Après plus de dix ans de carrière en tant qu’acteur, la star de The White Lotus, âgée de 31 ans, connaît enfin son heure de gloire à Hollywood. Mais le cinéma n’est qu’un volet de son ascension : entre investissements lucratifs et développement d’une marque de barres protéinées en plein essor, son agenda est bien rempli.
À 31 ans, l’acteur et entrepreneur n’a guère eu le temps de souffler ces deux derniers mois, après avoir enchaîné quinze pays pour promouvoir The White Lotus, la série culte de HBO qui l’a propulsé sous les projecteurs. « J’ai toujours une barre sur moi », confie-t-il en sortant deux barres protéinées Mosh de sa poche, la marque qu’il a cofondée en 2021. « Surtout les jours de tournage, quand on ne sait jamais vraiment ce qu’on va pouvoir grignoter. Je préfère prévoir. »
À l’image de son personnage dans The White Lotus, Saxon Ratliff, adepte des boissons protéinées, Schwarzenegger garde un œil attentif sur son alimentation. Et les ressemblances ne s’arrêtent pas là : diplômé d’une université prestigieuse, issu d’une dynastie puissante et parfaitement familier avec le luxe, il pourrait facilement se fondre dans la peau de son alter ego. À une différence près : là où Saxon vit encore dans l’ombre de l’héritage familial, Patrick, lui, est en train de bâtir le sien — à Hollywood comme dans le monde des affaires.
Fils d’Arnold Schwarzenegger et de Maria Shriver, il a grandi dans le monde de l’élite hollywoodienne et politique, en tant qu’enfant d’un acteur devenu gouverneur californien milliardaire et d’une journaliste de radio-télévision qui s’avère être une Kennedy. Il s’est passionné très tôt pour le métier d’acteur, se rendant souvent sur les plateaux de tournage de son père lorsqu’il était enfant. « Il m’est arrivé de me dire : “Mon Dieu, c’est un sacré héritage à porter. Est-ce que je devrais changer de nom et prendre un pseudonyme ?” », confie Schwarzenegger. « Ces questions m’ont traversé l’esprit. Mais au final, je suis fier de mon père, de la vie qu’il m’a offerte, du nom qu’il a façonné et de l’image qu’il a bâtie. »
C’est l’esprit entrepreneurial de son père que Schwarzenegger a adopté en premier lieu. Sa mère se souvient qu’enfant, il était rivé devant la télé à chaque diffusion de Shark Tank, et qu’il demandait pour son anniversaire quelques centaines de dollars pour ouvrir un compte E-Trade et acheter des actions Apple.
En 2008, à 15 ans, il effectue un stage auprès du producteur de films John Davis, un investisseur majeur de Wetzel’s Pretzels, qui venait de revendre sa part avec un groupe d’actionnaires pour environ 36 millions de dollars, soit treize fois son investissement initial. Ce succès a marqué le jeune lycéen, surtout quand il a appris que les fondateurs Elise et Rick Wetzel lançaient une nouvelle chaîne de pizzas fast-food.
Les parents de Schwarzenegger lui prêtent alors près de 50 000 dollars pour investir dans Blaze Pizza, aux côtés d’investisseurs prestigieux comme LeBron James. Six ans plus tard, en 2014, il ouvre sa première franchise Blaze dans sa ville natale, Los Angeles. « J’ai rapidement remarqué que les consommateurs cherchaient des alternatives plus saines, avec des options végétaliennes et des croûtes plus légères », explique-t-il. « Je me suis donc dit qu’il fallait continuer à investir dans ce type d’entreprises. »
En 2015, près de huit ans après son premier investissement, Schwarzenegger, alors en dernière année d’université, a vendu ses parts dans Blaze Pizza pour au moins 2 millions de dollars, selon Forbes. Il a remboursé ses parents pour le prêt initial, puis investi dans d’autres marques axées sur la santé, comme la poudre hydratante Liquid IV et les sodas prébiotiques Olipop et Poppi — ce dernier ayant été racheté pour 2 milliards de dollars plus tôt cette année.
Son portefeuille s’est développé en parallèle de sa carrière d’acteur. Pendant ses études à l’USC, Schwarzenegger a commencé à suivre des cours de théâtre, un engagement hebdomadaire qu’il a maintenu pendant toute la décennie suivante. Il a enchaîné plusieurs petits rôles au cinéma et à la télévision, dans Copains pour toujours 2 ou la série Scream Queens, sans pour autant connaître la percée tant attendue.
