Entre incertitudes politiques, pressions budgétaires et tensions sociales, la rentrée 2025 s’annonce décisive pour les entreprises françaises. Du marché des fusions-acquisitions à la fiscalité, en passant par la cybersécurité et les mobilisations sociales, les dirigeants doivent naviguer dans un environnement instable où chaque aléa peut peser sur leur stratégie.
Alors que la France s’apprête à vivre un automne marqué par un vote de confiance à haut risque pour le gouvernement, les entreprises se retrouvent en première ligne face à une série de défis. Le climat des affaires reste fragile, avec une activité de fusions-acquisitions ralentie au premier semestre, des menaces de blocages sociaux, un budget 2026 encore incertain, et des enjeux majeurs pour l’innovation et la cybersécurité. Dans ce contexte mouvant, la capacité des entreprises à anticiper, sécuriser leurs opérations et maintenir la confiance de leurs partenaires sera déterminante pour traverser les prochains mois. Forbes France détaille les défis auxquels vont être confrontés les entrepreneurs.
Reprise des opérations de rachat ou de fusion d’entreprises
Au premier semestre 2025, le volume des transactions de fusions-acquisitions (M&A) en France a diminué de 4 % par rapport à l’année précédente, pour un total de près de 70 milliards de dollars selon le London Stock Exchange. Les annonces successives de l’administration américaine ont réduit la visibilité des entreprises. Pour ne rien arranger, les 44 milliards d’euros d’économies voulus par François Bayrou ont également pesé sur le climat des affaires.
Mais avec l’arrivée de l’été, plusieurs grands mouvements ont été finalisés. En juin, Sanofi a finalisé l’acquisition de la biotech américaine Blueprint, spécialiste des maladies immunologiques rares, pour plus de 9 milliards de dollars. BPCE, a lui obtenu 75 % de la quatrième banque portugaise, Novo Banco, pour 6,4 milliards d’euros (pour 100 % des titres).
Avec l’accord signé entre les États-Unis et l’Union européenne sur les droits de douane le 27 juillet, les banquiers d’affaires tablaient, au début du mois d’août, sur une reprise des fusions et acquisitions dès la rentrée.
« Beaucoup de cessions ou de rapprochements qui étaient à l’étude ont été ralentis durant les premiers mois de l’année, voire temporairement mis en pause, en raison de l’incertitude liée aux droits de douane. Nous nous attendons à ce que ces dossiers soient relancés à partir de septembre », soulignait Marie-Charlotte Etienne, coresponsable Advisory France chez BNP Paribas dans le Monde, le 14 août dernier.
Mais l’annonce d’un vote de confiance sur la dette par François Bayrou le 8 septembre a rebattu les cartes. Les oppositions ont annoncé qu’elles ne voteraient pas la confiance, ce qui pourrait précipiter la chute du gouvernement. Dans cette optique, la France pourrait se retrouver de nouveau sans gouvernement, 8 mois après la censure de Michel Barnier.
Risques de blocages sociaux et fragilité de la productivité
Le pays, qui pourrait se retrouver sans gouvernement le 8 septembre, devrait connaître une forte mobilisation deux jours plus tard. Depuis le mois de juillet, le mouvement « le 10 septembre, bloquons tout » se met en place par l’intermédiaire des réseaux sociaux. Syndicats et partis politiques de gauche ont apporté leur soutien à cet appel.
Pour le moment, des blocages ciblés (routes, supermarchés) et des grèves sectorielles sont attendus. L’ampleur de la mobilisation demeure néanmoins incertaine en raison d’une organisation encore floue et du choix d’un mercredi. Le mouvement pourrait tout aussi s’essouffler (voire ne pas avoir lieu en cas de chute du gouvernement), mais s’il parvient à se coordonner, il pourrait marquer le début d’une contestation prolongée.
Dans ce cas de figure, transport, logistique, approvisionnement, production, services clients… tous ces secteurs pourraient être perturbés. Pour les PME, souvent moins armées que les grandes entreprises pour absorber des chocs externes, la question de la continuité de l’activité devient cruciale. Contrairement aux grandes sociétés qui disposent de services dédiés à la gestion de crise et de plans de continuité robustes, beaucoup de PME fonctionnent sans plan structuré face aux grèves ou aux blocages. Cela signifie que la moindre perturbation peut entraîner retards de livraison, rupture de stocks ou insatisfaction client.
