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Droits de douane aux États-Unis : le guide pratique pour les investisseurs

droits de douane
Droits de douane aux États-Unis. Source : Getty Images

Pour Donald Trump, rien ne sonne plus juste que  le mot « Tariffs » : les fameux droits de douane, au cœur de sa stratégie économique. Mais que recouvre réellement ce terme ?

 

Un tarif douanier est une taxe appliquée sur des marchandises importées, ce qui en augmente mécaniquement le prix. Loin d’être une spécificité américaine, les droits de douane sont utilisés par de nombreux gouvernements à travers le monde pour rendre leurs produits nationaux plus compétitifs et protéger certains secteurs stratégiques face à la concurrence étrangère à bas coût. Aux États-Unis, où la désindustrialisation s’est accélérée dès les années 1980 avec l’externalisation de la production, les tarifs douaniers sont aussi devenus un levier pour tenter de relocaliser les chaînes d’approvisionnement et relancer l’appareil industriel.

Le 2 avril 2025, Donald Trump a frappé fort : il a annoncé des droits de douane bien plus élevés que prévu, visant la quasi-totalité des partenaires commerciaux des États-Unis. Il a baptisé cette journée « Liberation Day ». Mais quatre jours plus tard, les marchés lui ont rapidement répondu : le S&P 500 et le Dow Jones ont chuté de plus de 10 %.


Face à la tourmente qui s’est emparée des marchés boursiers et obligataires, Trump a été contraint de faire machine arrière. Le 9 avril, il a suspendu pour 90 jours la majorité des droits de douane annoncés, à l’exception de ceux ciblant la Chine. La période qui a suivi a été particulièrement agitée. Si le S&P 500 est parvenu à effacer ses pertes, les marchés obligataires, eux, peinent toujours à retrouver leur équilibre.

Dans ce climat incertain, où les droits de douane pèsent sur la stabilité des marchés financiers classiques, les investisseurs — qu’ils soient gestionnaires expérimentés ou simples détenteurs d’un plan 401(k) — doivent prendre conscience d’une réalité : les marchés traditionnels peuvent souffrir durablement de ces politiques commerciales. Alors que Wall Street tente de s’adapter à cette nouvelle donne, certains se tournent déjà vers les investissements alternatifs pour diversifier leurs options et limiter les risques.

 

Droits de douane, commerce mondial et capital-investissement

Dans un contexte commercial marqué par l’instabilité et la montée des droits de douane, certaines stratégies de capital-investissement peuvent offrir des atouts majeurs. Selon le rapport Pulse of Private Equity de KPMG pour le premier trimestre 2025, les sociétés de capital-investissement devraient concentrer leurs efforts sur des secteurs jugés plus résilients face à la guerre commerciale : technologie, services financiers, services aux entreprises et santé.

Dans le secteur technologique, par exemple, les surtaxes sur les composants importés — comme les semi-conducteurs — pourraient inciter à relocaliser la production, stimulant ainsi les investissements dans les usines, l’infrastructure cloud ou encore la cybersécurité aux États-Unis. Des domaines dans lesquels le capital-investissement peut catalyser la croissance.

Du côté des services financiers, certaines fintechs ou prêteurs privés restent relativement protégés des turbulences commerciales, car peu exposés aux importations ou aux chaînes d’approvisionnement mondiales.

Comment accéder à ces opportunités de marché ? Les investisseurs peuvent se positionner via des fonds de capital-investissement classiques — une option à fort potentiel mais aussi à haut risque, dont les performances dépendent du talent du gestionnaire à développer et revendre les sociétés du portefeuille.

Autre option : les fonds de fonds ou fonds multi-gestionnaires. Plutôt que d’investir dans des entreprises directement, ces structures misent sur plusieurs fonds de capital-investissement, offrant ainsi une diversification sectorielle, géographique et stratégique à partir d’un seul point d’entrée.

Mais prudence : le private equity n’est pas pour tout le monde. Ces placements sont souvent illiquides, exigent un horizon d’investissement long et une solide tolérance au risque. Ils s’adressent principalement aux investisseurs avertis, capables de naviguer dans des environnements économiques instables comme celui façonné par une montée en puissance des droits de douane.