Lorsque la pandémie a paralysé l’industrie cinématographique en 2020, Schwarzenegger a emménagé chez sa mère. Ensemble, ils ont lancé Mosh, une marque de barres protéinées conçues pour stimuler la santé cérébrale. (Mme Shriver, militante de longue date pour la recherche sur Alzheimer après avoir vu les effets de la maladie sur son père Sargent Shriver — figure clé du Corps de la paix et d’autres programmes de l’ère Kennedy —, a inspiré ce projet.)
Les barres Mosh contiennent des ingrédients comme la citicoline, les champignons crinière de lion et les oméga-3, réputés pour leurs bienfaits cognitifs. « Ma mère est la visionnaire, moi je concrétise son rêve », confie Schwarzenegger. « Je joue aussi le rôle de l’avocat du diable côté business. »
Le duo a investi près d’un million de dollars pour lancer Mosh, sans faire appel à des fonds levés ni à une agence de communication. « Nous avons élaboré les barres avec un médecin et un formulateur, en gérant tout nous-mêmes. Mais la chaîne d’approvisionnement a été un vrai défi pendant la crise sanitaire — tout ce qui pouvait mal tourner, est arrivé. »
Le timing s’est pourtant avéré parfait. Après 2020, le marché des barres protéinées, qui pesait près de 5 milliards de dollars en 2024, a connu une forte reprise. Mosh a réalisé 4 millions de dollars de chiffre d’affaires en 2022, sa première année complète d’activité. « Il a toujours été très impliqué dans la construction de l’entreprise », raconte Mme Shriver. « Je voulais que nos barres soient vendues chez Target dès la première année, mais il m’a répondu : “Non, il faut d’abord construire, apprendre à connaître nos consommateurs.” Dans sa vie personnelle, il est loin d’être calme, mais en affaires, il fait preuve d’un sang-froid et d’une maîtrise impressionnants. »
En 2023, Mosh a levé 3 millions de dollars lors d’un tour de série A, mené par la société d’investissement du conseiller financier de longue date d’Arnold Schwarzenegger, pour soutenir son développement dans la distribution. Cette même année, la marque a réalisé un chiffre d’affaires de 7 millions de dollars. En 2024, Mosh a conquis les rayons des magasins Erewhon et Sprouts, terminant l’année avec un chiffre d’affaires porté à 12 millions de dollars, bien que l’entreprise ne soit pas encore rentable.
Malgré ses engagements entrepreneuriaux, Schwarzenegger n’a pas renoncé à sa carrière d’acteur. Au début de l’aventure Mosh, il a même envisagé de quitter Hollywood « si le métier d’acteur ne fonctionnait pas ». Mais tout a basculé lorsqu’il a décroché un rôle dans une mini-série HBO Max aux côtés de Colin Firth. En 2023, il tient ensuite un rôle principal dans un spin-off de la série Amazon Prime The Boys, avant de s’imposer dans The White Lotus. Tournant la série à succès de Mike White en Thaïlande début 2024, il avoue que cumuler ces deux activités l’a quelque peu épuisé. « Travailler sur Mosh pendant le tournage en Thaïlande relevait quasiment de l’impossible », se rappelle-t-il. « Certaines nuits, je devais me réveiller à 2 ou 3 heures du matin pour participer à des réunions Zoom avec Sprouts ou Kroger. »
Pour l’instant, il ne songe pas à quitter l’entreprise, même s’il a déjà atteint sa première étape — modeste mais cruciale — en faisant passer le chiffre d’affaires à 10 millions de dollars. « C’était mon objectif : être à la tête de l’entreprise pour y parvenir », explique-t-il. « Ce type de croissance, passer de zéro à 10 millions, est très différent de celle qui va de 10 à 100 millions. Il faut quelqu’un sur le terrain, au quotidien, pour franchir ce cap. »
Cette année, Mosh devrait dépasser les 20 millions de dollars de chiffre d’affaires et prépare un nouveau tour de table cet été pour accélérer sa croissance en distribution et viser la rentabilité, précise Jeff Gamsey, président et directeur des opérations. Schwarzenegger et Shriver visent désormais une expansion vers des géants comme Costco et Walmart.
Dans ce rythme effréné, la vie ne ralentit pas. Mais pour Patrick Schwarzenegger, plus d’activité rime avec plus d’énergie. « Il y a quelques années, un dirigeant de studio m’avait conseillé d’arrêter les affaires, que ce serait trop compliqué de jongler entre les deux », raconte-t-il. « Pourtant, je vois une vraie synergie entre le cinéma et l’entrepreneuriat. Au fur et à mesure que ma marque grandit, j’espère que ma carrière d’acteur suivra. Au fond, être acteur, c’est aussi gérer une entreprise, c’est construire une marque. »
Un article de Simone Melvin pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie
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