Gaëlle Lebrat Personnaz, l’entrepreneuse engagée qui révolutionne la manucure

Vision stratégique, innovation produit, éthique environnementale et croissance éclair : Gaëlle Lebrat Personnaz a réussi là où beaucoup échouent. En transforman une petite entreprise familiale en une marque cosmétique internationale à l’ADN green, la fondatrice de Manucurist incarne une génération de femmes leaders qui allient business et convictions. Retour sur une success-story de la beauty tech.

Un article écrit par Gaëlle Ménage, à retrouver dans le numéro 31 du magazine Forbes.

Rien ne prédestinait Gaëlle Lebrat Personnaz à se retrouver à la tête d’une marque de vernis à ongles. Diplômée d’un master en droit des affaires et de l’Institut français de la mode, elle commence sa carrière au sein des plus grandes maisons de luxe : Louis Vuitton, Prada, puis Saint Laurent.

Un parcours dans l’univers exigeant du retail haut de gamme qui lui conférera les armes pour son aventure entrepreneuriale. « Je m’intéressais depuis longtemps à l’entreprise de ma mère, un institut de beauté. Donc je connaissais par cœur le business de la manucure. J’avais toujours rêvé de monter une boîte dans la cosmétique mais quand j’ai repris Manucurist, je n’ai pas voulu continuer les activités de ma mère parce que je voulais développer des produits qui s’adresseraient au grand public », explique-t-elle. En 2016, Gaëlle reprend donc l’affaire familiale, jusque-là axée sur les instituts et les professionnels. Elle conserve uniquement le nom (Manucurist) et balaie tout le reste. Exit les gels agressifs, la distribution exclusive aux pros et les prestations en salon. Son ambition, elle, est bien définie. L’entrepreneure veut réinventer l’expérience du vernis, en alliant performance, beauté et respect de la santé et de l’environnement.

Green Flash pour dépoussiérer le marché

C’est en 2020, en pleine crise sanitaire, que l’histoire bascule. Gaëlle Lebrat Personnaz et son équipe mettent au point Green Flash, un vernis LED révolutionnaire, à mi-chemin entre le vernis classique et le semi-permanent. Celui-ci se retire à l’eau chaude et au dissolvant doux, sans acétone ni grattoir. Il tient jusqu’à dix jours, se pose à la maison et, surtout, respecte la santé des ongles.

« Le marché du semi-permanent était dominé par des produits contenant du méthacrylate, souvent allergènes. Je voulais une solution clean, simple et efficace, qui enlève aux femmes ce dilemme entre beauté et toxique. On a réussi à démocratiser cette innovation et en faire une catégorie qui n’existait pas auparavant », explique la CEO de Manucurist.  L’engouement est immédiat. Confinées, privées d’esthéticiennes, les consommatrices s’arrachent le produit vendu en ligne. En un an, la marque passe de 1 à 7 millions d’euros de chiffre d’affaires. Le succès est au rendez-vous, en France comme à l’étranger.

Depuis son lancement fulgurant, Manucurist connaît une croissance exponentielle. En 2024, l’entreprise atteint 45 millions d’euros de CA, dont 70 % réalisés en B2C sur le site de la marque, en propre. La projection pour 2025 ? 75 millions d’euros, selon sa patronne, avec une répartition plus équilibrée entre le digital, la distribution sélective (Sephora, Galeries Lafayette, Monoprix, ou encore pharmacies) et le B2B, en pleine explosion. « L’avenir, c’est l’hybridation des canaux. On a prouvé notre efficacité en DTC [direct to consumer], mais le retail physique reste indispensable pour rassurer et convaincre, surtout à l’international », assure Gaëlle Lebrat Personnaz.

Aujourd’hui présente dans une cinquantaine de pays, Manucurist s’est structurée aux États-Unis et au Royaume-Uni. Deux marchés porteurs où la marque pourrait générer respectivement 25 et 11 millions d’euros en 2025, selon la dirigeante. Un développement rapide, mais pensé. « Comme j’avais cette super innovation derrière moi, il fallait agir rapidement et la proposer à l’étranger », assure Gaëlle.

Le marché du semi-permanent était dominé par des produits contenant du méthacrylate, souvent allergènes. Je voulais une solution clean, simple et efficace, qui enlève aux femmes ce dilemme entre beauté et toxique.

Made in France

L’un des piliers de Manucurist est sa fabrication (presque) 100 % française. Les produits sont conçus et fabriqués à Chartres, dans le bassin cosmétique historique de la marque. Les flacons, eux, viennent d’Italie – faute de verrier français sur ce segment – mais tout le reste est local, de la formulation à la logistique en passant par le packaging et le contrôle qualité.

« C’était non négociable pour moi. On ne peut pas revendiquer une cosmétique responsable si on délocalise tout », affirme Gaëlle Lebrat Personnaz. Cet engagement se retrouve dans les formules : bio-sourcées, véganes, sans perturbateurs endocriniens, ni ingrédients controversés. L’entreprise, très à cheval sur la R&D, bannit ainsi méthacrylates, acétone, solvants agressifs, et mise sur des ingrédients d’origine naturelle. « Je suis profondément féministe, et je trouvais révoltant qu’on sacrifie notre santé au nom de l’esthétique. Mon objectif est de concilier les deux, sans compromis. »

Derrière la croissance de Manucurist affleure un management résolument moderne. À 51 ans, Gaëlle Lebrat Personnaz cultive une posture d’écoute, d’exigence et de transparence. Son équipe compte aujourd’hui une cinquantaine de collaborateurs, majoritairement des femmes. Un choix non délibéré, mais révélateur. « Dans l’aventure Manucurist, j’ai des femmes extraordinaires qui m’ont rejointe au fil des années et qui ont largement participé au succès de la marque. »

Mais malgré le succès de son entreprise, Gaëlle Lebrat Personnaz n’élude pas les difficultés du parcours entrepreneurial. « J’ai connu le syndrome de l’imposteur. Je trouve qu’il est essentiel d’apprendre aux jeunes filles, tôt dans leur éducation, qu’il faut oser et ne pas avoir peur de l’ambition. »

Une vision durable

Si Manucurist est aujourd’hui rentable, avec une base de clientes fidèles et une communauté engagée, Gaëlle Lebrat Personnaz voit plus loin. Elle veut en faire la référence mondiale de la manucure clean et créative, avec une approche qui dépasse le simple produit. « Ayant longtemps travaillé dans la mode, j’avais envie d’insuffler l’image d’une marque dans laquelle les femmes pouvaient se reconnaître. Et bien souvent, green ne rime pas bien avec fashion. Les femmes ne font pas vraiment de grosses projections par rapport à l’univers de marque. J’avais envie de montrer que je pouvais être efficace et clean dans mes formules mais que les femmes puissent se reconnaître dans l’image que j’avais envie de projeter. Celle d’une femme qui porte des solutions durables sur ses ongles. »

Gaëlle Lebrat Personnaz construit sans bruit, mais avec puissance. Loin des discours tapageurs, elle incarne une nouvelle façon de faire du business : ancrée dans le réel et portée par le sens. Manucurist ne fait pas que colorer les ongles, elle redéfinit les codes d’un secteur trop longtemps dominé par des produits opaques et des standards dépassés. « Depuis longtemps, je me disais que j’avais des solutions à apporter au marché de la manucure parce que c’était hyper poussiéreux. Quand on débarque avec des solutions qui parlent aux femmes et de l’ambition, ça peut marcher. On est très fiers de ce qu’on a réalisé en huit ans », conclut Gaëlle Lebrat Personnaz.

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