Alors que le véhicule neuf devient un produit d’appel à faible marge, la distribution automobile se réinvente autour de trois leviers : l’occasion, la donnée et les services. Une mutation profonde, qui impose aux réseaux de changer de culture, de modèle… et de tempo.
Une contribution de Damien Ferraro, Partner au sein du cabinet de Conseil, TNP
Le neuf décroche, les marges avec
Le constat est connu, mais il devient structurel : le marché européen du véhicule neuf s’est effondré de 20 % par rapport à 2019. Le prix des VN a bondi de 70 % en 15 ans, le pouvoir d’achat n’a pas suivi, et les jeunes générations se détournent de la voiture. Résultat : le VN devient un produit d’appel, parfois même un centre de coûts, que les distributeurs peinent à rentabiliser. Face à cela, la stratégie des groupes les plus performants est claire : réorienter leur modèle vers les segments à forte valeur. Et parmi eux, trois leviers s’imposent.
L’occasion, terrain de rentabilité
Le véhicule d’occasion est devenu le cœur économique des réseaux. Marge supérieure, rotation rapide, potentiel de fidélisation… tout plaide pour son développement. D’autant que les géants du reconditionnement (Aramis, AutoHero…) ont montré la voie : industrialisation, digitalisation, livraison à domicile, parcours fluide. Ce qui était autrefois un marché opportuniste devient une machine à cash. Encore faut-il capter les bons VO : pas seulement les récents en LOA, mais aussi les véhicules de 6 à 12 ans, aujourd’hui échappés au profit du C-to-C. Réussir sur ce marché suppose de créer une offre compétitive, rassurante, et accessible en trois clics, avec une offre de financement intégrée.
La donnée, nouvel actif stratégique
Longtemps négligée, la donnée est en train de devenir le levier central de pilotage des groupes. Mieux connaître ses clients, mieux anticiper les besoins, mieux calibrer les offres : la donnée permet de passer d’un marketing de masse à une relation individualisée, prédictive et fidélisante. Elle devient aussi un outil opérationnel pour la gestion des stocks, la maintenance préventive, et même la valorisation financière. Certains groupes explorent déjà la monétisation des données d’usage auprès de partenaires techniques. Demain, c’est peut-être elle qui fera la différence entre un distributeur rentable et un suiveur.
Les services, levier de marge et de fidélité
Entretien à domicile, contrats flexibles, assurances embarquées, labels environnementaux, extensions de garantie… L’automobile bascule dans une économie servicielle. Chaque point de contact devient une opportunité de revenu récurrent. Et les clients, de plus en plus exigeants, attendent un service au niveau des standards du luxe ou du e-commerce. Mais attention : ces services ne fonctionnent que s’ils s’intègrent dans une expérience fluide, pensée de bout en bout. Cela suppose des outils, des compétences, et une nouvelle culture commerciale orientée valeur plutôt que volume.
Une transformation systémique
Ces trois leviers ne sont pas des ajustements à la marge : ils imposent une refonte en profondeur du modèle économique des distributeurs. Il ne s’agit plus de vendre des véhicules, mais de construire une relation durable avec le client, à chaque étape de son cycle de vie automobile.
Cela demande d’investir, de se structurer, de recruter différemment, et surtout, de penser à long terme. Les groupes qui auront su transformer leur ADN autour de cette logique client-service-donnée prendront une avance décisive. Les autres risquent de rester bloqués dans une économie de la remise, en voie de disparition.
À lire également : Immobilier d’entreprise : une reprise marquée au 1er trimestre 2025, portée par quelques grandes opérations

Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits