étaient déjà entendues début mai sur un cadre d’application de l’accord de Genève, facilitant ainsi l’accélération des expéditions de terres rares vers les États-Unis. Dans son communiqué, le ministère chinois a précisé que, concernant ses propres restrictions à l’exportation de terres rares, le gouvernement « examine et approuve actuellement les demandes de licences d’exportation éligibles pour les produits contrôlés ». Confirmant que les États-Unis ont repris leurs exportations de logiciels de conception de puces, d’éthane et de moteurs d’avion, le texte ajoute que la Maison Blanche a également pris des mesures réciproques « pour lever plusieurs restrictions à l’encontre de la Chine » et en a informé Pékin.

Cette diplomatie met en lumière la capacité de la Chine à contourner efficacement les restrictions américaines sur les semi-conducteurs et les transferts de technologie. Les négociations entre l’administration Trump et le gouvernement de Xi Jinping représentent une étape indispensable à court terme, afin d’éviter des perturbations majeures dans l’économie américaine et son avantage militaire. Mais cet accord, conclu le mois dernier, ne doit être vu que comme une solution provisoire, car il maintient la dépendance des États-Unis vis-à-vis de la Chine pour les minerais stratégiques.


Parallèlement, la pression militaire chinoise s’intensifie. Ces deux dernières années, Pékin a multiplié les exercices aériens et navals, notamment dans la zone d’identification de défense aérienne autour de Taïwan. Près de 450 incursions aériennes ont été recensées à la mi-2024, accompagnées d’exercices de tir réel, de débarquements amphibies, de lancements de roquettes et d’opérations de porte-avions encerclant l’île. L’été dernier, la marine chinoise a même organisé des exercices conjoints avec la Russie dans les eaux des îles Aléoutiennes. En juin, pour la première fois, deux groupes d’attaque de porte-avions chinois ont mené une opération coordonnée dans la deuxième chaîne d’îles près du Japon. Plus tôt dans l’année, en février, un groupe d’intervention de l’Armée populaire de libération effectuait des exercices navals à balles réelles dans la zone économique exclusive australienne, en mer de Tasmanie.

La diplomatie entre Washington et Pékin peut contribuer à apaiser les tensions, mais il est peu probable que la Chine renonce à ses ambitions militaires stratégiques. Si les États-Unis conservent leur supériorité militaire, leur dépendance économique aux chaînes d’approvisionnement chinoises en terres rares les rend vulnérables. La stratégie américaine repose sur des restrictions à l’exportation de semi-conducteurs, dans le cadre d’un effort global pour limiter l’accès aux technologies de pointe et freiner les investissements. Plus récemment, les droits de douane sont venus renforcer ces mesures commerciales. Parallèlement, Washington mise sur l’Inde comme alternative stratégique à la puissance manufacturière chinoise, afin de diversifier les chaînes d’approvisionnement, réduire les risques économiques et contrer la domination industrielle de Pékin.

Face à l’avance significative de la Chine dans le secteur stratégique des terres rares, les États-Unis doivent agir sur plusieurs fronts pour changer cette réalité : la République populaire détient entre 60 et 90 % des capacités mondiales de raffinage et de traitement des minerais critiques, y compris ceux extraits dans d’autres pays, comme l’Australie, qui sont ensuite expédiés en Chine pour transformation.

Les efforts actuels sont dispersés sur plusieurs fronts : extraction et raffinage, investissements publics et incitations de marché, développement de chaînes d’approvisionnement avec des alliés et partenaires, innovation technologique, stratégie industrielle en aval, politique commerciale, constitution de réserves stratégiques, ainsi que transparence et réformes du marché. L’administration Trump devra coordonner ces différents leviers dans une stratégie globale visant à sécuriser l’approvisionnement en minéraux critiques.

Le Kazakhstan, qui pourrait devenir une source fiable pour 17 des 30 minéraux essentiels à l’économie américaine, se révèle un allié stratégique majeur. Astana peut aussi jouer un rôle clé en tant que partenaire géopolitique pour bâtir des chaînes d’approvisionnement indépendantes de la Chine. Plus important encore, tout en entretenant des relations avec ses voisins, la Russie et la Chine, le Kazakhstan a montré sa volonté de collaborer avec les États-Unis et leurs alliés occidentaux.

Ainsi, l’Eurasie s’impose comme un terrain central de la rivalité entre grandes puissances, notamment entre Washington et Pékin. L’objectif de la Chine est de maintenir des liens économiques étroits avec les États-Unis tout en renforçant sa puissance militaire pour éroder leur influence mondiale. Une situation inacceptable pour l’Amérique, qui doit impérativement faire de la sécurité des minéraux critiques une priorité nationale absolue.

 

Une contribution de Kamran Bokhari pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie


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