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Réussir Avec Plus De Sommeil, Et Pas Moins

SommeilCrédits Pixabay

À cause de ce que l’on sait des habitudes de sommeil de nombreuses célébrités, de Thomas Edison à Albert Einstein, en passant par Margaret Thatcher et Martha Stewart, de nombreux cadres aujourd’hui se vantent de n’avoir besoin que de quelques heures de sommeil par nuit. C’est un peu comme si dormir, à l’instar des pauses déjeuner dans les années 1980, était devenu ringard. Mais cette tendance semble changer. Certains livres, comme Why we sleep : The new science of sleep and dream (« Pourquoi nous dormons : la nouvelle science du sommeil et des rêves ») de Matthew Walker, et The 4 pillar plan : how to relaw, eat, move and sleep your way to a longer, healthier life (« Les quatre éléments d’une vie plus longue et plus saine : comment se détendre, manger, bouger et dormir ») de Rangan Chatterjee, un médecin animateur télé aux Royaume-Uni, montrent bien l’intérêt croissant des travailleurs ambitieux pour la pleine conscience, la nutrition et le sport. Il y a quelques semaines, un article un peu ionique du Financial Times suggérait que la solution au problème de productivité des Anglais pourrait bien se trouver au fond de leur lit.

Vicki Culpin, Professeure de comportement organisationnel chez Ashridge Executive Education, une branche de la Hult International Business School, publie cette semaine The Business of Sleep: How sleeping better can transform your career (« Affaires de sommeil : comment mieux dormir transformera votre carrière »), et trouve que cette prise de conscience est une bonne nouvelle. Elle raconte qu’en arriver là a « été une vraie bataille ». En effet, de nombreuses études traitent des conséquences d’un sommeil de mauvaise qualité dans des domaines comme les problèmes de mémoire, d’attention, la prise de décision et la créativité sur le court-terme, mais aussi dans sept des quinze plus importantes causes de décès aux États-Unis, comme les maladies cardio-vasculaires, les accidentes, le diabète et l’hypertension, sur le long-terme. Malgré cela, près de la moitié des adultes américains ou britanniques ne dorment pas suffisamment. Elle pense maintenant qu’une « tempête parfaite » est en train de se construire en même temps que les gens se rendent compte que passer plus de temps au travail ne se traduit pas nécessairement par une meilleure productivité. En effet, Mme Culpin indique que ce serait plutôt le contraire. Les conséquences du manque de sommeil sont multiples : des petites erreurs de jugement ou des limites à la créativités, imperceptibles mais ayant un effet à long terme, à l’accident nucléaire de Three Mile Island en 1979, la destruction de la navette spatiale Challenger en 1986 ou la catastrophe de Tchernobyl la même année.

Dans son ouvrage, Mme Culpin décrit trois principaux types de décisions qui sont prises dans le monde professionnel. La première catégorie comprend toute la routine, les décisions monotones, plus ou moins automatisées et intégrées. Celles-ci sont prises tous les jours, généralement si vite et avec si peu de réflexion, qu’on les considère peu souvent comme des décisions. Le deuxième groupe de décisions concerne les tâches complexes, qui nécessitent de rassembler et de traiter d’importants volumes d’informations. Cependant, l’approche et la décision prise restent relativement prévisibles, et impliquent ce qu’on appelle la pensée convergente, c‘est-à-dire que les individus s’inspirent de leurs expériences passées, de ce qui a fonctionné, pour prendre leur décision. Les tests de QI font partie de cette catégorie, tout comme la rédaction d’un rapport budgétaire trimestriel ou la réparation d’une pièce de mécanique. Le dernier type de décision comprend toutes celles qui reposent fortement ou exclusivement sur la pensée divergente. Elles demandent beaucoup de créativité, d’innovation et de souplesse d’esprit. Il s’agit typiquement de situations nouvelles, lorsque les individus ne peuvent ou ne devraient pas s’appuyer sur leur expérience. Elles sont très fréquentes lors des situations de crise, ou quand surgit un imprévu, avec des enjeux souvent importants.

Et Mme Culpin de rajouter : « Il faut bien avoir à l’esprit que ce type de décisions se fait généralement plus fréquent au fur et à mesure des promotions au sein d’une organisation. Les dirigeants, qui travaillent dans un monde de plus en plus volatile, incertain, complexe et ambigu, doivent prendre des décisions avec de moins en moins d’information, dont la pertinence est parfois difficile à évaluer, sans y être préparés, et dans un environnement qui connaît des changements rapides ». Comme si cela ne suffisait pas, la chercheuse cite une autre étude conduite par un collègue d’Ashridge Executive Education, qui révèle que « ces dirigeants haut placés, qui peuvent avoir besoin de pensée divergente de manière très régulière, sont ceux qui déclarent le moins de temps de sommeil par nuit ».

Que peut-on faire, alors ? Mme Culpin suggère des mesures à la fois personnelles et organisationnelles. En matière de mesures organisationnelles, justement, elle propose que les entreprises revoient leurs rotations horaires, peut-être en prenant davantage en compte les préférences des employés, certain travaillant mieux le matin, et d’autres mieux le soir. Il faudrait également s’abstenir de dérégler l’horloge interne en changeant les horaires des employés, et réfléchir aux conséquences des nombreux voyages et du décalage horaire, et aux autres problèmes qui peuvent affecter le personnel. Mais il y a aussi beaucoup de choses à faire à l’échelle de l’individu, comme ne pas recharger ses appareils dans la chambre la nuit, faire en sorte que la chambre soit optimale pour un sommeil de qualité, ou encore se forcer à faire du sport.

Les technologies du sommeil devraient valoir 80 milliards de dollars (65 milliards d’euros) d’ici deux ans, ce qui devrait encourager à la fois les individus et les entreprises à accepter l’importance du sommeil. Mais en attendant, la chercheuse ne peut s’empêcher de penser à tous ces gens qui ne dorment toujours pas assez, et de réaliser qu’il reste un long chemin à faire avant de faire comprendre que les dirigeants efficaces dorment plus, et pas moins, que le commun des mortels.

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