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Pourquoi les chefs d’entreprise mettent l’accent sur le développement de leurs capacités

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Pourquoi les chefs d'entreprise mettent l’accent sur le développement de leurs capacités. Getty Images

Le taux de rotation des dirigeants d’entreprise connaît une forte hausse. En 2024, un nombre historique de 2 221 chefs d’entreprise aux États-Unis ont quitté leur poste, et 2025 pourrait bien battre ce record. Si les raisons de ces départs sont multiples, elles s’articulent essentiellement autour de quatre sources majeures de pression : une volatilité économique croissante, une ingérence politique renforcée, une complexité organisationnelle toujours plus importante, ainsi qu’un facteur souvent négligé — le fardeau personnel lié à une direction sous surveillance constante.

 

L’environnement économique a profondément évolué, transformant avec lui l’état d’esprit des dirigeants. Les dirigeants les plus performants aujourd’hui ne se contentent pas d’être de simples stratèges. Ils incarnent une qualité plus vaste : la capacité à absorber la pression, naviguer dans la complexité, évoluer dans l’incertitude, tout en préservant leur équilibre personnel. Dans un contexte de changements rapides (marchés, technologies, dynamiques d’équipe), le leadership ne repose plus sur le contrôle, mais sur l’agilité.

Zak Brown, PDG de McLaren Racing, résumait récemment cette nouvelle réalité lors d’une interview sur CNBC : « Vous perdez souvent plus que vous ne gagnez. Il faut apprendre à accepter ces échecs et les transformer en moteur pour s’améliorer. » Cette vision illustre parfaitement le défi majeur du leadership moderne : bâtir une résilience interne capable de supporter la volatilité sans s’épuiser. Voici trois piliers fondamentaux du leadership efficace. 


 

Capacité mentale : absorber les pertes et se réajuster rapidement

Autrefois, les dirigeants pouvaient s’appuyer sur leur expérience et une certaine stabilité pour prendre des décisions éclairées. Aujourd’hui, ce modèle est dépassé. Face à l’accélération des technologies, à l’évolution des comportements des consommateurs et aux nouvelles attentes des équipes, les dirigeants doivent faire preuve d’une agilité et d’une souplesse mentale accrues.

Les PDG d’aujourd’hui sont souvent contraints de décider sans disposer de toutes les données nécessaires. Les préférences évoluent, la dynamique d’équipe change, et l’intelligence artificielle bouleverse sans cesse les règles du jeu. Ils doivent donc être capables d’absorber les revers, de naviguer dans l’incertitude et d’avancer avec assurance, même face à des informations incomplètes.

Comme l’a rappelé Zak Brown, les échecs sont désormais la norme plutôt que l’exception. La clé du succès réside dans la capacité à assimiler ces échecs (pas seulement à les tolérer), et à se réorienter rapidement. Les leaders les plus résilients savent réaligner leurs équipes et concentrer leur énergie sur l’essentiel.

 

Capacité émotionnelle : se reposer pour mieux répondre, plutôt que réagir

Si la capacité mentale guide la réflexion des dirigeants, c’est la capacité émotionnelle qui détermine leur aptitude à diriger sous pression. Or, rien ne compromet plus rapidement cette capacité que le manque de sommeil.

Des études récentes publiées dans Frontiers in Psychiatry montrent que la privation de sommeil altère les fonctions exécutives du cerveau, affaiblissant le jugement et le contrôle des impulsions. Cela se traduit par une plus grande réactivité émotionnelle, des décisions plus risquées, ainsi qu’une difficulté accrue à gérer des informations complexes ou des situations à fort enjeu.

Pour les PDG, cela engage une double responsabilité, à la fois en matière de leadership et d’organisation. Une autre étude, parue dans Frontiers in Neuroscience, souligne que même une restriction modérée et chronique du sommeil a des effets cumulatifs, dégradant progressivement la qualité des décisions et la régulation émotionnelle.

Si la plupart des dirigeants n’enchaînent pas les nuits blanches, beaucoup souffrent néanmoins d’un sommeil insuffisant, un déficit qui s’accentue avec le temps. Le sommeil demeure cette infrastructure invisible mais essentielle, nourrissant la stabilité émotionnelle et la performance des leaders.

 

Capacité sociale : Diriger selon ses valeurs, pas selon les calculs politiques

Dans un contexte de polarisation accrue, chaque prise de parole publique d’un PDG est scrutée de près. Les dirigeants se retrouvent souvent tiraillés entre attentes contradictoires : intervenir ou rester neutres, agir ou se taire — parfois simultanément. Une récente enquête nationale du PMI illustre bien cette tension :

  • 84 % des Américains estiment que les entreprises doivent soutenir leurs communautés locales,
  • 68 % souhaitent que les PDG prennent position publiquement sur des enjeux sociétaux,
  • Pourtant, 58 % ne veulent pas connaître les opinions politiques personnelles de leur PDG.

Le message est limpide : le public attend un leadership fondé sur des valeurs plutôt que sur des idéologies partisanes. La confiance ne se construit pas en choisissant un camp, mais par des décisions cohérentes et alignées avec des principes solides. Au-delà de la simple communication, c’est un engagement authentique qui fait la différence.

Dans une récente interview accordée à CNBC, Andrea Orcel, PDG d’UniCredit, a souligné qu’une exécution parfaite peut être compromise par des pressions politiques. « Tout peut être parfait », a-t-il expliqué, « mais si le gouvernement s’y oppose, le projet ne progresse pas ». Ses propos interviennent alors que plusieurs gouvernements nationaux ont bloqué d’importantes opérations de fusion, non pas pour des raisons stratégiques, mais politiques.

La capacité sociale des dirigeants repose sur leur aptitude à :

  • diriger efficacement au-delà des divisions et des intérêts divergents, autour d’une mission commune ;
  • garder leur calme malgré la pression médiatique et politique ;
  • répondre aux attentes des parties prenantes sans compromettre les relations clés.

 

La prochaine ère du leadership sera celle des PDG axés leurs capacités

Les leaders qui s’imposeront dans ce nouveau contexte ne seront pas nécessairement les plus brillants ou les mieux connectés, mais ceux capables de gérer une pression croissante, l’incertitude et des responsabilités toujours plus lourdes. Ce n’est pas le fruit du hasard, mais celui d’un travail conscient et approfondi sur leurs capacités mentale, émotionnelle et sociale. La volatilité est inévitable, mais les dirigeants qui sauront cultiver cette résilience intérieure deviendront ce que l’on recherche aujourd’hui plus que jamais : des leaders dignes de confiance, que l’on a vraiment envie de suivre.

 

Une contribution de Julian Hayes II pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie


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