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Technosolutionnisme, IA et climat : ce qu’il faut retenir du Meet’Up Greentech 2025

Technosolutionnisme, IA et climat : ce qu’il faut retenir du Meet’Up Greentech 2025 - christophe riva 1 1
Le Meet'Up Greentech s'est tenu du 21 au 22 octobre à Station F
Station F accueillait du 21 au 22 octobre la nouvelle édition du Meet'Up GreenTech, qui rassemble divers entrepreneurs porteurs de solutions pour accélérer la transition énergétique. Forbes France a pu assister à ce rendez-vous chapeauté par le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.

Malgré le souffle automnal balayant les pavés parisiens ce mardi 21 octobre, la file d’attente obstruant l’entrée de Station F s’étend sur une bonne dizaine de mètres environ. À la file indienne, les nouveaux arrivants pénètrent un à un ce campus de start-up né en 2017 sous l’impulsion de Xavier Niel implanté dans le treizième arrondissement de la capitale. Après un rapide petit-déjeuner, les visiteurs, affublés de badges pendant à leurs cous, se pressent dans une salle de cinéma souterraine baignée dans une faible obscurité pour assister aux diverses tables rondes rythmant la journée.

Pour sa nouvelle édition, le Meet’Up Greentech rassemblait environ 70 stands de partenaires ou de start-up françaises, européennes et internationales. Si ce rendez-vous annuel rassemble chaque année plus de 2500 participants, le format 2025 est par définition différent de ses prédécesseurs : il marque en effet le dixième anniversaire de l’Accord de Paris, lequel prévoyait une limitation du réchauffement climatique à 1,5°C.

 

L’innovation au service de l’Accord de Paris

Dès son inauguration par le ministre délégué chargé de la Transition écologique Mathieu Lefèvre, le Meet’Up Greentech a posé les enjeux des énergies “vertes” dans un monde empoisonné par les esprits climatosceptiques portés au pouvoir de certaines nations. Celui qui est également député Renaissance a exprimé la nécessité de s’engager dans la décarbonation des industries françaises :


« La transition ne relève pas de ce qu’il faut faire, mais de ce que nous avons tout intérêt à faire », a déclaré Mathieu Lefèvre à l’assemblée face à lui.

Le Meet’Up Greentech a laissé place à un premier échange baptisé « L’IA peut-elle tenir les promesses de Paris », au sein duquel étaient présents Béatrice Kosowski (présidente d’IBM France), Sylvain Waserman (président-directeur général de l’ADEME) et Brice Huet (Commissaire général au développement durable de MAT-TE). Une discussion qui a insisté notamment sur l’importance de l’innovation dans la lutte contre le changement climatique :

« La douce continuité ne va pas suffire, assure Sylvain Waserman. Il va falloir des ruptures, des accélérations. Des ruptures comportementales mais aussi technologiques. Ces innovations qui vont apporter des coups d’accélérateur sont nécessaires pour atteindre nos objectifs. »

Cette idée de technologie de rupture est d’ailleurs convoitée par Philippe Aghion, lauréat français du prix Nobel de l’Économie 2025 qui a théorisé le concept de destruction créatrice, processus par lequel l’apparition d’un produit meilleur rend obsolètes des formes antérieures. La volonté de rupture et d’accélération technologique souhaitée par le président-directeur général de l’ADEME est d’autant plus forte que l’Accord de Paris, qui visait à contraindre le réchauffement climatique à 1,5°C, semble déjà hors de portée. 

« Il serait absurde de s’opposer à l’IA, mais il serait irresponsable de ne pas s’interroger sur son impact », affirme Sylvain Waserman au cours de la discussion.

Parce que si l’intelligence artificielle peut effectivement prétendre accompagner les entreprises vers la transition énergétique, elle est aussi pointée du doigt pour son intarissable gourmandise en termes de ressources. De fait, l’ADEME et l’ARCEP prévoient que l’IA pourrait générer 25 millions de tonnes de CO2 en 2050 en France, soit trois fois plus qu’aujourd’hui.

 

Les limites certaines du technosolutionisme

Bien que le coeur du Meet’Up Greentech vise à lier étroitement innovation et durabilité, nombreux sont les intervenants à avoir posé les barrières du technosolutionisme. Ce courant de pensée, qui estime que tout type de problèmes (qu’ils soient environnementaux, sociaux ou économiques) peut être résolu par des solutions technologiques, a globalement été perçu comme une illusion. Un raisonnement qui est apparu à de nombreuses reprises lors de la table ronde intitulée « Smart Grid et technologies vertes : comment l’innovation numérique peut-elle faire de l’Europe un champion de l’énergie décarbonée ».

« Le numérique n’est pas la solution mais est un facteur de solution pour la trajectoire de transition énergétique », a estimé Laurent Kueny, directeur de l’énergie au sein de la Direction générale de l’Énergie et du Climat.

« Attention au technosolutionnisme, alerte quant à lui Gabriel Bareux, directeur de la Recherche et Développement chez RTE. Il faut voir les opportunités, mais aussi les enjeux qui sont liés. »

Un constat partagé par Stéphane Dupré La Tour, directeur Innovation Avancée et Technologies Numériques chez EDF et panelliste au sein de cette table ronde. S’il affirme bel et bien que « le numérique ne va pas résoudre les causes profondes », il souligne le soutien indéniable dont ce dernier peut faire preuve concernant la prévision de la demande, la cybersécurité ou encore la robotisation.

 

Le numérique, un allié pour la transition énergétique

Néanmoins, le numérique peut s’imposer comme une aide de taille dans certains cas concrets. Une idée que défend Gilles Vermot Desroches, directeur du développement durable de Schneider Electric, pour lequel l’IA se présente comme la dernière solution pour lutter contre le réchauffement climatique :

« Sur les questions climatiques, on va dans le mur, approuve-t-il lors de la table ronde. On est plus dans le combat des accords de Paris : la seule porte de sortie est l’IA. »

Grâce à l’intelligence artificielle, Schneider Electric conçoit des bâtiments intelligents permettant une réduction de la consommation énergétique de 20 à 30 %. Ces “smart buildings”, dont les objectifs sont de connecter tous les équipements, capteurs, logiciels et services ensemble, permettent d’optimiser grandement la gestion de l’énergie.

Nicolas Trift, directeur de la stratégie de Météo France, confirme cette idée d’« IA utile » au sein du panel intitulé « IA et risques: mieux prédire pour mieux adapter notre économie à un climat qui change » :

« Avec la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes, on voit bien l’importance d’anticiper ces phénomènes et d’apporter des outils au service des territoires et de la société toute entière, concède-t-il lors du tour de table, micro en main. »

L’intelligence artificielle se montre particulièrement utile pour Météo France, grâce à laquelle la prévision du temps est mille fois plus rapide qu’avec de simples algorithmes. Le numérique se montre d’autant plus essentiel que jusqu’à 30% du PIB national est influencé par la météo.

« Quel que soit le scénario du GIEC, il va falloir s’adapter, conclut Aldrick Zappellini, directeur Data et IA du Crédit Agricole. Il faut faire prendre conscience à tout le monde qu’il va falloir penser à de nouveaux modèles d’accompagnement d’entreprises, et puis pour les clients, anticiper davantage les décisions. »

 


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