 

Discussion sur les droits de douane dans le secteur immobilier

Le secteur immobilier est rarement au cœur des débats sur les droits de douane. Pourtant, certains segments, notamment dans l’immobilier commercial et industriel dit « essentiel », pourraient non seulement faire preuve de résilience, mais aussi tirer leur épingle du jeu dans un contexte commercial incertain.

Dans leur note d’investissement de mai 2025, les analystes de Lord Abbett soulignent : « Dans le secteur du commerce de détail, nous favorisons les centres commerciaux orientés vers l’alimentaire, soutenus par des enseignes de première nécessité. À l’inverse, les centres commerciaux périphériques et de grande envergure sont plus exposés à un recul de la consommation. Nous restons attentifs aux risques de faillite des locataires, car les marges et volumes du commerce de détail risquent d’être affectés par la hausse des droits de douane. »

Un bon indicateur de résilience dans ce contexte ? Se demander si l’activité d’un locataire est jugée indispensable, comme ce fut le cas lors de la pandémie de 2020. Alimentation, pharmacie, soins de santé : ces secteurs, qui n’ont pas cessé leurs activités malgré les crises successives, continuent de générer une demande constante.

Les locataires opérant dans des secteurs dits essentiels offrent une plus grande stabilité des flux de trésorerie, ce qui en fait des candidats plus fiables pour les investisseurs immobiliers. Dans un environnement économique incertain, marqué par des droits de douane élevés et une consommation fragilisée, ce type d’immobilier se positionne comme un refuge potentiel.

Si le commerce de détail essentiel offre une certaine stabilité, l’immobilier industriel offre des opportunités. Les entrepôts, les centres logistiques et les centres de distribution « Last Mile » sont devenus de plus en plus importants dans un environnement de droits de douane élevés pour soutenir les chaînes d’approvisionnement nationales, le transport et les livraisons dans les délais.

Les investisseurs disposent des options classiques que sont les REIT (Real Estate Investment Trusts) publics ou privés pour accéder à ces secteurs du marché immobilier. Une autre option qui concerne spécifiquement l’immobilier industriel est le Zero-Coupon Delaware Statutory Trust (DST). Un DST à coupon zéro canalise l’intégralité des flux de trésorerie vers le remboursement de la dette contractée pour l’acquisition de l’actif. Ces opérations portent généralement sur des biens de haute qualité, loués à des locataires solides, comme de grands centres logistiques.

Mais quel intérêt d’investir sans percevoir de revenus ? La réponse tient en un mot : avantages fiscaux. Les DST à coupon zéro permettent aux investisseurs de différer le paiement de l’impôt sur les plus-values générées lors de la vente d’un bien immobilier, via le mécanisme de l’échange 1031. En réinvestissant le produit de la vente dans un DST, l’investisseur évite de passer à la caisse du fisc tout en repositionnant ses actifs dans un secteur dynamique.

Si l’absence de revenus réguliers peut sembler dissuasive, investir dans un DST à coupon zéro peut s’avérer plus avantageux que de devoir régler immédiatement une importante facture fiscale lors de la vente d’un bien immobilier. Ce type d’investissement permet en effet de reporter l’imposition sur les plus-values grâce au mécanisme de l’échange 1031.

Par ailleurs, les investisseurs peuvent réaliser un gain à la sortie, notamment si :

  • le bien immobilier prend de la valeur au fil du temps ;
  • ou si une partie de la dette est remboursée pendant la durée de détention, qui peut s’étendre de 10 à plus de 20 ans.

Cependant, il est essentiel de noter que le remboursement du capital du prêt est considéré par l’IRS comme un revenu imposable. Comme aucune distribution n’est versée pendant la durée du placement, les investisseurs pourraient devoir payer de leur poche les impôts sur ce revenu « fictif ».

En outre, les DST proposés via des placements privés sont hautement spéculatifs, illiquides, et présentent un risque significatif de perte en capital. Cela dit, face aux incertitudes liées aux droits de douane et à la volatilité des marchés, les investisseurs disposent d’alternatives de diversification : DST à coupon zéro, immobilier stratégique ou encore capital-investissement – autant de véhicules qui peuvent offrir un potentiel de croissance intéressant dans le bon contexte.

 

Une contribution de Fred Hubler pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie


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