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Quand le storytelling devient un outil de leadership

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Storytelling. Getty Images

Depuis le début des années 2000, le storytelling s’est imposé comme un levier incontournable de communication pour les dirigeants, tous secteurs confondus. Arlene Milon, à la tête d’une organisation à but non lucratif, en a récemment mesuré la force lors d’une réunion de son conseil d’administration : « Nous avions une multitude de données à présenter, mais j’ai choisi d’ouvrir la séance par une histoire et quelques remerciements sincères. L’atmosphère a aussitôt changé. Au lieu de démarrer avec des chiffres sur les fonds à collecter, nous avons capté l’attention autrement. »

 

De leur côté, quatre autres dirigeants ont également expérimenté la puissance du storytelling dans l’exercice de leur fonction. En intégrant la narration à leur approche managériale, chacun a non seulement atteint ses objectifs, mais a aussi vu son style de leadership évoluer de manière significative.

 


Le directeur financier devient une référence en narration appliquée à la finance

Karma Auden, directrice financière de l’Université de Nouvelle-Angleterre en Australie, a toujours perçu les états financiers comme bien plus que de simples colonnes de chiffres. « Chaque donnée raconte une histoire. Derrière chaque chiffre, il y a une personne, une ressource ou une action », affirme-t-elle. Pour elle, bien comprendre ce que représente une donnée est essentiel pour la transmettre de manière percutante.

Mais faire passer ce message auprès d’autres professionnels de la comptabilité n’a pas été simple. C’est ce qui l’a poussée à devenir facilitatrice d’histoires certifiée via le programme Leadership Story Lab. À l’heure où l’intelligence artificielle prend en charge une part croissante des tâches comptables automatisables, Mme Auden plaide pour que les experts financiers développent des compétences en communication, afin de mieux interpréter et valoriser les données au sein de l’entreprise.

Cette approche a radicalement changé sa manière de travailler. Elle utilise désormais le storytelling pour présenter les budgets aux différents départements de son université et anime régulièrement des ateliers de narration pour des professionnels de la finance. Aujourd’hui, elle est sollicitée par des groupes industriels qui la considèrent comme une figure incontournable de la narration financière. « Mon objectif, c’est de rendre la finance amusante pour tout le monde », confie-t-elle dans un sourire.  

 

Les coachs misent sur le storytelling, et les résultats sont au rendez-vous

Pour Chris McAuley, ancien acteur devenu coach en art oratoire, le pouvoir de la narration ne fait aucun doute. Aujourd’hui, il utilise le storytelling comme un levier de transformation pour ses clients. L’un de ses cas les plus marquants : une cliente extrêmement timide, contrainte par son poste à prendre la parole en public. Pour l’aider à surmonter ce blocage, M. McAuley s’est appuyé sur un outil conçu pour aider les individus à mieux se comprendre et à cerner ce qui les anime profondément.

À partir de cet exercice, il a rédigé une histoire personnalisée retraçant le parcours de sa cliente ; avec un début accrocheur, un développement prenant et une conclusion valorisante. L’impact a été immédiat : « Son supérieur m’a appelé pour me dire : “Mon Dieu, qu’est-ce que vous lui avez fait ?” », raconte-t-il. En se découvrant à travers le regard de son coach, la cliente a réveillé une confiance en elle qui ne demandait qu’à émerger. Le storytelling lui a permis d’entrer pleinement dans son rôle.

De son côté, Reggie Polk, formateur en entreprise chez ServiceNow (une société spécialisée dans les solutions d’IA pour les organisations) intègre aussi la narration dans ses sessions de formation. Son objectif : aider ses collègues à mieux exploiter leurs talents et à créer du lien. « Si vous voulez faire bouger les gens, vous devez comprendre ce qui les fait vibrer », explique-t-il.

Pour M. Polk, les formations traditionnelles, trop rigides, laissent peu de place à la créativité. Il préfère miser sur une narration authentique, plus engageante : « Bien sûr, on doit atteindre un objectif, mais encore faut-il maintenir l’attention.» Résultat : ses formations favorisent une meilleure connexion entre les participants et renforcent leur compréhension des enjeux clients. Une méthode qui fait la différence, selon lui, là où les approches classiques échouent à mobiliser durablement.

 

Un cadre pilote un changement majeur grâce au pouvoir du storytelling

Lorsque Chuck Rhorig a été chargé de mener l’un des plus grands changements organisationnels au sein de son département chez USAA (un organisme de services financiers dédié aux membres de l’armée américaine et à leurs familles), il a rapidement compris que les chiffres et les plans ne suffiraient pas. Heureusement, l’USAA avait déjà intégré la narration comme compétence clé dans son tableau de bord stratégique et offrait à ses cadres une formation dédiée.

« Depuis cette formation, je suis devenu beaucoup plus intentionnel », confie-t-il. Face à l’ampleur du changement à venir, il savait que la panique pouvait s’installer. Pour éviter cela, il a consacré un temps considérable à façonner son premier message. « J’ai écrit, réécrit, raccourci, retravaillé… jusqu’à trouver la juste tonalité. L’histoire devait être concise, mais suffisamment riche pour embarquer tout le monde. »

Pour M. Rhorig, l’enjeu était clair : toucher émotionnellement son auditoire pour capter son attention et faire passer des messages complexes. Mais au-delà des grands discours, il voit aujourd’hui la narration comme un outil du quotidien. « J’essaie d’en faire une habitude, même dans les échanges informels », explique-t-il. Car chaque opportunité de communication est aussi une occasion de créer du lien et de renforcer la confiance au sein de son équipe.

 

Les arguments en faveur du storytelling en entreprise

Ces cinq témoignages le confirment : le storytelling s’impose comme un outil de communication polyvalent, capable d’accompagner les dirigeants dans une grande diversité de contextes ; qu’il s’agisse de présenter un budget, d’accompagner un changement, de coacher un collaborateur ou de renforcer la dynamique d’équipe.

Cependant, le leadership narratif ne consiste pas à monopoliser la parole. Il s’agit plutôt d’endosser le rôle de guide discret, celui qui éclaire sans imposer. Lorsqu’elle est pleinement intégrée à une stratégie managériale, la narration permet de révéler des talents insoupçonnés, de créer des connexions plus profondes et de renforcer la confiance au sein des équipes.

Vous êtes cadre et souhaitez explorer le potentiel du storytelling dans votre leadership ? Voici trois premiers pas pour vous lancer :

  • Conseil n°1 : Posez les bonnes questions. Celles qui suscitent l’introspection et ouvrent à la conversation.
  • Conseil n°2 : Penchez-vous, écoutez vraiment. Soyez pleinement présent, car l’écoute est la première étape d’une histoire bien racontée.
  • Conseil n°3 : Transformez l’ordinaire en opportunité. Chaque situation peut devenir le point de départ d’un récit d’entreprise porteur de sens.

Adopter la narration, c’est finalement replacer l’humain au cœur du leadership.

 

Une contribution de Esther K. Choy pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie


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