L’image que nous avons des associations est celle d’un monde fait de passion et de dévouement. Des bénévoles engagés, des actions menées avec le cœur, une mobilisation sans faille. C’est une réalité. Mais c’est aussi une vision parfois figée, qui ne prend pas en compte un défi majeur : comment répondre à des besoins croissants sans perdre en efficacité ?
Une contribution de Loïc Dombreval, vétérinaire, président du Conseil National de la Protection Animale (CNPA), et ancien député
Aujourd’hui, les associations sont confrontées à une double exigence. D’un côté, des attentes toujours plus fortes de la part des citoyens. De l’autre, la nécessité d’une organisation rigoureuse pour garantir une action efficace. Face à cette pression, certaines font le choix de s’inspirer des meilleures pratiques du secteur privé. C’est le cas du 3677, première ligne nationale dédiée à la maltraitance animale, lancée en juin 2024. Une initiative qui repose sur une approche hybride, alliant l’engagement associatif et l’expertise de Wisecom, un centre d’appels professionnel basé à Paris.
Professionnaliser sans perdre son âme
Lorsque nous avons ouvert cette hotline, nous avons vite compris que l’émotion ne pourrait pas être notre seul guide. Chaque appel est une détresse exprimée, un besoin d’agir, une urgence ressentie. Pourtant, tous ne nécessitent pas d’intervention. Sur plus de 28 000 appels reçus en quelques mois, près de la moitié ne relevait pas de cas avérés de maltraitance. Certains sont parfois le fruit de mauvaises interprétations, de malentendus ou de querelles de voisinage, par exemple.
En associant le savoir-faire des téléconseillers Wisecom à l’expertise terrain de nos bénévoles, nous avons bâti une organisation capable de filtrer, hiérarchiser et structurer chaque signalement avec rigueur. Et cela a transformé la manière dont nous travaillons. Les enquêteurs bénévoles, autrefois submergés par des signalements peu qualifiés, peuvent désormais concentrer leur énergie sur les cas les plus graves. Nous avons gagné en réactivité, en pertinence et en impact.
Exploiter la donnée pour mieux protéger
L’autre grande évolution qu’incarne le 3677, c’est l’importance croissante de la data dans les missions associatives.
Longtemps, les actions en faveur de la protection animale ont reposé sur des intuitions et des constats empiriques. Aujourd’hui, nous disposons enfin de données précises, exploitables, capables d’orienter nos décisions et de structurer nos interventions. Grâce à Wisecom, nous avons pu centraliser des milliers de signalements et dégager des tendances précieuses : quelles sont les régions les plus touchées ? Quels types d’animaux sont les plus concernés ? Dans quelles circonstances les violences se produisent-elles le plus fréquemment ? Ces informations ne sont pas de simples chiffres : elles sont la clé d’une action plus efficace, plus ciblée, plus adaptée aux réalités du terrain. Elles nous permettent aussi d’anticiper, de prévoir, d’ajuster nos moyens là où ils seront le plus utiles.
En septembre 2025, nous serons en mesure de publier un rapport national documenté sur la maltraitance animale, une première en France. De quoi fournir aux pouvoirs publics des éléments concrets pour ajuster les politiques de protection animale. À terme, cela pourrait aussi permettre de développer des actions préventives ciblées, mener des campagnes de sensibilisation adaptées aux populations les plus à risque et alerter en amont les autorités sur des situations préoccupantes.
Une transformation à l’œuvre dans tout le secteur associatif
Le modèle du 3677 n’est pas un cas isolé. Partout, les associations se posent la question de leur organisation interne, de l’optimisation de leurs ressources et de la professionnalisation de certaines fonctions. Face à des défis grandissants, elles ne peuvent plus fonctionner comme avant ; elles doivent repenser leur manière d’agir, en s’appuyant sur des partenaires capables d’apporter une expertise complémentaire.
Ce n’est pas une remise en question de l’engagement bénévole. C’est une reconnaissance du fait que, pour être pleinement efficace, une cause a besoin d’outils adaptés. Intégrer des compétences issues du privé, tirer parti des nouvelles technologies, structurer la donnée : ces leviers permettent de décupler l’impact des actions menées par les bénévoles. Le 3677 est la preuve que cette évolution est possible, sans renier les valeurs qui font la force du monde associatif. Dans un monde où les enjeux sociaux et environnementaux deviennent plus pressants, les associations de demain ne peuvent plus se contenter d’être engagées : elles doivent aussi être performantes.
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