Forbes France : Vous aviez déjà connu une belle réussite avec PriceMatch, rachetée par Booking.com. Qu’est-ce qui vous a donné envie de repartir dans l’entrepreneuriat avec Pennylane, et qu’avez-vous fait différemment cette fois-ci ?
Arthur Waller : Après le rachat de PriceMatch, tout est allé très vite. On a eu le sentiment que l’aventure s’était arrêtée un peu brutalement. Avec mes associés, nous avions envie de repartir, mais cette fois sur un sujet que nous connaissions vraiment et qui résolvait un vrai problème.
Pennylane est née de cette envie et d’un constat : la comptabilité est un univers complexe, souvent vécu comme une « boîte noire » par les dirigeants d’entreprise. Nous avons voulu construire une solution centrée sur les besoins des utilisateurs, et pas seulement améliorer l’existant.
Pennylane a très vite trouvé sa place sur un marché réputé difficile. Quels ont été, selon vous, les ingrédients clés de cette réussite ?
A. W. : Nous avons choisi un marché concurrentiel mais vieillissant, un peu comme Qonto l’a fait dans la banque ou Alan dans l’assurance santé. Notre succès vient de plusieurs facteurs : un positionnement clair dès le départ, une vision forte qui a donné du sens à nos équipes, et surtout la complémentarité de nos sept cofondateurs. Beaucoup d’investisseurs voyaient cela comme un risque, mais cela nous a permis d’aller beaucoup plus vite.
Un élément clé est venu accélérer notre croissance : la réforme de la facturation électronique. Pennylane est devenu le plus gros opérateur agréé par Bercy. C’est une transformation profonde du marché qui pousse toutes les entreprises à se digitaliser.
Vous avez levé plus de 100 millions d’euros en un peu plus d’un an. Comment cet argent va-t-il aider Pennylane à grandir ?
A. W. : Nous préférons lever des fonds avant d’en avoir réellement besoin, pour rester maîtres de notre stratégie. Nos investissements se concentrent sur trois grands chantiers :
- La facturation électronique, qui devient le cœur du système de gestion des entreprises.
- L’intelligence artificielle générative, qui permettra d’automatiser la saisie et la catégorisation des factures, mais aussi d’améliorer la partie conseil.
- Les services financiers intégrés, grâce à notre partenariat avec Swan, pour que nos clients puissent tout gérer au même endroit.
Aujourd’hui, environ un quart de nos clients utilisent déjà ces fonctionnalités bancaires. Notre objectif est d’offrir un outil complet, de la facture à la trésorerie.
Dans un contexte où beaucoup de startups ferment et où les levées de fonds se raréfient, quel est le secret pour survivre et continuer à croître ?
A. W. : Il faut revenir aux fondamentaux et résoudre de vrais problèmes. Les projets qui apportent une vraie valeur trouvent toujours un financement. La période actuelle est plus exigeante qu’en 2020, mais bien meilleure qu’en 2012. C’est une bonne chose : cela incite les entrepreneurs à construire des modèles solides et durables.
De nombreuses entreprises doivent aujourd’hui composer avec l’incertitude économique et géopolitique. Quels conseils donneriez-vous aux dirigeants pour rester agiles ?
A. W. : Le cash est le nerf de la guerre. Il faut piloter sa trésorerie de très près, surtout quand les délais de paiement s’allongent. Nous avons la chance d’être dans un secteur où les abonnements d’expertise comptable sont rarement coupés, mais beaucoup de clients nous disent être sous pression à cause de la succession de crises.
Je crois aussi que l’Europe doit accélérer sa coopération pour simplifier les règles, notamment en matière de TVA et de fiscalité. C’est essentiel pour permettre aux PME de se développer facilement à l’international.
Où voyez-vous Pennylane dans cinq ans ?
A. W. : J’espère que nous serons leaders en France, et présents dans un autre grand pays européen. Nous avons commencé à travailler sur l’Allemagne depuis janvier : des comptables allemands testent déjà notre solution.
Il faut environ trois ans pour se déployer dans un nouveau pays, mais nous prenons le temps de le faire correctement. Notre ambition est de devenir le “SAP” moderne et accessible de la gestion financière.
Avec une croissance aussi rapide, comment conservez-vous la culture d’équipe et l’énergie des débuts ?
A. W. : C’est notre plus grand défi. Nous voulons que Pennylane reste une entreprise accessible et simple, même en devenant un acteur majeur. Cela passe par beaucoup de communication interne, et par le maintien d’une vision partagée. La culture d’entreprise, c’est ce qui nous permettra de continuer à avancer dans la même direction, même en grossissant.
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