Mettre en place des mesures de continuité peut prendre plusieurs formes :
- Anticiper les besoins en approvisionnement : sécuriser les stocks essentiels avant les dates de mobilisation.
- Flexibilité des équipes : prévoir du télétravail, des horaires décalés ou des rotations pour maintenir un minimum d’activité.
- Communication proactive : informer clients et partenaires de possibles retards et des mesures mises en place pour limiter les impacts.
- Digitalisation et automatisation : renforcer l’usage des outils numériques pour gérer commandes, paiements et relation client à distance
Environnement budgétaire et fiscal en suspens
Alors que les contours du budget 2026 avaient été révélés au mois de juillet, les entreprises attendaient avec impatience la rentrée de septembre pour savoir à quelle sauce elles allaient être mangées. Des gros dossiers comme un relèvement de l’impôt sur les sociétés pour les entreprises avec un chiffre d’affaires important ainsi qu’une refonte de la fiscalité énergétique étaient sur la table.
Après plus d’un an d’incertitude politique, les chefs d’entreprises espéraient que le budget 2026 leur permettrait d’y voir un peu plus clair. Surtout, ils militaient pour que la fiscalité sur les entreprises ne serve pas de variable d’ajustement alors que le Premier ministre entend faire 44 milliards d’euros d’économies.
Si le ministre de l’Économie, Eric Lombard, s’est dit, jeudi 28 août, « convaincu » qu’il y aura un budget pour 2026 « dans les délais » malgré un vote de confiance mal engagé pour François Bayrou, l’inquiétude monte chez les chefs d’entreprise. Ces derniers redoutent qu’une période d’incertitude s’ouvre, freinant les investissements et mettant à l’épreuve la capacité des entreprises à planifier à moyen terme.
Startups et innovation : promesses réglementaires à confirmer
Après deux années compliquées, et avec un soutien amoindri de l’État lors du précédent budget, les start-up scrutaient de près les promesses d’accompagnement pour ce nouvel exercice.
Le gouvernement avait mis en avant la nécessité de renforcer les dispositifs favorisant le financement des startups, en particulier en early stage, pour maintenir la France comme un hub en Europe. Dans ce contexte, une suppression du crédit d’impôt recherche avait été écartée.
Plusieurs débats parlementaires prévoient de simplifier la fiscalité, d’accélérer les paiements Parallèlement, le Sénat, à travers des auditions et rapports (notamment le rapport « Financer l’entreprise de demain » et les travaux du rapporteur Paul Midy), alerte sur le manque de fonds en capital-risque capables de suivre les startups dans leurs tours de financement, et appelle à renforcer cet écosystème.
Menaces internationales : cyber, géopolitique, douanes
Les entreprises sont aujourd’hui confrontées à une multiplication des aléas externes qui échappent largement à leur contrôle direct. Les tensions commerciales, à commencer par la menace récurrente de droits de douane américains, peuvent bouleverser les chaînes d’approvisionnement et renchérir brutalement les coûts. Parallèlement, la recrudescence des cyberattaques — qu’il s’agisse de rançongiciels, de vols de données ou de sabotage numérique — expose les organisations à des pertes financières importantes, mais aussi à une atteinte à leur réputation. À cela s’ajoute la menace de l’espionnage industriel, qui vise directement les savoir-faire et les données sensibles, particulièrement dans les secteurs technologiques et stratégiques.
Dans ce contexte, les entreprises n’ont plus le choix : elles doivent investir dans la cybersécurité, à travers des systèmes de protection renforcés, la formation des équipes et une surveillance proactive. Elles doivent également consolider leur conformité réglementaire et mettre en place des procédures de gestion de crise leur permettant de réagir rapidement en cas d’incident. Au-delà de la simple protection, il s’agit d’un enjeu de compétitivité et de résilience : seules les entreprises capables d’anticiper et de maîtriser ces risques externes pourront maintenir la confiance de leurs partenaires, protéger leurs actifs stratégiques et sécuriser leur développement à long terme.
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