L’électrification de notre société est une étape incontournable pour la décarbonation de l’énergie et la lutte contre le réchauffement climatique. Cependant, cette révolution verte ne pourra se produire sans les outils nécessaires à l’optimisation de la gestion de l’énergie. Quel est le rôle des semi-conducteurs de puissance dans cette transformation ?
Une contribution de Gauthier Chicot, Président et co-fondateur de la Deeptech française Diamfab
La transition énergétique doit s’accompagner d’une certaine frugalité impliquant une gestion optimisée de l’énergie, enfin reconnue comme une ressource rare. Et c’est un véritable changement de paradigme, car si l’innovation a servi l’amélioration de nos vies, face à l’urgence climatique, nous devons désormais innover pour vivre aussi bien, mais de façon responsable.
Des semi-conducteurs invisibles et pourtant essentiels à la transition énergétique.
Je constate encore souvent autour de moi que le terme « semi-conducteur » reste flou et les enjeux associés sous-estimés. Rien d’étonnant, puisque l’on parle d’un élément invisible. Mais pourquoi sont-ils si importants pour la société d’aujourd’hui et de demain ?
Le terme « semi-conducteur » désigne les matériaux aux propriétés physiques spécifiques qui permettent de contrôler le passage du courant électrique. Ils sont indispensables à la fabrication des circuits électroniques, des cellules photovoltaïques, et plus largement de toutes les puces qui pilotent nos objets numériques, nos véhicules, nos systèmes énergétiques intelligents. Ce sont donc les semi-conducteurs qui permettent aux puces électroniques d’être performantes, rapides et économes en énergie. On distingue schématiquement deux grandes catégories :
- Les semi-conducteurs “classiques”, qui permettent à nos téléphones, ordinateurs et objets connectés du quotidien de fonctionner.
- et les semi-conducteurs de puissance, conçus pour gérer des courants élevés et optimiser le rendement énergétique dans des systèmes de conversion et de protection.
Notre quotidien s’accompagne d’usages toujours plus énergivores, faisant de l’électricité le nouvel or noir, dont la gestion doit être optimale et responsable.
Le semi-conducteur – à la croisée des enjeux économiques, énergétiques et environnementaux.
Éléments fondamentaux de l’électronique de puissance, les semi-conducteurs de puissance permettent de convertir, moduler et piloter l’énergie électrique avec la meilleure efficacité possible. En améliorant le rendement énergétique des équipements, ils permettent non seulement de réduire la consommation d’électricité, mais aussi de faire baisser les coûts d’exploitation.
Mais au-delà de leur omniprésence, le choix même des matériaux utilisés pour leur production devient un enjeu majeur.
En effet, depuis quelques années, le matériau star est le semi-conducteur à base de carbure de silicium (SiC) et bien que cette innovation soit récente, émerge déjà un nouveau matériau, dont les promesses sont encore plus incroyables : le diamant synthétique. Ce dernier offre des performances électriques et thermiques supérieures, ainsi qu’une empreinte carbone réduite tout au long du processus. Le diamant synthétique représente une véritable évolution, au moins comparable à celle que connaît actuellement l’industrie en passant du silicium au carbure de silicium.
Et le plus beau, c’est que ce matériau semiconducteur à forte valeur ajoutée et plus responsable peut être produit en France, ajoutant ainsi une dimension de souveraineté technologique aux enjeux de performance et de sobriété.
Jusqu’il y a peu encore, il fallait d’abord être économiquement viable et performant afin que l’innovation puisse se démocratiser et avoir de l’impact. La durabilité relevait souvent d’un engagement personnel ou d’une vision d’entreprise. Désormais, des disruptions technologiques, comme l’émergence du diamant synthétique, permettent de jouer sur les 3 tableaux.
Plus qu’une industrie isolée, un levier stratégique pour l’innovation responsable
Le processus de fabrication des semi-conducteurs de puissance mobilise une multitude d’acteurs, chacun jouant un rôle crucial. Or, nous avons la chance en France de disposer de tous ces acteurs : depuis l’émergence de concept jusqu’à l’industrialisation, nous sommes représentés sur l’ensemble de la chaîne de production de ces composants déterminants pour relever le défi de la transition énergétique.
De facto, si mes associés et moi avons une certitude, c’est que considérer l’industrie du semi-conducteur comme une filière technologique isolée parmi tant d’autres est une hérésie : elle est aujourd’hui un levier stratégique au croisement de l’innovation, de la performance énergétique, de la compétitivité industrielle et de la souveraineté nationale.
Mieux intégrer les enjeux liés aux semi-conducteurs dans les politiques industrielles et environnementales, c’est reconnaître leur rôle pour bâtir une économie plus responsable et plus résiliente. C’est aussi s’assurer que les choix d’innovation que nous faisons aujourd’hui, serviront demain un progrès qui a du sens. La France a les cartes en main, va-t-elle enfin poser ses atouts ?
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