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30 under 30 – La suite : qu’est devenue Camille Aumont-Carnel ?

Lauréat du palmarès 30 Under 30 de Forbes France en 2022, Camille Aumont-Carnel continue de parler de sexualité féminine sur son compte Instagram @jemenbatsleclito.
Lauréate du palmarès 30 Under 30 de Forbes France en 2022, Camille Aumont-Carnel continue de parler de sexualité féminine sur son compte Instagram @jemenbatsleclito.

Lauréate du palmarès 30 Under 30 de Forbes France en 2022, Camille Aumont-Carnel continue de parler de sexualité féminine sur son compte Instagram @jemenbatsleclito. Elle a également mis sur pied un cabinet de conseil à destination des marques. 

 

Crée il y a sept ans, le compte Instagram @jemenbatsleclito est devenu un média de référence concernant la sexualité féminine. En octobre 2018, installée chez son meilleur ami, Camille Aumont-Carnel assiste à une discussion masculine sur la sexualité féminine qui la fait bondir. Agacée par ces clichés, elle se tourne vers Internet, mais n’y trouve que des contenus décevants : des articles trop compliqués, des magazines véhiculant des stéréotypes ou encore du porno. F

rustrée par ce vide, elle décide de créer une page Instagram qu’elle veut à la fois drôle, accessible et éducative. Le succès est immédiat : en une semaine, le compte devient viral. Il est désormais suivi par plus de 650 000 personnes. 


 

Forbes France : Où en êtes-vous aujourd’hui, depuis votre sélection 30 Under 30 ?
 

Camille Aumont-Carnel : Deux ans après ma sélection au classement Forbes 30 Under 30 France, j’ai eu l’honneur d’intégrer le classement Forbes 30 Under 30 Afrique, qui a consacré l’élargissement de mon travail à une échelle plus internationale et transversale. Je suis toujours entrepreneuse, leadeuse d’opinion, autrice et conférencière. Depuis, deux structures sont nées. La première, La table de Camille, est une marque à la croisée de l’hospitality, de la narration, de la gastronomie et de la culture. À travers ce projet, je propose une expérience sensible et engagée du goût, qui relie les corps, les territoires, les récits et les émotions.

La deuxième, le cabinet de conseil créatif et stratégique  qui accompagne les marques, institutions et lieux dans la structuration de leur discours, la création de récits à impact et la conception d’expériences spectateurs ou clients exigeantes, audacieuses et ancrées. J’écris actuellement mon sixième livre, un récit de fiction qui explore les liens entre amour, corps et fatigue politique. Et je tourne dans un film, qui vient prolonger mon engagement à l’écran, dans une autre forme de langage et d’incarnation.

Je fais partie de cette génération de femmes qui, en France, portent une révolution sexuelle post-#MeToo. Mon travail participe aux visages emblématiques du féminisme de la quatrième vague, mais surtout à l’invention de nouveaux récits, plus libres, plus disruptifs, plus vivants. C’est dans cette tension entre stratégie, création et transformation que je continue à avancer.

 

Votre projet existe-t-il toujours ?

C.A-C :  Absolument, il existe et les branches s’agrandissent. Après 7 années de développement digital, après avoir réussi à fédérer une communauté de près d’1 million d’abonnés et toucher 4 millions de personnes par mois à travers mes différents médias, concepts et prises de parole. J’investis aujourd’hui le champ physique et corporate pour accompagner des projets, marques,  plateformes et entreprises, porteurs de sens et de transformation, en mettant à profit mon expertise en narration, en prise de parole, en mobilisation de communautés, en stratégie opérationnelle et curation de tendances culturelles.

 

Quelles sont vos activités actuelles ?

C.A-C :  Aujourd’hui, mes activités se déploient entre stratégie, création et transmission. Je dirige un cabinet de conseil créatif et stratégique dédié aux marques, entreprises et institutions qui souhaitent affirmer leur positionnement, structurer leur discours et concevoir des expériences spectateurs ou clients qui comptent. Nous intervenons à la croisée de la stratégie de marque, de la direction artistique, de l’innovation éditoriale et de la formation, avec une expertise particulière sur les secteurs de la RSE, de la culture, du luxe et de l’hospitality.
Je poursuis également mon travail d’autrice. J’écris actuellement mon sixième livre, un récit de fiction, qui explore les liens entre le corps, le désir, l’amour et les tensions politico-culturelles contemporaines.

Enfin, j’interviens régulièrement en tant que conférencière et maîtresse de cérémonie sur des événements en France et à l’international. J’accompagne aussi certaines marques en incarnant leurs campagnes, supports de communication ou outils de vente, pour créer des récits sensibles, cohérents et porteurs de sens.

