Repérée par Forbes au salon CES de Las Vegas début 2024, la jeune pousse belge développe des infrastructures solaires locales qui associent production d’énergie, recharge, calcul IA et fabrication européenne.
Réconcilier technologie, écologie et industrie
Fondée en 2023 à Battice, à la croisée de la Belgique, de l’Allemagne et des Pays-Bas, Tonomia appartient à cette génération de jeunes entreprises qui cherchent à concilier efficacité technologique et ancrage territorial. L’idée, née en 2019 dans l’esprit de Mustapha Belhabib alors qu’il travaillait chez Ford sur les véhicules électriques, repose sur un constat simple : les parkings représentent une surface disponible et sous-exploitée pour produire de l’énergie au plus près des usages.
Il y a en effet, 300 millions de places de parking en Europe et environ 2 milliards de places aux Etats-Unis. Chaque place couverte par des panneaux solaires pourrait produire l’énergie suffisante pour parcourir cent kilomètres par jour en voiture électrique.
Le module eParking, développé depuis, combine panneaux solaires, batteries, bornes de recharge rapide et, plus récemment, unités de calcul pour l’intelligence artificielle. « Ce sont des acteurs du secteur de l’intelligence artificielle, intéressés par notre capacité à produire localement de l’énergie, qui nous ont approchés. C’est ce qui a ouvert la voie à notre intégration dans l’écosystème Nvidia », précise Mustapha Belhabib.
Tonomia s’est développée sans financement public. « Nous avons tout construit avec des investisseurs privés. C’est un choix qui nous oblige à nous concentrer sur le produit, plutôt que sur le montage de dossiers de subsides publiques », souligne-t-il. L’entreprise, qui compte une trentaine de collaborateurs en Europe, amorce désormais son déploiement en Amérique du Nord et en Asie.
Une approche locale et modulaire de l’énergie
Au cœur de la proposition de Tonomia : une architecture énergétique distribuée, capable de répondre à plusieurs fonctions selon les lieux. Chaque place de parking peut produire et stocker de l’énergie, alimenter un bâtiment, recharger un véhicule ou faire tourner un serveur. Tonomia s’adresse autant aux collectivités locales qu’aux acteurs privés. Les municipalités, notamment, peuvent mettre des emplacements à disposition, en échange d’un tarif préférentiel pour les habitants.
« Ce que nous défendons, c’est une approche entrepreneuriale du développement durable : des solutions concrètes, viables économiquement, portées par le terrain », explique le fondateur. L’objectif est aussi, de réduire les délais. Là où un renforcement de réseau peut prendre plusieurs années, l’installation d’un module Tonomia se compte en mois, voire en semaines.
En France, où une nouvelle réglementation impose l’installation de panneaux solaires sur certains parkings, la solution suscite un intérêt croissant. « La réglementation a été accueillie avec prudence, voire réticence, par de nombreuses entreprises concernées. Avec ses solutions eParking et eCloud, Tonomia propose une alternative qui donne du sens à cette contrainte : une solution capable de produire, stocker et consommer l’énergie sur place. » Pour les communes, c’est un levier pour offrir un service concret tout en contribuant à la transition énergétique.
Une brique énergétique pour l’IA distribuée
Au-delà de l’énergie, Tonomia travaille à intégrer sa technologie dans les infrastructures numériques émergentes. Son module eCloud intègre directement des serveurs dans les parkings, transformant ces lieux en unités de calcul à faible empreinte carbone. Objectif : faire émerger des « AI Factories » locales, autonomes en énergie, capables d’absorber rapidement une part croissante des besoins liés à l’intelligence artificielle.
L’enjeu est considérable. D’après les estimations internes, couvrir seulement 0,24 % des parkings américains suffirait à répondre à la demande d’un acteur aussi important qu’OpenAI. Ce positionnement a retenu l’attention de plusieurs acteurs du secteur. L’un d’eux, un acteur américain majeur, envisage un investissement de plusieurs millions dans un projet pilote dans la Silicon Valley avec la solution Tonomia. Considérant le plan d’investissement pharaonique d’Oracle et Open Ai dans l’infrastructure AI – projet Stargate notamment, un tel démonstrateur en Californie est un énorme atout pour Tonomia.
Avec cette nouvelle solution, Tonomia indique avoir réduit le retour sur investissement de ses modules, passé de sept à moins de trois ans.
Le tout repose sur une fabrication belge, réalisée avec des partenaires exclusifs. Le design industriel s’inspire du secteur automobile : 90 % des composants sont standardisés, les 10 % restants adaptés aux spécificités locales. Un modèle hybride, pensé pour accompagner la réindustrialisation européenne, sans renoncer à l’agilité des startups.