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Quand la banque ferme, le commerce prend le relais 

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Quand la banque ferme, le commerce prend le relais 

Depuis plusieurs années, le paysage des services bancaires en France connaît une transformation profonde. Entre 2009 et 2023, plus de 6 800 agences ont fermé leurs portes, soit près d’un tiers du réseau national (source : Banque de France / ACPR). En parallèle, le nombre de distributeurs automatiques de billets (DAB) a chuté de 42 000 à 32 000 en seulement sept ans, soit une baisse de plus de 23 %. Résultat : plus de 1 000 communes se retrouvent désormais sans aucun service bancaire de proximité.  

Une contribution de Morgan REYROLLE, Directeur Opérationnel de Coinstar France 

 

Cette disparition progressive des guichets bancaires ne touche pas uniquement les particuliers — elle pénalise aussi fortement les commerçants, qui n’ont plus accès aux services essentiels comme le dépôt de fonds, notamment en pièces. Face à ce vide laissé par les établissements bancaires traditionnels, les commerces de détail ont su se mobiliser en proposant des services de proximité essentiels, répondant ainsi aux besoins quotidiens des particuliers comme des professionnels. 


 

Une réponse logique : les commerces de détail 

En effet, le marché français a su s’adapter et proposer de nouvelles solutions pour préserver l’accès aux services bancaires de proximité. Les supermarchés, les commerces de proximité, les bureaux de tabac et autres enseignes multiservices se sont imposés comme des relais naturels. Cette réponse s’est révélée particulièrement judicieuse. Malgré la progression constante du e-commerce, la très grande majorité des Français continue de privilégier les magasins physiques pour leurs achats du quotidien. Selon une étude menée en 2024, 84 % des consommateurs déclarent préférer faire leurs courses en magasin plutôt qu’en ligne, motivés notamment par la possibilité de voir, toucher et emporter immédiatement les produits. Ce lien de confiance et de proximité, difficilement réplicable en ligne, confère aux commerces de détail un rôle central dans le maintien d’un service accessible et humain.  

 

Des services qui se développent au plus près des habitants 

C’est donc tout naturellement que ces lieux très fréquentés ont accueilli des services permettant de pallier la raréfaction des guichets et des DAB. Depuis 2018, le retrait d’espèces en caisse s’est largement démocratisé : il est désormais possible, dans de nombreuses enseignes, d’obtenir jusqu’à 60 € en billets au moment de régler ses achats. Ce service, en nette croissance (+35 % entre 2022 et 2024), constitue une réponse concrète au recul des distributeurs automatiques, notamment en zones rurales. La présence des DAB en supermarché s’est ainsi  nettement accélérée ces dernières années, répondant à une demande croissante de services bancaires de proximité. À cela s’ajoutent des solutions complémentaires comme des bornes qui permettent de convertir les pièces en bons d’achat, favorisant ainsi la réinjection directe de la petite monnaie dans l’économie locale. Au fil des années, ces commerces sont ainsi devenus des points d’accès essentiels à des services financiers de proximité, qu’il s’agisse du retrait d’espèces ou du recyclage de pièces. 

 

Un rôle élargi au service du lien social 

Cette évolution présente plusieurs atouts : les commerces offrent des horaires d’ouverture plus étendus que les agences bancaires, une accessibilité renforcée et un contact humain que nombre de clients apprécient particulièrement. Ce dernier point est d’autant plus important dans des territoires où la fracture numérique demeure une réalité. Aujourd’hui encore, 13 millions de Français déclarent rencontrer des difficultés avec les outils numériques, et un senior sur cinq de plus de 75 ans indique éprouver des difficultés à gérer ses opérations bancaires à distance. 

En se positionnant comme des points d’accès aux espèces et à certains services financiers, les commerces de proximité dépassent leur fonction initiale. Ils deviennent des lieux de vie, des points d’ancrage qui contribuent au maintien du lien social et à l’inclusion économique des habitants. 

 

Vers une organisation durable et concertée 

Ces initiatives, issues d’une adaptation pragmatique aux besoins du terrain, mériteraient désormais d’être reconnues, accompagnées et organisées. La question qui se pose aujourd’hui n’est plus seulement de constater ce mouvement, mais d’en tirer les enseignements pour l’avenir. La coordination des acteurs publics, des collectivités locales, des réseaux bancaires et des commerçants pourrait permettre de structurer ces pratiques et de garantir un accès équitable et durable aux services financiers de base. 

Cette réflexion s’inscrit dans un contexte européen où des initiatives sont en cours, notamment autour du droit d’accès aux espèces. La Banque de France, de son côté, encourage le développement de partenariats public-privé pour préserver ces services essentiels sur l’ensemble du territoire. 

Les commerces de détail démontrent ainsi leur capacité à s’adapter aux besoins des citoyens et à jouer un rôle clé dans la cohésion des territoires. En complément des réseaux bancaires, ils offrent des solutions concrètes qui participent à l’inclusion monétaire et sociale. Alors que les usages évoluent et que les attentes des consommateurs changent, ces lieux du quotidien confirment leur importance stratégique dans la vie économique et sociale de nos régions. 

 


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