Ma première passion me manque terriblement, je host un format nommé «  La Table de Camille ». La Table de Camille est une expérience immersive où chaque plat raconte une histoire, chaque service devient une scène, et chaque bouchée ouvre un débat. Pensée comme un lieu de transmission autant que de plaisir, elle traduit les concepts, valeurs et engagements des marques dans un rituel culinaire vibrant. On y parle de gourmandise, de mode, d’amour, de luttes, de corps, de désir, de mémoire et d’innovation, mais avec une fourchette à la main et du vin nature dans le verre. Menus thématiques, storytelling comestible, dialogues entre convives et instants suspendus : tout y est conçu pour que la table devienne un manifeste doux et vivant. C’est de la narration incarnée, joyeuse, servie en plusieurs assiettes.

 

Que retenez-vous de votre parcours entrepreneurial jusqu’ici ?

C.A-C :  Qu’il n’y a pas de trajectoire linéaire. Et que ce n’est pas une faiblesse, au contraire. Ce que je considérais comme une réussite ou un objectif en 2023 ne correspond plus forcément à mes aspirations en 2025. Le succès est une notion mouvante. Il évolue avec ce qu’on vit, ce qu’on traverse, ce qu’on choisit de prioriser. Avoir un cap clair m’a permis de m’en écarter au bon moment. De faire des pas de côté, de prendre des risques, de réinventer mes projets plutôt que de m’y enfermer. Je crois profondément qu’on peut être stratégique sans être rigide. Je retiens aussi que l’engagement, quand il touche à des enjeux sociaux, politiques ou culturels, demande une endurance particulière. Vouloir déranger, provoquer le débat, créer de nouvelles narrations, c’est une posture qui demande du courage mais aussi des allié·es solides. On ne tient pas seule, et ce n’est pas souhaitable de toute façon.

 

Une réussite dont vous êtes fier ?

C.A-C : + de 60 000 livres vendus, + de 2M de voix libérées et sensibilisées à des sujets tabous et des non-dits, + de 12 000 jeunes rencontrés et éduqués sur le terrain en France, Suisse, Belgique, Québec et Martinique, autour des enjeux d’égalité, d’émancipation et de pouvoir d’agir. À travers mes interventions, je crée des espaces de dialogue puissants, mêlant pédagogie, émotion et action, et je m’impose comme une actrice clé de la transformation culturelle et sociale auprès des nouvelles générations.

 

Une difficulté ou un échec marquant ?

C.A-C :  Accepter que certains projets doivent s’arrêter, même quand ils fonctionnent. J’ai longtemps cru que la réussite se mesurait à la longévité ou à la croissance. Mais parfois, un projet ne fait plus sens, même s’il est rentable, visible, applaudi. Le plus difficile n’a pas été l’échec au sens classique, mais le renoncement : dire stop quand tout le monde dit continue. J’ai aussi appris à distinguer l’endurance de l’obstination.

 

Un conseil que vous auriez aimé recevoir au début ?

C.A-C : « Tu n’es pas à un ou deux mois près ! Rien de précieux ne se fait dans l’urgence. »

 

Votre regard sur l’écosystème startup / jeunes entrepreneurs aujourd’hui ? 

C.A-C :  Depuis mes débuts, j’ai vu l’entrepreneuriat s’ouvrir à des récits plus incarnés, plus politiques, plus culturels. Aujourd’hui, 70 % des jeunes entrepreneur·es en France disent vouloir créer une entreprise à impact. C’est un tournant majeur. L’engagement n’est plus un supplément d’âme, c’est un levier stratégique. Mais il reste des freins structurels : moins de 3 % des fonds levés en France vont à des femmes fondatrices et je vous passe le reste des chiffres affligeants qui donnent envie à tant de baisser les bras.

On valorise encore trop la croissance rapide, les pitchs performatifs, les modèles scalables, et pas assez les projets hybrides, culturels ou fondés sur une autre temporalité. Je crois qu’on assiste à une bascule : d’un entrepreneuriat héroïque à un entrepreneuriat relationnel. Plus horizontal, plus situé, plus conscient. Et c’est là que les choses deviennent vraiment intéressantes.

 

Camille Aumont Carnel s’impose comme une voix directe, décomplexée et bienveillante sur les questions de sexualité. À la fois militante et pédagogue, elle combine humour, franc-parler et sens de l’inclusion pour briser les tabous et donner aux ados des réponses claires là où l’école, la famille ou les pairs laissent souvent un vide. Son énergie et sa proximité avec sa communauté en font une figure à la fois accessible et engagée.


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